Les opportunités de carry trade attirent les investisseurs

Depuis le début de l’année, la performance du portage s’est concentrée sur les pays d’Amérique latine et ceux d’Europe de l’Est.
A Madrid
Le "Real brésilien". Photo: Andrew Harrer/Bloomberg News
Le Brésil est un des pays de choix pour le carry trade  - 

La décision de la Banque du Japon, le 28 juillet, de cesser son contrôle de la courbe des taux, va-t-elle interrompre le retour en force du carry trade ? Cette stratégie, qui consiste à emprunter dans des devises à faibles taux d’intérêt pour investir dans des monnaies à fort taux d’intérêt, a longtemps été profitable et populaire avant de tomber en désuétude à partir des années 2010-2012. «Toutes les principales banques centrales mondiales étaient dans une stratégie de taux ultra-bas voire négatifs, explique Olivier Lechevalier, directeur général et co-fondateur de DeftHedge. Or, pour qu’on utilise le carry trade, il faut qu’il y ait un différentiel de taux».

Le retour de l’inflation a changé la donne. «Toutes les banques centrales n’ont pas remonté leurs taux à la même vitesse et certaines, pour des raisons qui leur sont propres, s’obstinent à maintenir des taux ultra-bas comme la Banque du Japon. C’est le contexte idéal pour le retour du carry trade» poursuit le responsable de DeftHedge.

Certains phénomènes peuvent néanmoins avoir un effet négatif sur ces stratégies. « Si les devises restent stables, la stratégie est gagnante, explique Solal Huard, directeur au sein de Kerius Finance. Or, dans un contexte géopolitique particulièrement animé comme le nôtre, les fortes variations sur les monnaies peuvent faire bien plus que compenser le différentiel de taux». D’où l’intérêt de réaliser une stratégie de carry trade dans un cadre bien précis : «Il faut à la fois regarder le différentiel de taux d’intérêt mais aussi l’inflation qui permet de définir le carry réel sans oublier la volatilité et la performance du change» explique Raphael Zeitoun, managing director global markets chez HSBC Continental Europe.

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Depuis le début de l’année, la performance du carry trade s’est ainsi concentrée dans les pays d’Amérique latine, et tout particulièrement en Colombie, au Brésil et au Mexique, mais aussi dans les pays d’Europe centrale, comme la Hongrie et la Pologne. «Les taux y étaient plus élevés que l’inflation, ce qui a généré un carry réel positif. Enfin, la faiblesse de la volatilité et l’appréciation de ces devises par rapport au dollar et à l’euro en ont fait des pays de choix pour le carry trade, poursuit Raphael Zeitoun. Les stratégies de carry restent intéressantes sur le spectre global des marchés émergents: selon l’indice HSBC EM FX Carry, il est une fois et demi plus intéressant de faire du carry aujourd’hui qu’au début de l’année ».

Au premier semestre, les performances incluant le portage et la performance du change par rapport au dollar ont été de +28 % en Colombie (dont 8% de carry), +22 % au Mexique (5%) et +21 % en Hongrie (10%).

Si cette trajectoire devrait se maintenir au cours de ce semestre, des ajustements sont à prévoir. «Nous allons avoir de vrais sujets sur la Pologne, la République tchèque et la Hongrie où les taux d’intérêts réels sont maintenant négatifs, conséquence d’une inflation plus élevée que les taux d’intérêts», ajoute le responsable d’HSBC.

Utilisée de façon tactique dans une recherche de rendement, la stratégie de carry trade ne s’adapte pas nécessairement aux besoins de toutes les clientèles. « Nos clients corporate qui ont des lignes de tirages en multidevises se posent naturellement la question de la devise de tirage de leur dette pour arbitrer entre les différents coûts de financement dans le cadre par exemple d’achat d’actifs ou dans des optiques de refinancement de projets, explique Solal Huard. La stratégie de carry trade implique de rester exposé au risque de change, or nos clients nous sollicitent souvent pour couvrir ce risque ainsi que le risque de taux d’intérêts». Pour les adeptes du risque, le recours à la stratégie est variable : «un hedge fund peut faire du carry trade sur 48 heures», conclut Raphael Zeitoun, «un asset manager sur trois à six mois».

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