
L’avenir incertain des néobanques thématiques

Elles sont plus d’une trentaine en France. Les néobanques thématiques remportent un succès remarquable, au moins du côté des créateurs d’entreprise. Elles se fondent sur des sujets censés fédérer des communautés suffisamment importantes pour les conduire à la pérennité. C’est ainsi que plusieurs vagues de création se sont succédé. La France a vu arriver les néobanques pour les professionnels et indépendants comme Shine, Qonto, Memo Bank, Anytime, Prismea, pour les jeunes ou pour les enfants avec Xaalys, Vybe, Vaultia, Pixpay, Money Talk, pour l’inclusion bancaire, concept mis en pratique par Nickel et par Handsome pour les personnes handicapées, pour une finance verte ou responsable à l’instar de Helios, OnlyOne, GreenGot, CanB et dernièrement pour les amis des animaux avec Pennypet… Sans oublier Lydia qui s’est lancée sur une offre de paiement entre particuliers avant d’enrichir sa gamme de services allant jusqu’au prêt instantané et à l’achat-vente de cryptoactifs. Voulant devenir une «super app», elle construit une autre sorte de néobanque.
Certaines d’entre elles ont été rachetées, on aurait pu les croire sauvées, mais c’est plus compliqué. Shine rachetée par la Société Générale, Nickel par BNP continuent leur parcours, mais Fidor reprise par BPCE, Anytime par Orange Bank ont disparu. Pixpay, pour les 12-17 ans, est passé sous le contrôle de son homologue britannique GoHenry avant que ce dernier ne soit absorbé par l’Américain Acorns.
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Fusion-acquisition et valorisation
Parmi celles restées indépendantes, on compte quelques belles réussites dont Qonto, solidement financée, qui s’étend en Europe et a même racheté un concurrent en Allemagne. Sa valorisation avait d’ailleurs atteint une somme considérable : 4 milliards d’euros pour un établissement ayant seulement 350.000 clients… qui prévoit tout de même d’atteindre la rentabilité en France dès 2023.
Mais les néobanques ont aussi déjà connu plusieurs échecs. L’Observatoire de la Fintech a recensé sept cessations d’activité : Ditto Bank, Morning, Vybe, Vaultia, Xaalys, Au max pour moi ou encore Prismea, lancée par le Crédit du Nord. Pumpkin, application de paiement pour les jeunes rachetée par le Crédit Mutuel Arkea, a également dû s’arrêter. « L’accélération des cessations d’activités connue en 2022 est à surveiller à 2023 compte tenu du contexte économique actuel, et des difficultés croissantes rencontrées par les acteurs à lever des fonds », écrit l’Observatoire de la Fintech.
Mais certains thèmes sont porteurs, en particulier la transition écologique choisie par plusieurs néobanques. Elles font appel aux convictions profondes d’une génération beaucoup plus sensibilisée aux enjeux climatiques que les précédentes. Est-ce suffisant pour tenir ? «Il leur est difficile de jouer seulement sur les investissements verts, estime Angelo Caci, directeur général de Syrtals Card et auteur d’une étude récurrente sur les néobanques (saison 6). Leurs initiatives louables leur permettront-elles d’atteindre une masse de clients suffisante, qui acceptent de payer plus cher pour défendre une cause ? Et les banques traditionnelles qui prennent des trajectoires zéro carbone, certes plus lentement que les challengers, pourraient aussi les épuiser avant de les racheter au moment opportun, comme ce fut le cas jadis des sites de trading en ligne et plus récemment de quelques fintechs, comme Nickel ou Shine...»
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Maîtriser les coûts
Par ailleurs, ces nouveaux acteurs s’appuient souvent sur des fournisseurs de technologie de type banking as a service, comme Treezor, Swan, Solaris ou Bankable. Un bon calcul pour lancer une activité en quelques mois, mais une charge qui pèse lourd dans le budget à la longue et réduit les capacités de développement. A moins de prendre son envol en développant son propre core banking system et en obtenant son propre agrément d’établissement de paiement, a minima. C’est ce qu’a fait Qonto.
«Les configurations sont différentes d’un continent à l’autre, rappelle Angelo Caci, ce qui explique de belles réussites, mais ce sont rarement des start-up et plutôt des émanations de géants du e-commerce ou de banques classiques. En Europe, les acteurs traditionnels sont en bonne santé, ils peuvent racheter, investir et contrer les néobanques. Seules, quelques-unes sont bien installées à l’instar de Monzo, Starling ou Revolut.» Et les autres ? Tout dépendra de leur capacité à dégager du chiffre d’affaires et mener une trajectoire vers la rentabilité. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) avait analysé en profondeur leurs modèles économiques dans une analyse publiée en juillet 2022, mais elle était restée prudente en titrant de façon interrogative : «Les Acteurs numériques de la finance : un pas vers la rentabilité ?»
Dépasser ce point mort nécessite d’avoir convaincu plusieurs millions de clients. Une taille critique que peu de néobanques ont déjà atteinte, même parmi celles soutenues par les acteurs traditionnels.
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