
La place de Paris ouvre la voie à un nouveau label climat

Pour couvrir tout le nuancier des actifs verts et bruns, Yves Perrier, président d’Amundi, propose dans le rapport remis mercredi 9 mars au ministre des Finances, de créer pour les fonds et produits d’épargne, un label climat centré sur la transition carbone. Entre le label ISR existant, « généraliste », couvrant les trois dimensions environnementale, sociale et de gouvernance (ESG), et le label Greenfin ou le futur écolabel européen centrés sur le vert, «il manque un label pour orienter l’épargne vers la transition énergétique», explique Isabelle Cabie, responsable de l’investissement durable chez Candriam. Un groupe de travail sur le label pourrait être constitué, composé des sociétés de gestion, de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et de la direction générale du Trésor, afin d’en définir les contours. Le sujet sera à l’ordre du jour cette semaine lors de la réunion du bureau de l’AFG, l’association française de la gestion financière.
Pour les gérants, le financement de la transition énergétique mérite son propre label pour être au rendez-vous des engagements Net Zero. «L’urgence climatique impose de créer un label de transition basé sur des indicateurs de mesure plus fiables d’émissions carbones de scope 3 et l’analyse des transformations des business model par exemple», estime Isabelle Cabie. L’idée de cibler les entreprises qui présentent des plans sérieux de décarbonation de leurs activités fait son chemin également à la Commission européenne qui vient d’adopter la première taxonomie verte. «Le rapport Perrier invite à interpréter la taxonomie européenne de manière dynamique pour orienter les capitaux vers les activités en transition et pas seulement de manière passive en ciblant les activités déjà vertes. C’est la condition d’un résultat effectif. Les institutions européennes semblent partager cette position», avance Arnaud de Bresson, délégué général de Paris Europlace.
Multiplication des labels ?
La taxonomie verte ou le label français Greenfin (qui cible les solutions vertes et exclut les énergies fossiles) ont toutefois le mérite de la simplicité. Quant au label ISR, il doit connaître une nouvelle version améliorée. «Il n’est pas forcément bon de démultiplier les initiatives. La certification est un processus long, complexe. On ne peut pas demander aux sociétés de gestion d’être sur tous les labels à la fois», prévient Sylvie Malécot, membre du comité du label ISR. «Je crois à l’élargissement du périmètre du label ISR, restant un label généraliste, et en étoile, des branches avec des labels spécialisés, comme ISR Biodiversité, ISR Santé, ISR Emploi, et ISR Transition», ajoute-t-elle.
Un nouveau label risque-t-il d’ajouter de la confusion pour des épargnants déjà perdus dans l’univers ESG ? «On doit s’interroger sur les flux d’épargne qui peuvent être orientés sur un nouveau label», soulève Guillaume Lasserre, directeur adjoint de la gestion chez La Banque Postale AM qui croit néanmoins à l’idée d’un label avec un tiers de confiance et une traçabilité des placements.
Vers une convergence des analyses
Reste à construire ce nouveau cadre, en tenant compte des limites techniques actuelles. «Les investisseurs ne disposent pas encore des données suffisantes sur les émissions carbone des entreprises, il faudra attendre jusqu’en 2023 avant de pouvoir s’appuyer sur des données robustes », rappelle Laurent Jacquier-Laforge, responsable en chef de l’investissement durable de La Française. La directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) pour les entreprises en 2023 et la directive «Disclosure (SFDR)» déjà en vigueur pour les financiers, apportent les premières briques de cet édifice, devant permettre d’intégrer le climat dans les décisions d’investissement.
«Les analystes seront amenés à réaliser des actualisations d’anticipation des émissions carbone et pourront aboutir à un niveau d’exigence et de maturité comparable à celui des normes financières actuelles», pense Laurent Jacquier-Laforge. Toutes les initiatives sont bien accueillies. «Chacun développe en interne son approche ESG ou a recours aux analyses d’agences extra-financières, avec des résultats parfois contradictoires, les labels ESG ont vocation à favoriser le fléchage vers des produits partageant des critères communs», croit Isabelle Cabie chez Candriam. La méthodologie des Science-based Targets Initiative (SBTi) ou les travaux au sein des coalitions Net Zero font progresser la réflexion. Des exclusions concernant le charbon et les énergies fossiles non conventionnels ainsi qu’une sortie progressive des fossiles pourraient s’y intégrer.
Vu la complexité du sujet, un label climat ne pourra pas fournir une vérité absolue sur une trajectoire de neutralité carbone d’une entreprise et d’un fonds. La question sociale va aussi s’inviter à travers la «transition juste», accroissant le niveau de difficulté. Ces questions autour d’un label se résoudront peut-être d’elles-mêmes. «L’alignement en cours des gestionnaires d’actifs sur la neutralité carbone peut suffire à orienter les flux d’investissement vers la transition, rendant le label climat redondant à moyen terme», espère Guillaume Lasserre chez La Banque Postale AM.
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Immigration clandestine : raid policier dans une usine Hyundai-LG aux Etats-Unis, près de 500 arrestations
Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse