For Talents mise sur la famille pour transmettre les entreprises

La société d’investissement fondée par l’ex-président de Decathlon développe un modèle original pour gérer les successions entre générations.
Virginie Deneuville
L’équipe de  la société d’investissement For Talents.
L’équipe de la société d’investissement For Talents.  - 

A l’heure où les logiques de plateformisation se déploient dans le private equity, certains acteurs, à l’image de For Talents, se démarquent en développant une expertise ciblée. Créée en 2021 par Matthieu Leclercq, ex-président de Decathlon, For Talents est une histoire de familles. « Nous prenons des participations minoritaires au capital de sociétés familiales, avec pour objectif de les aider à réaliser les transitions générationnelles », explique Blandine Pessin-Bazil, partner chez For Talents et responsable du pôle Transmission.

La société, qui investit les capitaux familiaux de Matthieu Leclercq, a d’ores et déjà déployé plus de 360 millions d’euros, dont 80 % dans cette stratégie de transmission (Petit Forestier, Paprec et Riou Glass) et 20 % dans une stratégie plus « classique » visant à accompagner les entrepreneurs dans leurs projets de développement (Petit Bambou et O’Tera).

Légitimité

Le positionnement de For Talents se révèle atypique. « Certains fonds ont pu au cas par cas réaliser des opérations de transition générationnelle, mais en faire sa stratégie principale, comme For Talents, est unique », observe Jean-Christel Trabarel, fondateur de Jasmin Capital. « La société, basée sur des capitaux familiaux et composée d’anciens chefs d’entreprise, a une vraie légitimité sur ce segment de niche », constate-t-il, ajoutant que For Talents peut ainsi avoir accès à des opérations primaires, peu intermédiées et donc moins concurrentielles. L’équipe, dirigée par Nicolas Boyer, ex-directeur financier du groupe OVH, compte actuellement sept collaborateurs, dont trois associés. « For Talents a fait la différence en maîtrisant parfaitement, au-delà du pur financier, les enjeux de transmission et leurs fortes implications sur les plans émotionnel et humain », atteste Christine Riou Feron, présidente du verrier Riou Glass, expliquant avoir rencontré initialement une dizaine de fonds afin de pouvoir réaliser, début mai, le passage de flambeau de ses parents aux enfants.

Dans sa stratégie de transmission, où For Talents investit des tickets compris entre 30 et 100 millions d’euros (contre 10 à 30 millions dans le pôle Croissance), l’approche est également originale. Les deux parties signent un protocole d’accompagnement, couvrant des sujets comme la gouvernance d’entreprise, ainsi qu’un protocole d’investissement. Celui-ci inclut des clauses incitatives pour que la famille revienne intégralement au capital au bout d’un certain temps, généralement entre cinq et sept ans. Pour ce faire, « nous fixons un taux de rendement interne (TRI) à atteindre et redistribuons la performance additionnelle à la famille, afin qu’elle puisse racheter in fine la part minoritaire que nous détenons », détaille Blandine Pessin-Bazil, qui a par le passé conduit des opérations de transformation au sein de sociétés comme United Biscuits, Guerlain ou Lutti. « La thèse de For Talents permet à ma génération de retrouver son autonomie dès la troisième année si nous le souhaitons, la durée d’investissement peut toutefois aller jusqu’à sept ans », illustre Christine Riou Feron.

La stratégie s’annonce gagnante. « Plafonner la rémunération des gérants et redistribuer la surperformance constitue une proposition de valeur énorme pour pouvoir rentrer au capital des sociétés », réagit Jean-Christel Trabarel. « C’est un processus vertueux, qui pousse le management à se surpasser et offre un parfait alignement d’intérêt », poursuit-il, ajoutant que cela est facilité par le fait que For Talents n’a pas de compte à rendre à des investisseurs tiers (LP). « Un plafonnement autour de 15 %, qui correspond au TRI net moyen des opérations de LBO (leveraged buy-out), serait logique », relève Jean-Christel Trabarel, alors que For Talents ne communique pas ce chiffre.

La société d’investissement travaille par ailleurs avec un écosystème de partenaires – experts en prise de parole, en gouvernance familiale, psychologues, avocats, coachs… – pouvant à tout moment accompagner les familles et leurs dirigeants. « Gérer les successions générationnelles peut se révéler très compliqué. Cela ne s’improvise pas », conclut Jean-Christel Trabarel.

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