
Les ambassadeurs de l’ESG

« D’ici à 2024, 100 % de nos fonds devront avoir intégré des critères ESG (environnement, social, gouvernance, NDLR). » Cette confidence de Jean-Philippe Desmartin, directeur de l’équipe investissement responsable chez Edmond de Rothschild AM, illustre la transformation en cours dans nombre de sociétés de gestion. Pour accélérer la conversion des équipes de gestion et de distribution, celles-ci s’appuient de plus en plus sur des réseaux d’ambassadeurs chargés de prêcher la bonne parole de l’ISR (investissement socialement responsable). Chez BlackRock, le département sustainable investing a ainsi désigné il y a trois ans 80 champions répartis dans chacune des équipes d’investissement. « Ce réseau est composé essentiellement de gérants, d’analystes et de managers positionnés à tous les niveaux hiérarchiques », précise Carole Crozat, responsable de la recherche thématique de BlackRock Sustainable Investing (BSI). De son côté, Schroders a commencé par mettre en place, il y a deux ans, une quinzaine de champions ESG au sein de sa distribution. « Devant le succès rencontré, nous avons dupliqué ce dispositif à nos équipes d’investissement qui en comptent désormais une trentaine », ajoute Karine Szenberg, responsable Europe de Schroders.
Pour désigner leurs ambassadeurs, les sociétés d’asset management misent sur le volontariat. « Et les candidats ne manquent pas car au sein de notre gestion, de plus en plus de gens s’intéressent à l’ISR, cette thématique étant en train de s’imposer comme un enjeu stratégique », note Jean-Philippe Desmartin.
Responsable de l’équipe de gestion indicielle de BNP Paribas AM, Marie-Sophie Pastant, 35 ans, n’a pas hésité lorsqu’elle a été informée qu’une liste de champions ESG était sur le point d’être constituée. « Je me suis naturellement portée candidate, d’abord par intérêt personnel, confie cette diplômée de Centrale Marseille et du Master 2 économie et statistiques de l’université Aix-Marseille. Le fait d’échanger au quotidien avec l’équipe du ‘sustainability centre’ a aussi pesé dans ma décision. Nous travaillons main dans la main pour construire de nouveaux fonds avec une approche ESG. » Au sein de son équipe, Marie-Sopie Pastant fait office de premier point de contact. « Mon rôle consiste à faire passer les messages du ‘sustainability centre’ aux dix gérants indiciels afin qu’ils soient informés sur la stratégie ESG de l’entreprise, l’évolution de la politique de droits de vote, ou les nouvelles méthodes de notation des entreprises, confie la manager. En parallèle, mon rôle est aussi de faire remonter les retours des gérants sur les propositions émises par les équipes ISR. »
Certification et objectifs
Pour aider ses champions à endosser ce nouveau costume, BNP Paribas AM a construit un programme de formation qui débute par un module de présentation des principes généraux de l’investissement durable. « Tous nos ambassadeurs doivent ensuite s’engager à passer une certification ESG. A ce jour, 27 l’ont déjà décrochée et 84 ont commencé le parcours », précise Jane Ambachtsheer, la responsable du sustainability centre qui pilote les 68 champions implantés dans les 40 centres d’investissement et les 63 répartis au sein des équipes de distribution du Global Client Group. Une fois par mois, les champions sont conviés à une réunion thématique. La première portait sur l’intégration ESG, la seconde sur l’engagement… « Nous organisons aussi pour eux des événements, ajoute Jane Ambachtsheer. Au lendemain de notre dernier forum annuel, ils ont pu assister à une conférence du professeur van Ypersele de Strihou, l’ancien vice-président du GIEC venu évoquer l’impact du changement climatique sur le monde et sur les futures stratégies d’investissement. » Chez Schroders, l’équipe sustainability organise tous les mois une conférence téléphonique avec ses deux communautés de champions ESG. « Ces temps d’échanges sont l’occasion de faire le point sur le déploiement de notre programme de formation interne pour les équipes commerciales et de gestion, de remonter les besoins exprimés ou les difficultés rencontrées par les gérants ou les commerciaux dans leurs échanges avec leurs clients… », précise Karine Szenberg.
Pour s’assurer de l’efficacité du dispositif, le département sustainable investing de BlackRock a fixé des objectifs à ses champions et à leurs équipes d’investissement. Celles-ci seront désormais évaluées à travers une grille qui distingue quatre niveaux d’intégration ESG : pre-aware, aware, aligned et advanced. « Les équipes ont jusqu’à fin 2020 pour atteindre les niveaux ‘aligned’ ou ‘advanced’ qui est, lui, réservé aux équipes qui auront mis en œuvre les meilleures pratiques et qui serviront de moteur à notre innovation dans ce domaine », confie Carole Crozat.
