Des ETF exclusivement pilotés par l’intelligence artificielle

BlackRock mise sur la création de secteurs propriétaires redimensionnés. D’autres sociétés de gestion parient sur « le tout IA ».
Valérie Riochet

L’intelligence artificielle (IA) est-elle l’avenir de la gestion quantitative et, par ricochet, celui des ETF (exchange-traded funds) ? Certains y croient. Le gestionnaire américain, BlackRock, s’est ainsi emparé de nouvelles technologies pour lancer prochainement une gamme de tra-ckers d’un genre inédit via sept fonds destinés au marché américain, baptisés iShares Evolved. Habituellement, les fonds cotés répliquent un indice créé par des fournisseurs comme S&P Dow Jones, MSCI… Or, selon le gestionnaire d’actifs, les entreprises ne seraient tout simplement pas « classées » dans le bon secteur. Ainsi, Amazon, qui figure notamment dans l’indice MSCI World Consumer Discretionary (consommation discrétionnaire), devrait être retenu, d’après iShares, dans celui dédié aux technologies. Pour y mettre bon ordre, la filiale de BlackRock, poursuit ce qu’elle avait entamé en juillet 2017 lors du lancement d’ETF obligataires : créer des benchmarks à partir des technologies de l’IA.

La documentation remise à la SEC (Securities and Exchange Commission) indique que « le processus de classification utilise des capacités d’analyse de données composées en partie d’apprentissage automatique, de traitement automatique du langage et d’algorithmes de classification pour créer un nouveau système de classification basé sur les données connexes d’une entreprise ». Retenant des petites, moyennes et grandes capitalisations américaines, « le système (...) permet à une entreprise d’être classée dans plusieurs secteurs, ce qui reflète sa nature multidimensionnelle. (…) Il faut s’attendre à ce que les éléments composant un secteur évoluent de manière dynamique (…) pour refléter des changements de modèles d’entreprise ». Ces ETF ciblent de grands ensembles sectoriels : la finance, la santé... sur un ensemble de 12 secteurs repérés par le gestionnaire. Du coup, « le fonds pourrait avoir un taux de rotation plus élevé que celui de fonds indiciels », révèle le prospectus. Sortie prévue ce premier trimestre.

Inefficiences de marché

Autre initiative menée outre-Atlantique, celle d’EquBot, une société d’IBM Global Entrepreneur qui lançait en octobre, sur le Nasdaq, AI Powered Equity ETF (AIEQ), le premier ETF géré par IA. Equbot qui s’appuie sur Watson, le programme d’intelligence artificielle d’IBM, passe au crible 6.000 entreprises américaines en traitant chaque jour plus d’un million de dépôts réglementaires, de résultats trimestriels, d’articles de presse, de données circulant sur les réseaux sociaux… Au bout du compte, 30 à 70 actions ayant le plus grand potentiel d’appréciation sont retenues. Enfin, Kairos est un tracker créé en 2017 par Ocubicle et Rocky Mountain Ayre, là aussi pour des clients américains. Investi dans un pool diversifié de cybermonnaies, ce tracker « est géré de bout en bout par intelligence artificielle », indique le site.

La diffusion de l’IA et du machine learning à une gestion déjà quantitative s’inscrit-elle dans le sens de l’histoire ? Elle permet aux gestionnaires de s’affranchir de la posture oligopolistique des promoteurs d’indices, accusés de faire monter le prix des licences d’exploitation. Autre élément : elle offre de faire face à la profusion d’informations qui « a rendu le travail des gérants, des analystes et même des promoteurs d’indices plus difficile », constate Art Amador, cofondateur d’EquBo. L’argument ne séduit pas tout le monde. « La gestion quantitative n’utilise que les données financières totalement vérifiables. Ce qui n’est pas le cas avec l’IA », met en garde un promoteur français d’ETF.

Dernière idée qui penche pour la montée en puissance du recours à l’IA, la recherche de nouvelles inefficiences de marché. Les primes de risque aujourd’hui répliquées par les ETF smart beta (momentum, minimum variance…) ont pour limite leur propre succès : lorsque de nombreux investisseurs s’y positionnent, elles disparaissent. Un processus de gestion propriétaire apporterait une réponse. BNPP AM s’est d’ailleurs récemment doté d’un laboratoire de recherche. « Une de nos ambitions est de trouver de nouvelles sources de données et de nouveaux facteurs de performance dans le domaine particulier de l’investissement quantitatif », explique-t-on en interne. La robotisation de la finance est en marche.

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