
Le marketing des sociétés de gestion exclut les femmes

Le patriarcat imprègne aussi le marketing du secteur de la gestion d’actifs. Les trois quarts des sociétés de gestion dans le monde (73 %) affirment que leurs produits d’investissement ciblent principalement les hommes. De plus, près de neuf gestionnaires sur dix reconnaissent que leur client par défaut est un homme. C’est l’un des enseignements d’une étude commandée par BNY Mellon Investment Management et réalisée auprès de 8.000 personnes dans 16 pays et 100 sociétés de gestion représentant près de 60.000 milliards de dollars d’actifs*. Résultat, les femmes désireuses d’investir sont confrontées à un langage, une imagerie et des messages qui s’adressent principalement aux hommes. Cela se traduit par exemple par l’utilisation de métaphores axées sur le risque, comme celles employées dans les sports extrêmes, et de concepts de performances élevées et d’accomplissements pour résumer le succès en Bourse. Les sociétés de gestion ont tendance à utiliser un jargon financier et un langage d’investissement trop complexe afin de «donner l’impression au client qu’il fait partie d’un club exclusif», détaille l’étude. «Ce type de marketing exclut activement les femmes», déplorent les auteurs du rapport. Près d’un tiers des consommatrices jugent que ce langage trop compliqué - qui peut être obscur ou source de confusion - les dissuade d’investir ou d’investir davantage que ce qu’elles font actuellement. Un potentiel de 3.220 milliards de dollars Or, si les femmes investissaient autant que les hommes, cela pourrait apporter 3.220 milliards de dollars de plus au secteur de la gestion d’actifs dans le monde, selon leur évaluation. Sur ce total, 1.870 milliards de dollars se dirigeraient vers des placements responsables. L’étude relève trois obstacles clés à une plus forte participation des femmes aux investissements. Le premier est un manque de confiance en elles; le deuxième est un manque de moyens financiers ; et le troisième est la croyance que les investissements en Bourse sont trop risqués pour elles - rebouclant avec un marketing peu adapté. Dans ce contexte, comment encourager les femmes à investir davantage? Pas en coloriant les brochures commerciales en rose en tout cas. «La réponse à l’engagement des femmes dans l’investissement ne se trouve pas dans des gadgets démodés et ne nécessite pas, par exemple, l’utilisation accrue de la couleur rose. Il s’agit plutôt d'établir un lien en comprenant ce qui motive les femmes à investir et comment elles aiment qu’on communique avec elles», écrivent les auteurs du rapport. Les femmes attentives à l’impact de leurs investissements L’étude prône donc une simplification du langage, mais aussi et surtout un alignement plus clair avec les objectifs et valeurs des femmes. Avec une espérance de vie d’environ 100 ans, les femmes doivent nécessairement se projeter sur le long terme. Elles sont aussi motivées par l’indépendance financière. L’étude souligne également que les femmes s’intéressent à l’impact de leurs investissements. Plus de la moitié des femmes dans le monde, par exemple, investiraient (ou investiraient davantage) si l’impact de leurs investissements était aligné avec leurs valeurs personnelles, et 53 % le feraient si le fonds avait un objectif clair de« faire le bien ». Les deux tiers des femmes qui investissent aujourd’hui essaient de cibler des entreprises qu’elles aiment et qui sont en phase avec leurs valeurs personnelles. «Les produits conçus pour répondre à ces besoins et à ces intérêts, clairement communiqués dans un langage simple, devraient contribuer à accroître l’investissement des femmes», résume l’étude. Un secteur plus diversifié et inclusif Favoriser un secteur de la gestion d’actifs plus inclusif et diversifié pourrait aussi permettre de mieux identifier et répondre aux besoins des femmes. Si certains progrès ont été réalisés, la gestion d’actifs reste un secteur dominé par les hommes. La moitié des sociétés de gestion d’actifs participant à l’étude ont déclaré que seulement 10 % ou moins de leurs gérants et analystes dans leurs équipes sont des femmes. Cela peut clairement contribuer aux difficultés du secteur à comprendre et à fidéliser la clientèle féminine… * Le lien vers l'étude de BNY Mellon IM se trouve ici
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