
Grand Frais prépare l’un des plus gros LBO de France

Quasi-inconnue du grand public il y a encore quinze ans, Grand Frais a été intronisée enseigne préférée des français en 2018, devant Decathlon, Cultura et Picard. Un engouement à la hauteur de la trajectoire exponentielle suivie par la chaîne de magasins alimentaires, dont le pôle fruits et légumes, poissonnerie et crèmerie a été racheté par Ardian pour près de 1,4 milliard d’euros, il y a trois ans. Cette activité, réunie au sein de Prosol, la structure fondée par Denis Dumont (installé en Suisse) et dirigée par Hervé Vallat, est aujourd’hui au cœur de toutes les convoitises. Selon nos informations, Ardian et la direction de l’entité cherchent en effet à mandater une banque d’affaires en vue d’une cession. Un choix qui pourrait porter sur JPMorgan, croit savoir une source proche du dossier. Contactés, Ardian et Hervé Vallat n’ont souhaité apporter aucun commentaire.
Si une telle vente venait à se concrétiser, elle donnerait naissance à l’une des plus grosses opérations de LBO de France. La valorisation de Prosol pourrait être comprise entre 2,5 et 3 milliards d’euros, grâce à un Ebitda en croissance continue qui côtoierait actuellement 160 millions d’euros. Mais une cession ne devrait pas intervenir avant 2021. En cause ? La vente d’un autre actif de poids dans la galaxie Grand Frais.
Euro Ethnic Foods
Selon les informations récoltées par L’Agefi, l’activité épicerie des enseignes Grand Frais a été mise en vente en début d’année. Ce pôle représentant plus de 80 millions d’euros d’Ebitda, regroupé au sein de la structure Euro Ethnic Foods, n’est pas détenue par Ardian et ses co-investisseurs mais par les frères Bahadourian. Ces derniers sont notamment connus pour avoir racheté à la barre du tribunal de Commerce de Lyon le spécialiste de la livraison à domicile de produits surgelés Toupargel, en décembre 2019. En cédant Euro Ethnic Foods, ils pourraient espérer voir les enchères s’envoler à plus d’un milliard d’euros. «Goldman Sachs, qui a été mandaté en début d’année, a passé un certain temps à rassurer les candidats au rachat d’Euro Ethnic Foods. Leur crainte était de voir Ardian se positionner sur l’actif pour former un ensemble avec Prosol, mais elle n’est plus d’actualité», estime une source.
L’enchère portant sur la pépite des frères Bahadourian a donc pu formellement démarrer, avec la remise des offres de premier tour la semaine dernière. Advent International, CVC, Cinven et PAI Partners auraient témoigné un intérêt. Mais à ce jour, seul ce dernier aurait formellement candidaté. «Advent International, tout comme BC Partners il y a quelques semaines, cherchait à mettre un pied dans la porte en rachetant Euro Ethnic Foods, pour ensuite se présenter comme l’acquéreur naturel de Prosol», estime un banquier. L’idée étant de regrouper à terme les quatre entités juridiques de la galaxie Grand Frais pour envisager un adossement futur à un géant de la grande distribution.
Des pôles d’activités tous indépendants
Performant d’un point de vue opérationnel, l’organigramme de Grand Frais n’a rien d’une sinécure. Chaque pôle d’activités s’avère indépendant et est donc détenu par des actionnaires différents. Aux côtés de Prosol et d’EEF, les rayons boucheries de Grand Frais sont par exemple exploités par une entité contrôlée par la famille Despi (qui n’aurait pour l’heure pas engagé de processus de cession). Un groupement d’intérêt économique les relie toutefois pour mutualiser les moyens et décider des développements futurs. Une recette qui a permis au groupe de doubler de chiffre d’affaires en l’espace de cinq ans.
La locomotive du groupe, Prosol, a aussi mis sur les rails plusieurs projets, comme le redéploiement de Mon-marché.fr. Ce pionnier des courses de produits frais en ligne, absorbé par l’entité fondée par Denis Dumont il y a deux ans, entend se lancer à l’assaut de Paris et des grandes agglomérations tricolores. Une ambition qui va donc l’amener à croiser le fer avec des concurrents de la trempe de Carrefour, d’Amazon et de Groupe Louis Delhaize (présent sur ce marché avec Houra.fr). «Nous arrivons à un moment important dans la vie de Prosol. Nous voulons exprimer notre projet d’entreprise, qui doit nous permettre de doubler encore de taille dans les cinq ans», avait expliqué le discret dirigeant, Hervé Vallat, lors d’une interview accordée à LSA en début d’année. L’an dernier, l’enseigne comptait 227 magasins dans l’Hexagone pour un volume d’affaires de près de 2,4 milliards d’euros.
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