L’open banking aborde les offres aux entreprises

Trésorerie
Frédérique Garrouste

Après les particuliers, voilà que les entreprises commencent à bénéficier des nouveaux usages apportés par l’open banking. Prévue par la directive sur les Services de paiement DSP2 en vigueur depuis 2018, l’obligation pour les banques d’ouvrir l’accès à d’autres acteurs des données des comptes courants – quand leurs clients y consentent – aura mis du temps à dessiner de nouvelles perspectives pour les entreprises. La question est liée à l’utilisation des API (interfaces de programmation applicative) où les banques exposent leurs données. « Les solutions de connexion via les API ouvrent des possibilités d’échanges intéressantes et en temps réel pour les PME ou ETI. L’open banking offre aux entreprises une solution d’accès aux services financiers pour leur trésorerie beaucoup plus facile et tout le monde finira par l’utiliser, assure Pierre-Antoine Dusoulier, directeur général d’IbanFirst. Dans l’immédiat, les banques mettent encore en avant les services de connexion tels Ebics et SwiftNet sur lesquels elles ont beaucoup investi. »

Relativement lourdes à mettre en place, ces solutions restent hégémoniques pour les entreprises d’une certaine taille. « Les systèmes de messagerie entre les banques et les entreprises comme Swift et Ebics fonctionnent bien et apportent déjà depuis longtemps interbancarité et automatisation, explique Hervé Postic, directeur général d’Utsit. Mais l’open banking européen – les activités régulées par la DSP2 – apporte aux PME tout un éventail de solutions qui leur permettent de mieux travailler sur les sujets de trésorerie et plus largement financiers. »

Difficultés

Certes, les API bancaires suscitent encore des insatisfactions. « Pour les entreprises, les bénéfices de l’open banking sont conditionnés par la volonté des banques d’uniformiser leurs procédures, formats d’échange… Or les banques traînent les pieds sans le dire, leurs programmes changent et perturbent les accès », rapporte Stéphane Olmi, gérant de Gimar & Co. Les API des banques n’étant pas stables, leur utilisation reste complexe. « Les API d’open banking des banques créent souvent des difficultés de même nature que dans l’authentification forte dans les cas de montants de transactions importants, nécessitant une nouvelle identification du client, ce qui interrompt l’automatisation des transactions », déplore Pierre-Antoine Dusoulier.

La question de l’authentification forte des titulaires des comptes se pose dès que l’entreprise a plusieurs responsables utilisant les comptes. « Les API DSP2 impliquent une identification via un smartphone pour chaque paiement, ce qui n’est praticable que si seulement une ou deux personnes sont responsables de la trésorerie de l’entreprise, expose Hervé Postic. Les API des banques pour les entreprises, qui sont bien de l’open banking, sont pour l’instant propriétaires, ce qui en complexifie l’utilisation à grande échelle. Mais cela va probablement vite changer, Swift, entre autres, s’étant saisi de ce sujet. »

En attendant, on assiste d’ores et déjà au développement de solutions pour s’affranchir de cette difficulté. « IbanFirst commence à proposer des produits aux entreprises en utilisant les API des banques, annonce Pierre-Antoine Dusoulier. Nous prenons soin toutefois de travailler les API ou d’opter pour une architecture à plusieurs partenaires, comme nous l’avons fait avec Klarna Open Banking pour l’agrégation de comptes et l’initiation de paiement. » La fintech voit se multiplier les entreprises clientes de sa solution qui leur offre les mêmes services de paiement à l’international et de change qu’une banque, tout en leur faisant gagner un à deux jours de date de valeur.

Mais le plus souvent, les entreprises ne sont pas souvent en mesure de tirer profit du temps réel qu’apporte l’open banking. Ses principales utilisations se concentrent chez les entreprises du BtoC (business to consumer) qui y trouvent une meilleure connaissance clients et des actions pour les fidéliser. En outre, « les services d’open banking pour les entreprises consistent aujourd’hui surtout à faciliter leur comptabilité, leur facturation, la réconciliation de comptes », constate Christian Heinis, associé, banques et fintechs chez Roland Berger. La fintech Qonto permet même d’associer une transaction par carte aux factures correspondantes, sur la base d’une photo du ticket de paiement. « Les principales avancées de l’open banking pour les entreprises concernent les catégories des professionnels, auto-entrepreneurs et PME », confirme ainsi Ilhan Gendron, associé de TNP Consulting.

L’utilisation des informations des banques ouvre aussi de nouvelles voies dans l’initiation de paiement. Payfit, par exemple, propose au trésorier d’approuver en un clic un virement initié sur un mode automatique une fois l’échéance arrivée. « Aujourd’hui, tout le monde lorgne des usages sur la partie initiation de paiements, notamment dans les secteurs où le ticket d’achat moyen est élevé, précise Christian Heinis. Cette catégorie de services intéresserait probablement plus les entreprises mais les cas d’usage restent à développer. Tous les acteurs de l’open banking travaillent à développer des cas d’usage à plus forte valeur ajoutée. »

Et, bientôt, la question de l’accès au crédit devrait susciter aussi de nouvelles initiatives, utiles notamment quand l’entreprise n’a pas encore trois bilans à présenter. Les innovations pour les entreprises ont encore de vastes sujets à exploiter…

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