
Engie est rattrapé par les contradictions européennes dans l’énergie

Court-circuit boursier pour Engie. L’énergéticien français a signé mardi la deuxième plus forte chute du CAC 40, avec un repli de 3,3% à 13,50 euros, après avoir prévenu que la législation adoptée dans plusieurs pays de l’Union européenne pour plafonner les prix de l'électricité aurait un impact sur ses résultats en 2022 et 2023. Le fournisseur d'énergie a par ailleurs annoncé une forte hausse des provisions liées au démantèlement de ses centrales nucléaires en Belgique.
Selon le groupe, les mesures visant à limiter la rente infra-marginale liée aux prix de l'électricité, soit les recettes tirées de la production d'électricité d’origine renouvelable ou nucléaire notamment, auront un impact sur son résultat opérationnel (Ebit) compris entre 700 millions et 900 millions d’euros en 2022 et entre 1,2 et 1,5 milliard d’euros en 2023, « la majeure partie de l’augmentation annuelle étant liée aux activités nucléaires en France et en Belgique ». L’effet sur le résultat net récurrent part du groupe est estimé entre 0,8 milliard et 1 milliard d’euros en 2022 et entre 1,1 milliard et 1,4 milliard d’euros en 2023, a ajouté le groupe dirigé par Catherine MacGregor.
Le Conseil de l’Union européenne a décidé en octobre de plafonner les recettes issues de la production d'électricité au moyen de technologies infra-marginales dans le cadre d’un règlement relatif à une intervention d’urgence visant à remédier à la hausse des prix de l'énergie, a rappelé Engie. « Des procédures de transcription sont en cours dans les Etats membres, comprenant des ajustements conséquents par rapport au mécanisme de l’UE, notamment en termes de durée, de champ d’application, de montant du plafond et de mode de calcul des recettes », a poursuivi Engie.
« Les principaux impacts pour Engie devraient se produire en Belgique, en France et en Italie (en plus de la contribution extraordinaire déjà existante promulguée avant l’adoption du règlement de l’UE) », a précisé le groupe qui n’exclut pas de « contester les taxes » qui, selon son avis, « ne respecteraient pas le cadre légal existant et introduiraient une discrimination injustifiée entre opérateurs ou technologies, notamment en Belgique et en Italie ».
Confirmation des objectifs 2022
Le groupe a cependant confirmé ses prévisions pour 2022, qu’il avait relevées le mois dernier après avoir vu ses résultats bondir sur les neuf premiers mois de l’année en raison notamment des prix élevés de l'énergie.
Pour l’exercice en cours, Engie table sur un résultat net récurrent part du groupe compris entre 4,9 milliards et 5,5 milliards d’euros. Cet objectif repose sur des fourchettes indicatives relevées pour l’excédent brut d’exploitation (Ebitda) entre 13,2 milliards et 14,2 milliards d’euros et pour le résultat opérationnel (Ebit) entre 8,5 milliards et 9,5 milliards d’euros.
Ces fourchettes sont « assez larges » et il est « trop tôt » pour fournir plus de précisions sur le niveau des résultats attendus en 2022, a indiqué le directeur financier d’Engie, Pierre-François Riolacci, lors d’une conférence téléphonique avec des analystes. Des hypothèses concernant le plafonnement des prix avaient été intégrées aux prévisions révisées en novembre, a ajouté le responsable. Les résultats annuels seront « plutôt conformes » aux attentes du groupe s’ils ressortent dans le bas de la fourchette, un peu supérieurs s’ils se placent dans la partie haute des objectifs, a précisé Pierre-François Riolacci.
Des provisions jugées injustifiées
La soupe à la grimace ne s’arrête pas là pour les investisseurs. Le fournisseur de gaz et d'électricité a également annoncé mardi, dans un communiqué séparé, une augmentation de 3,3 milliards d’euros dans ses comptes consolidés des provisions liées au démantèlement des centrales nucléaires belges de ses filiales Synatom et Electrabel et à la gestion de l’aval du cycle du combustible nucléaire. Les provisions liées à Synatom augmenteraient de 2,9 milliards d’euros et celles liées à Electrabel, de 0,4 milliard d’euros.
