
Le nouveau Veolia est prometteur, mais l’intégration de Suez intimide le marché

Plus grand et davantage porté sur l’international, Veolia a radicalement changé de dimension. Un an et demi après s'être lancé à l’assaut de Suez, son PDG, Antoine Frérot, a réussi son pari visant à créer un « champion mondial de la transformation écologique ».
Le groupe de services aux collectivités a bouclé la semaine dernière la cession du « nouveau Suez » à un consortium d’investisseurs, ce qui marque l’aboutissement du rapprochement entre les deux sociétés.
Le chemin menant à cet épilogue a été semé d’embûches mais le résultat « en valait l’effort », juge le bureau d'études indépendant AlphaValue. Grâce au rachat de la grande majorité des actifs de Suez hors de France, le nouveau Veolia se retrouve idéalement armé pour accélérer son développement.
Veolia a grandi d’un coup et à moindre coût
La société « s’est fortement renforcée à l’international en une seule opération et à un prix raisonnable, avec un multiple d’environ 8 fois l’Ebitda [excédent brut d’exploitation, NDLR] pré-Covid », souligne Tancrède Fulop, analyste chez Morningstar. Sans ce rachat, « le groupe aurait dû mener plusieurs acquisitions pour arriver au même résultat, et aurait certainement payé des multiples d’Ebitda supérieurs à 10 », poursuit-il.
Le nouveau Veolia a ainsi augmenté de près de 40% ses revenus annuels pour les faire passer à 37 milliards d’euros. « Veolia renforce nettement sa taille critique, ce qui constitue un avantage dans un marché extrêmement fragmenté », estime Jan Patteyn, analyste chez Octo Finances.
Son exposition à la France, un pays mature, se réduit à environ 16% contre 21% en 2019. Le nouveau groupe bénéficie de « positions de marché plus fortes et d’une diversification accrue », apprécie S&P Global Ratings. De plus, « en acquérant de nombreux actifs de Suez à l’international, Veolia a éliminé un important concurrent sur plusieurs marchés, ce qui pourrait lui permettre de gagner plus aisément des contrats », remarque Tancrède Fulop.
Les synergies pourraient réserver de bonnes surprises. Veolia a évalué à 500 millions d’euros les gains attendus sur les achats et sur l’optimisation opérationnelle, comme l’amélioration du rendement des usines ou la rationalisation de la collecte des déchets. Grâce à ces synergies, l’opération aura un impact positif à deux chiffres sur le résultat net par action dès 2022, qui s'élèvera ensuite à plus de 40% en 2024.
Berenberg qualifie néanmoins de « prudent » le chiffrage de Veolia et s’attend à ce que la société extraie 300 millions d’euros d'économies supplémentaires grâce à l’intégration de Suez sur la période 2022-2028.
L’efficacité énergétique, un enjeu majeur
Surtout, le groupe n’a pas encore détaillé les synergies de revenus alors que les actifs hérités de Suez lui procurent d’importantes complémentarités commerciales et technologiques. « La présence de Veolia sur les segments de l’efficacité énergétique, des boucles locales d'énergie ou encore de l'énergie industrielle pourra bénéficier aux clients actuels de Suez cherchant à réduire leur empreinte carbone », explique Oddo BHF. « Suez apporte à Veolia des technologies complémentaires, comme dans le recyclage de certains types de plastiques ou dans l’assainissement et la réutilisation des eaux usées », note Tancrède Fulop.
Veolia s’est également renforcé dans les déchets dangereux, « une activité porteuse avec de fortes barrières à l’entrée », remarque Jan Patteyn d’Octo Finances. Ce métier présente « une croissance structurelle importante, portée par le durcissement des réglementations environnementales », ajoute Tancrède Fulop.
Des analystes optimistes ou absents
Les qualités de ce nouveau Veolia ne sont pas suffisamment appréciées par le marché. L’absence de suivi l’explique au moins en partie: plusieurs intermédiaires financiers ont dû suspendre leur couverture car leur employeur était impliqué dans le rapprochement avec Suez. FactSet recense ainsi huit analystes suivant le titre contre 15 en juillet 2020, juste avant le début de ce long feuilleton.
Berenberg et Barclays ont pour leur part relevé leur objectif de cours, à respectivement 38 euros et 40 euros, soit un potentiel d’appréciation de 17% et 23%. « Le titre n’intègre pas encore tous les bénéfices de l’opération, les investisseurs attendent peut-être de voir si l’intégration se passe bien », estime un analyste parisien alors que selon FactSet, l’objectif de cours moyen des intermédiaires se situe 36,6 euros, ce qui confère au titre un potentiel de hausse de 13%. « Les vertus du rapprochement sont prometteuses mais l’intégration requiert désormais un important travail de la part de Veolia », abonde Jan Patteyn.
Le groupe aura l’occasion de communiquer sur ce point lors de la publication de ses comptes annuels, le 17 mars. Barclays indique que des résultats supérieurs aux attentes couplés à l’annonce de perspectives 2022 pour le nouvel ensemble constitueraient un catalyseur.
« Communiquer des objectifs 2022 qui tiennent compte du changement de périmètre permettra au marché de mieux appréhender le nouveau profil du groupe ainsi que la contribution aux bénéfices des actifs de Suez », considère de son côté Tancrède Fulop. Le nouveau Veolia a les moyens de mettre l’eau à la bouche du marché.
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