Cette stratégie de diffusion de la culture ESG semble en tout cas porter ses fruits. « Les retours de nos équipes de gestion montrent que l’intégration de l’ESG dans leurs classes d’actifs s’en trouve facilitée. Côté distribution, nos vendeurs se sentent mieux armés pour expliquer notre stratégie en matière d’investissement durable auprès des clients », assure Jane Ambachtsheer. Cette montée en gamme se traduit d’ailleurs dans les chiffres. Chez BNPP AM, les fonds intégrés ESG sont passés de 222 milliards d’euros en 2018 à 278 milliards, sur un total de 440 milliards d’euros d’actifs. De son côté, Edmond de Rothschild AM entend accélérer la cadence au sein de sa gamme labellisée ISR. « Aujourd’hui, 12 % de nos fonds affichent déjà ce label. La feuille de route 2021-2024 intégrera de nouveaux objectifs qui seront plus ambitieux », conclut Jean-Philippe Desmartin.
Plus d'articles du même thème
-
Le Fonds de réserve des retraites accueille sa responsable ISR
Sophie Haas va déployer la politique d'investissement responsable du FRR. Elle rejoint la direction financière. -
Schroders récupère un mandat de 3,9 milliards d'euros en actions ISR
Le fonds de pension PFZW en pleine réorganisation de son portefeuille a mis fin à ses mandats précédents avec BlackRock, LGIM et AQR. -
Après BlackRock, d’autres gérants ont perdu des mandats du néerlandais PFZW
Le fonds de pension passe en revue ses gestionnaires et opère un tri, notamment sur les critères de durabilité. -
L'investissement dans une réindustrialisation circulaire pourrait sécuriser les fonds propres des banques
Dans une tribune collective, des experts de tous horizons expliquent que l'économie de la fonctionnalité est l'une des solutions les plus efficaces pour adapter notre économie aux limites planétaires. Les banques auraient tout à gagner à la soutenir et à la financer. -
Des investisseurs demandent aux entreprises exposées à des conflits de montrer patte blanche
Trente deux investisseurs, dont le FIR, Sycomore et Ecofi, réclament des entreprises une surveillance renforcée des risques de violation des droits humains en zones de guerre. -
BlackRock perd un mandat de 14,3 milliards d’euros du néerlandais PFZW
Le fonds de pension doté de 250 milliards d’euros a choisi de confier la gestion de son portefeuille d’actions à un groupe d’autres gérants, dans un contexte de recul des questions d’investissement responsable et de traitement du risque climatique chez certains gérants américains.
Sujets d'actualité
ETF à la Une

BNP Paribas AM se dote d’une gamme complète d’ETF actifs
- Le rachat de Mediobanca menace la fusion des gestions de Generali et BPCE
- BNP Paribas AM se dote d’une gamme complète d’ETF actifs
- BlackRock perd un mandat de 14,3 milliards d’euros du néerlandais PFZW
- M&G renoue avec la collecte nette au premier semestre 2025
- Comgest renouvelle son équipe de gestion actions européennes
Contenu de nos partenaires
-
La Bourse de New York termine sans direction claire
Washington - La Bourse de New York a terminé sans direction claire mercredi, les investisseurs se montrant attentistes avant la publication jeudi d’un nouvel indicateur d’inflation côté consommateur aux Etats-Unis, susceptible de donner de nouveaux indices sur la trajectoire privilégiée par la banque centrale américaine (Fed). L’indice élargi S&P 500 (+0,30%) et l’indice Nasdaq (+0,03%) ont tous les deux grappillé de nouveaux records, respectivement à 6.532,04 points et 21.886,06 points. Le Dow Jones a, pour sa part, perdu 0,48%. Nasdaq © Agence France-Presse -
Yémen : 35 morts et 131 blessés dans des raids israéliens sur les Houthis
Sanaa - L’armée de l’air israélienne a bombardé mercredi des sites des Houthis au Yémen, faisant 35 morts et 131 blessés, ont indiqué ces rebelles, qui contrôlent de larges pans du pays y compris la capitale Sanaa. «Le nombre de martyrs et de blessés parmi les citoyens victimes du crime sioniste perfide est passé à 35 martyrs et 131 blessés», a déclaré le porte-parole du ministère de la Santé houthi, Anees Alasbahi, sur X, en précisant que ce décompte n'était pas définitif. Il avait dans un premier temps fait état de neuf morts et 118 blessés, et de recherches dans les décombres pour retrouver des disparus. Les raids ont ciblé la capitale Sanaa et la province de Jawf (nord), où Israël a indiqué avoir frappé des «cibles militaires» des Houthis. «Nous continuerons à frapper. Quiconque nous attaque, nous l’atteindrons», a déclaré après ces raids le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu. La télévision Al-Massirah, organe des Houthis, a fait état de «martyrs, blessés et plusieurs maisons endommagées dans l’attaque israélienne contre le quartier général de l’Orientation morale», du nom donné aux services de communication des forces rebelles dans la capitale. Un grand panache de fumée grise s’est élevé au-dessus de Sanaa après les frappes, dont le bruit a résonné dans toute la ville, régulièrement attaquée par Israël, ont constaté des journalistes de l’AFP. «Nos défenses aériennes affrontent actuellement des avions israéliens qui lancent une agression contre notre pays», a déclaré dans l’après-midi le