Casino met habilement en valeur ses actifs internationaux
Une réorganisation de son organigramme a permis au distributeur de gonfler de plus de 2,2 milliards d'euros ses réserves distribuables.

La création de valeur est parfois aussi simple qu’une réorganisation d’organigramme. Casino a augmenté de plus de 2,2 milliards d’euros le montant de ses réserves distribuables par le seul jeu d'une simplification du contrôle de ses actifs internationaux.
En échange d'actions, Casino Guichard-Perrachon (CGP), société-mère du groupe Casino, a transféré fin 2018 à Tevir, sa filiale à 100%, la part de 25% qu’elle détenait au capital de Géant Holding BV, une société néerlandaise détenant les actifs internationaux du distributeur. Cette dernière possédait déjà 75% du capital de Géant Holding. Elle devient ainsi l’unique actionnaire des actifs internationaux de Casino, principalement Almacenes Exito, la filiale colombienne du groupe détenue à 42%. Exito est également l’actionnaire principale du brésilien GPA.
« Cette opération intra-groupe n’a aucun effet sur les comptes consolidés et elle n’a également aucun impact cash » explique une source proche de Casino. Elle n’a pas non plus d’incidence sur les covenants bancaires du groupe, ceux-ci reposant sur les données consolidées, assure-t-elle.
Ce transfert s'est toutefois révélé comptablement très efficace. Réalisée par le commissaire aux apports Jean-Luc Desplats, qui a longtemps été commissaire aux comptes titulaire de Casino, à l’époque où il travaillait pour EY, la valorisation s'est faite selon la méthode d’actualisation des cash-flows (discounted cash flows, DCF). Pour Exito, principal actif de Géant Holding, le DCF donne une valeur réelle de 3,2 milliards d’euros, deux fois supérieure à sa valeur de marché, Exito étant coté en Bourse. Dans son rapport, le commissaire aux apports reconnaît que « la valeur à 100% de Géant Holding passerait de 6,52 milliards d’euros selon l’approche par DCF à 4,83 milliards selon l’approche par le cours de Bourse », mais il souligne que cette différence peut s’expliquer par la faiblesse de la liquidité du titre Exito par « une décote implicite de prime de contrôle ». Il note aussi que le résultat d'un DCF est « extrêmement sensible à la variabilité du taux d'actualisation retenu ».
Pour Casino, le calcul est en tout cas extrêmement positif. La valeur de l’apport (2,49 milliards d’euros) est nettement supérieure à la valeur nominale des actions Tevir émises (230.000 euros). CGP gagne ainsi une prime d’apport de 2,26 milliards d’euros qui vient gonfler ses réserves.
La réorganisation vise-t-elle à redistribuer cette prime ? Un proche du groupe rappelle qu’avec déjà 7 milliards d’euros de réserves distribuables, Casino a largement de quoi couvrir le paiement de son dividende.