Cette annonce intervient à la suite de la conclusion de la révision triennale menée par la Commission des provisions nucléaires (CPN) en Belgique, a indiqué Engie, qui « considère l’augmentation de 2,9 milliards d’euros [imposée à Synatom, ndlr] injustifiée et soumettra une proposition ajustée dans les 60 jours » au régulateur.
L’interminable feuilleton d’Engie dans le nucléaire belge est donc loin d’être terminé. « Electrabel soumettra une proposition adaptée afin d’ouvrir des discussions qui devraient aboutir au plus tard fin mars 2023 », a ajouté Engie, qui estime que la plupart des risques soulevés par la CPN ont déjà été pris en compte dans le dossier détaillé préparé par ses deux filiales et proposait d’augmenter les provisions de 0,9 milliard d’euros.
Par ailleurs, le groupe poursuit avec l’Etat belge des discussions « constructives », concernant l'éventuelle prolongation, au-delà de 2025, de l’exploitation des deux unités nucléaires les plus récentes du pays, Doel 4 et Tihange 3, a indiqué Pierre-François Riolacci. Electrabel et l’Etat belge ont signé en juillet dernier une lettre d’intention non engageante afin « d'évaluer la faisabilité et les conditions d’une prolongation » de ces deux unités nucléaires.
Plus d'articles
-
Engie améliore ses objectifs annuels après un solide premier trimestre
Le groupe énergétique vise par ailleurs la signature d'un accord d'ici fin juin avec les autorités belges au sujet de l'extension de deux réacteurs nucléaires. -
Engie électrise le marché en relevant ses objectifs à moyen terme
L’énergéticien désamorce les craintes de normalisation financière après un millésime 2022 hors norme. Il prévoit une accélération de ses investissements. -
Le sort boursier d'Engie reste étroitement lié au nucléaire belge
La prolongation de deux réacteurs sur les six exploités en Belgique au-delà de 2025 ne lève pas toutes les incertitudes.
Contenu de nos partenaires
- Climat : BNP Paribas droite dans ses bottes face aux ONG
- Slawomir Krupa doit redorer le blason boursier de la Société Générale
- La BCE inflige une amende à Goldman Sachs
- L’alliance mondiale des assureurs «net zéro» fait pschitt
- Arnaud Llinas (Amundi ETF): «80% de notre collecte du premier trimestre s’est faite sur les ETF ESG»
- Carrefour s’apprête à supprimer 1.000 postes dans ses sièges en France
- Le pari gagnant d’UBS sur Credit Suisse laisse les actionnaires de marbre
- La succession d’Olivier Klein à la tête de la Bred se précise
- Casino obtient l’ouverture d’une procédure de conciliation avec ses créanciers
-
Classique
Présidence du Medef: Patrick Martin, le candidat du «produire plus»
Le candidat à la succession de Geoffroy Roux de Bézieux insiste sur la nécessité d'augmenter la croissance, moteur indispensable pour le pouvoir d'achat, l'emploi et les investissements vertueux au profit du climat -
Piège
Saint-Brévin: le RN rattrapé par l'activisme de l'extrême droite
Alors que les frontistes s'institutionnalisent, d'autres forces, comme Reconquête!, le parti d'Eric Zemmour, et des groupuscules ultra-radicaux, comme Civitas, veulent occuper le terrain et prendre la lumière -
Première étape
Bruxelles et Washington prêtes à établir des normes provisoires sur l’IA
L’UE et les Etats-Unis sont prêts à renforcer leur coopération en matière d’intelligence artificielle afin d’établir des standards minimaux avant la mise en place de législations en la matière, a déclaré mardi Margrethe Vestager, commissaire européenne à la Concurrence et responsable des questions de technologie au sein de l’UE