porte-parole militaire houthi, Yahya Saree. Tirs vers Israël Selon deux journalistes de l’AFP à Sanaa, un bâtiment utilisé par les forces armées houthies a été touché. Al-Massirah a également fait état de frappes israéliennes contre des bâtiments gouvernementaux à Jawf. L’armée israélienne, qui avait annoncé la veille avoir intercepté un missile tiré du Yémen, a dit avoir frappé des «camps militaires où des membres du régime terroriste avaient été identifiés, le siège des relations publiques militaires des Houthis et un site de stockage de carburant». Sa nouvelle attaque survient trois jours après qu’un tir de drone, revendiqué par les Houthis depuis le Yémen, a blessé un homme en tombant sur l’aéroport de Ramon, dans le sud d’Israël. Le mois dernier, des bombardements israéliens ont tué le Premier ministre et 11 responsables houthis, dans la plus importante opération israélienne contre ces rebelles proches de l’Iran. Depuis le début de la guerre à Gaza, déclenchée par l’attaque du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël le 7 octobre 2023, les Houthis ont multiplié les tirs contre Israël et les attaques de navires marchands qui lui sont liés au large du Yémen, affirmant agir en solidarité avec les Palestiniens. En réponse, Israël a mené plusieurs séries de frappes meurtrières au Yémen, visant des ports, des centrales électriques et l’aéroport international de Sanaa. © Agence France-Presse -
Famille royale : le prince Harry et le roi Charles III se rencontrent, une première en plus d'un an et demi
Londres - L’heure de la réconciliation a-t-elle sonné ? Le prince Harry et son père le roi Charles III se sont vus mercredi à Londres pour une rencontre brève mais inédite depuis plus d’un an et demi. Le fils cadet du roi, qui a rompu avec sa famille depuis son départ pour les Etats-Unis en 2020 avec son épouse Meghan, a rejoint son père dans sa résidence londonienne de Clarence House en fin d’après-midi. Charles et le duc de Sussex ont partagé un thé en privé, selon l’entourage royal. Contacté par l’AFP, le palais n’a pas immédiatement confirmé. Le prince est arrivé dans une voiture noire vers 17H20 (16H20 GMT) puis est reparti un peu moins d’une heure plus tard, a constaté un journaliste de l’AFP. Charles III, qui séjournait en Ecosse, avait lui été aperçu par des médias britanniques quittant une base militaire près de Londres, où il avait atterri en début d’après-midi mercredi. Avant de s’entretenir avec son fils, il a présidé à Londres son conseil privé et rencontré un rescapé de l’Holocauste. Il doit repartir au château de Balmoral, sa résidence écossaise, dès jeudi. Les deux hommes ne se sont pas vus depuis février 2024, quand Harry avait fait un déplacement express au Royaume-Uni après avoir appris que son père, âgé de 76 ans, souffrait d’un cancer, pour lequel il est toujours soigné. A l'époque, leur rencontre, également à Clarence House, avait duré moins de trois quarts d’heure et Harry était reparti pour la Californie le lendemain. Il est depuis revenu trois fois à Londres, sans son épouse Meghan, très critiquée au Royaume-Uni, ni leurs enfants, Archie et Lilibet, et sans rencontrer la famille royale. Spéculations Harry est arrivé lundi au Royaume-Uni pour une série d’engagements auprès d’associations caritatives qu’il soutient. Il s'était aussi recueilli sur la tombe de sa grand-mère la reine Elizabeth II, trois ans jour pour jour après son décès, le 8 septembre 2022. Avant sa rencontre avec son père, il avait visité un centre de recherche dédié aux blessés dans des explosions, à l’Imperial College de Londres. Depuis plusieurs semaines, les spéculations allaient bon train sur une éventuelle rencontre avec le roi. Surtout depuis que le tabloïd Mail on Sunday avait révélé que le chargé de communication du roi, Tobyn Andreae, et la nouvelle responsable de la communication du prince, Meredith Maines, s'étaient rencontrés début juillet à Londres. Le prince, âgé de 40 ans, avait confié en mai à la BBC qu’il «aimerait beaucoup (se) réconcilier avec (sa) famille». «Je ne sais pas combien de temps il reste à mon père», avait ajouté le frère cadet de William, l’héritier de la couronne. Depuis qu’il a renoncé à ses obligations royales et déménagé en 2020 en Californie avec sa femme Meghan, Harry s’en est pris publiquement à plusieurs reprises à la famille royale. En mars 2021, il avait donné une interview explosive à la reine américaine du talk show Oprah Winfrey, insinuant que certains membres de la famille royale étaient racistes. Après une docu-série sur Netflix en décembre 2022, dans lequel il égratignait encore «la firme» - le surnom de la famille royale - il a publié ses mémoires, «Le Suppléant», début 2023, critiquant son frère William, sa belle-soeur Kate ou encore sa belle-mère Camilla. Malgré son départ, il n’a pas coupé les ponts avec le Royaume-Uni, où il mène notamment une croisade judiciaire, au succès jusqu’ici mitigé, contre les tabloïds britanniques. Il a aussi perdu un autre combat judiciaire pour obtenir une protection policière similaire à celle qu’il avait lorsqu’il était un membre actif de la famille royale. Marie HEUCLIN © Agence France-Presse