
La transformation d’Engie commence à prendre forme

Isabelle Kocher marque son territoire. Pour sa première présentation de résultats annuels sans la présence à ses côtés de Gérard Mestrallet, le président d’Engie, la directrice générale du groupe d’énergie a longuement réaffirmé, chiffres à l’appui, le plan de transformation à 3 ans qu’elle a commencé à mettre en œuvre l’an dernier.
«Nous sommes là où nous avions dit que nous serions» et surtout Engie est revenu «dans une dynamique de croissance», a insisté Isabelle Kocher, fragilisée depuis plusieurs semaines par des rumeurs de dissensions avec Gérard Mestrallet. Les actionnaires du groupe lui ont apporté leur soutien hier : le cours de l’action Engie a rebondi de 8,24% pour finir à 12,6 euros.
En 5 ans, plus de 30 milliards d’euros de dépréciations d’actifs et de survaleurs
La mutation, qui vise à immuniser Engie de la volatilité des prix de l’énergie en cédant les actifs non régulés pour réinvestir dans le renouvelable, le gaz et les services, commence à se matérialiser dans les comptes. En 2016, 25% de l’Ebitda d’Engie provenait encore d’activités de marché. L’objectif est d’arriver à environ 15% à l’horizon 2018. Les cessions d’actifs avancent relativement vite : sur les 15 milliards d’euros du plan, 7,2 milliards étaient finalisés fin 2016 et 800 millions annoncés. Ces ventes ont généré 600 millions d’euros de plus-values. L’objectif est de «vendre rapidement pour réinvestir de manière organique, c’est comme cela que nous créerons de la valeur», a appuyé Isabelle Kocher.
En parallèle, 3,6 milliards d’euros ont ainsi été investis dans de nouveaux projets industriels, dont 430 millions dans le solaire via SolaireDirect acquis mi-2015. Selon Judith Hartmann, la directrice financière d’Engie, ces investissements doivent générer au terme du plan 1 milliard d’euros d’Ebitda supplémentaire annuel. «C’est un plan d’investissement industriel plus qu’un plan de croissance externe», a soutenu Isabelle Kocher. Une façon indirecte de rappeler que jusqu’ici Engie s’était construit, sous la direction de Gérard Mestrallet, à coup d’acquisitions (GDF, International Power..). Au total, en cinq ans, Engie a passé plus de 30 milliards d’euros de dépréciations d’actifs et de survaleurs, dont encore 3,8 milliards en 2016.
Ce travail de nettoyage approche de sa fin. En 2017, Engie compte renouer avec la croissance organique du chiffre d’affaires, alors qu’il n’a fait que baisser depuis 2012. Le résultat net doit remonter entre 2,4 et 2,6 milliards d’euros, contre 2,2 milliards en 2016 retraité du change et des cessions d’actifs.
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Paris - La filiale du Crédit Agricole Cacib a accepté de payer une amende de 88,24 millions d’euros en échange de l’abandon des poursuites la visant dans l’affaire de fraude fiscale dite «CumCum» qui secoue le monde bancaire depuis 2018. Signée vendredi entre Cacib (Crédit Agricole Corporate and Investment Bank) et le Parquet national financier (PNF), et validée lundi par le président du tribunal de Paris, cette convention judiciaire d’intérêt public (Cjip) est la première à intervenir dans ce dossier en France. Ce qui, selon des observateurs, accentue la pression sur les autres établissements visés. En décembre 2021, le PNF a lancé des enquêtes visant Cacib et cinq autres grandes banques, qui sont, selon une source proche du dossier, BNP Paribas, Exane (gestionnaire de fonds, filiale de BNP Paribas), Société Générale, Natixis et HSBC. Durant l’audience lundi matin, le procureur financier Jean-François Bohnert a salué «la qualité de la coopération de Cacib durant l’enquête et la négociation». Dans le jargon financier, la pratique dite «CumCum» vise à échapper à l’imposition sur les dividendes dont doivent en principe s’acquitter les détenteurs étrangers d’actions d’entreprises françaises cotées. «Eluder l’impôt» Cette technique fiscale avait été dévoilée en 2018 par un consortium de médias internationaux, dont Le Monde, une enquête saluée par les magistrats financiers. Pour profiter de ce montage, les propriétaires d’actions --petits épargnants ou grands fonds d’investissements-- confient leurs titres à une banque au moment de la collecte de la taxe sur les dividendes, échappant ainsi à l’imposition. Les banques jouent un rôle d’intermédiaire, tout en prélevant une commission aux détenteurs d’actions, d’où le terme «CumCum» (gagnant-gagnant). L’accord passé avec Cacib porte sur des faits de blanchiment aggravé de fraude fiscale aggravée, notamment en raison de la commission des faits de manière habituelle, avec des transactions chaque année à la même époque au moment où la taxe doit être collectée, et des montages internationaux, avec des fraudeurs à l'étranger. Entre 2013 et 2021, le PNF a recensé pour Cacib 2.500 opérations d’"arbitrage de dividendes», comme on les appelle officiellement, générant un profit d’environ 50 millions d’euros. La banque de financement et d’investissement du Crédit Agricole --dont la «démarche constructive» tant auprès de l’administration fiscale qu’avec la justice a été plusieurs fois soulignée-- reconnaît les faits, qui visaient à «éluder l’impôt». Le directeur juridique de Cacib, Bruno Fontaine, a expliqué à l’audience que la banque avait depuis mené «de lourds travaux d’enquête» en interne, stoppé ces pratiques, «quitte à perdre un client», et mis en place des contrôles hebdomadaires. Accords avec le fisc Elle a aussi versé un total de 46 millions d’euros d’arriérés d’impôt et d’amende au fisc, dans le cadre de trois règlements portant sur trois périodes, a-t-il expliqué. «Je pense que nous avons été la seule banque à avoir été transparente avec le fisc», a déclaré à l’AFP Me Jean-Pierre Picca, avocat de Cacib. Me Caroline Boyer, avocate du Collectif des citoyens en bande organisée, qui avait porté plainte en 2018 avec le député socialiste Boris Vallaud, a salué «une victoire». «Il est très important qu’il y ait une reconnaissance pleine et entière des faits par les représentants de Cacib», a-t-elle affirmé à l’AFP, ce qui «contredit la position de certaines banques qui contestent le caractère frauduleux de l’arbitrage de dividendes». En juillet dernier, le ministre de l’Economie, Eric Lombard, a fait état de «procédures de redressement» en cours visant «cinq établissements de la place pour un montant de 4,5 milliards d’euros», sans les nommer. Un mécanisme voté dans le budget 2025 en France visait à éviter ce tour de passe-passe en imposant que la retenue à la source s’applique aux «bénéficiaires effectifs» des actions. Mais l’administration fiscale, qui dépend de Bercy, avait ensuite publié un texte permettant des exceptions, déclenchant un tollé chez des parlementaires, qui accusaient le gouvernement d’avoir cédé au lobby bancaire. A l’issue d’un bras de fer, Eric Lombard a finalement annoncé le 24 juillet la republication du texte sans les dispositions contestées, en rappelant que la lutte contre la fraude fiscale a rapporté «plus de 10 milliards d’euros» en 2024. Un dossier essentiel en plein débat sur les économies budgétaires à réaliser. Céline CORNU © Agence France-Presse