Eutelsat amorce un virage stratégique, lesté de faibles performances

L’opérateur européen de satellites a publié des résultats semestriels mitigés, à quelques semaines du lancement de sa fusion avec OneWeb.
Capucine Cousin
L’opérateur de satellites Eutelsat
L'opérateur européen de satellites a déçu sur son résultat net de 51,9 millions d'euros, divisé par trois sur un an.  -  Copyright Airbus Defence and Space.

Eutelsat se prépare à une année 2023 décisive, avec son mariage annoncé avec le britannique OneWeb. Pour l’opérateur européen de satellites, elle s’est ouverte avec des résultats semestriels en demi-teinte dont un résultat net en-deçà des attentes. De quoi susciter une douche froide en Bourse avec un plongeon du titre de 9%, à 6,46 euros, en fin de séance, à un nouveau plus bas historique.

Si Eutelsat a annoncé vendredi un chiffre d’affaires stable (+0,3%), à 573,8 millions d’euros, au premier semestre de son exercice décalé 2022-2023 - un résultat «en ligne avec nos attentes», a indiqué sa directrice générale, Eva Berneke, lors d’un point téléphonique avec la presse vendredi matin - le groupe a déçu sur son résultat net de 51,9 millions d’euros, divisé par trois sur un an, bien inférieur au consensus des analystes. Si l’excédent brut d’exploitation (Ebitda) de 419 millions d’euros ne recule que de 3,8% sur un an, le groupe a en revanche souffert sur ses entrées de cash : le cash-flow libre discrétionnaire ajusté de 120,6 millions d’euros est réduit de moitié (-47,8%), un niveau bien inférieur aux attentes.

Pour l’exercice en cours, Eutelsat se fixe un objectif de chiffre d’affaires de ses «activités opérationnelles» qui devrait se situer entre 1,14 et 1,17 milliard d’euros.

Fusion annoncée

Cette déconvenue intervient alors qu’Eutelsat doit mener plusieurs chantiers de front cette année. Le principal d’entre eux sera la fusion, annoncée en juillet 2022, avec le groupe britannique OneWeb, valorisé 3,4 milliards de dollars. Elle sera avalisée lors d’une assemblée générale extraordinaire de ses actionnaires, qui doit se tenir au deuxième ou au troisième trimestre de cette année, a indiqué Eva Berneke, la réalisation de la transaction restant soumise aux procédures réglementaires habituelles.

La nouvelle entreprise « restera cotée en France, avec son siège social en France, et un actionnariat français via Bpifrance », a précisé Eva Berneke. Côté gouvernance, le président d’Eutelsat, Dominique D’Hinnin, devrait devenir le président du futur conseil d’administration de l’entreprise et Eva Berneke en rester la directrice générale. Les deux pays devraient être présents au conseil d’administration. Par ailleurs, les actionnaires de OneWeb auront leur place dans la nouvelle gouvernance. Hanwha pourra proposer un administrateur indépendant, OneWeb trois, et le conseil d’administration d’Eutelsat quatre, selon l’accord définitif adopté le 14 novembre dernier.

L’actionnariat se partagera entre le gouvernement britannique, l’entrepreneur indien Sunil Bharti Mittal, Bpifrance, le japonais Softbank, Hanwha, et le Fonds stratégique de participations, le bras armé des bancassureurs français dans les ETI tricolores. Londres « avait investi dans OneWeb lorsqu’il était en difficulté », a rappelé Eva Berneke - fin 2020, le gouvernement britannique et le groupe indien Bharti Global avaient racheté OneWeb, en faillite quelques mois auparavant. Puis Eutelsat y avait investi 715 millions de dollars.

Partenariats avec des opérateurs télécoms

Un autre enjeu pour Eutelsat en 2023 concerne le secteur de la connectivité alors que son métier d’origine, la télédiffusion, est en perte de vitesse. L’opérateur satellitaire a d’ailleurs engagé son « pivot stratégique » vers la connectivité. De fait, la distribution d’internet depuis l’espace est un marché porteur pour tous les acteurs du satellite, pour couvrir en internet à très haut débit les zones blanches. Justement, OneWeb apporte dans son escarcelle un des projets de constellations de satellites en orbite basse (LEO) les plus avancés. Or ceux-ci « ouvrent de nouvelles opportunités de marché, mais nécessitent de gros investissements », estime Thomas Coudry, analyste chez Bryan Garnier, dans une étude sur le secteur satellitaire.

D’ailleurs, Eutelsat a noué des partenariats avec deux opérateurs télécoms de taille, Orange et Telecom Italia, a indiqué Eva Berneke. De fait, les « telcos » nourrissent des ambitions dans la couverture satellitaire. Jeudi, lors de sa journée investisseurs, Orange a ainsi annoncé le lancement d’une nouvelle offre d’accès à internet par satellite sous sa marque. Il s’appuiera sur le nouveau satellite en orbite géostationnaire Konnect VHTS d’Eutelsat. Avec à la clé des performances équivalentes à celle d’un réseau fibre, promet Eutelsat.

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