Bouygues lance les hostilités dans les télécoms fixes

L’opérateur casse les prix dans l’ADSL pour doubler sa part de marché. Une façon de peser plus lourd dans la recomposition actuelle du secteur
Olivier Pinaud

Martin Bouygues n’a pas amélioré l’état «calamiteux», selon son propre adjectif, du marché des télécoms. En dévoilant une offre ADSL (téléphone, TV et internet) à 19,99 euros par mois, Bouygues prend le risque d’une escalade de la guerre tarifaire dans le fixe, à l’image de celle provoquée par le lancement en janvier 2012 du forfait mobile de Free à 20 euros par mois.

Hier, les cours des opérateurs ont souffert de l’annonce. Orange a perdu 860 millions d’euros de capitalisation boursière (-3,37%) et Iliad 588 millions (-5,75% et jusqu'à -9,5% en séance). Même Bouygues, en hausse de 5,6% en début de matinée grâce à des résultats annuels meilleurs que prévu, s’est étiolé après cette offensive (-0,07% en clôture). Seul Vivendi a fini en hausse (+0,4%) porté par la spéculation sur SFR.

«Un marché mature comme celui-ci a besoin d'être bousculé avec des offres innovantes», a lancé Martin Bouygues en visant «des acteurs bien en place avec des marges d’Ebitda supérieures à 40% proches de celle du luxe», Free, pour ne pas le nommer. La marge d’Ebitda de l’opérateur de Xavier Niel avoisine 42% dans le fixe, deux fois plus que celle de Bouygues Telecom ou de SFR.

Bouygues a tenté une première incursion, fin 2013, avec une offre sans TV à 15,99 euros destinée à un petit segment du marché. L’attaque d’hier cherche à faire plus de dégâts. L’opérateur vise 20% du marché, soit 5 millions de clients, contre 2 millions fin 2013. Une façon de montrer les muscles et de se renforcer au moment où le secteur prépare une vaste recomposition autour du cas SFR.

Avec 8% du marché de l’ADSL, «Bouygues est l’opérateur qui a le moins à perdre en baissant les prix», indiquait récemment Kepler Cheuvreux. L’impact potentiel sur sa base de clients actuelle sera mécaniquement plus faible que chez Free qui compte plus de 5,4 millions de clients fixes et dont plus de 80% de l’Ebitda dépend de l’ADSL. Toute baisse d’un euro du revenu moyen par abonné fixe chez Free entaille de 6% l’Ebitda d’Iliad, contre 3% chez Numericable, 1% chez Vivendi, 0,9% chez Orange et 0,8% chez Bouygues, calcule Kepler Cheuvreux.

Plutôt que de baisser les prix, les concurrents ont donc intérêt à laisser filer quelques clients vers Bouygues afin de préserver leur cash-flows. D’ailleurs, si Iliad a répliqué hier à l’offre, un centime en dessous du prix de Bouygues, il l’a fait avec sa marque low cost Alice qui ne représente que 2,36% de sa base d’abonnés ADSL.

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