
Une violente récession ne fait plus de doute

Plus de doute, l’économie est déjà en récession. Les chiffres du chômage américain en donnent la mesure : en deux semaines, les inscriptions au chômage ont bondi de plus de 6 millions (lire par ailleurs). Depuis la propagation de l'épidémie aux Etats-Unis, les économistes ont revu drastiquement leurs prévisions de croissance mondiale. «Les mesures de confinement et d’arrêts d’activités plus strictes pour lutter contre le Covid-19 en Europe et aux Etats-Unis pèsent sur les dépenses de consommation et des entreprises comme jamais depuis la Grande Dépression de 1930», affirment les économistes de Deutsche Bank. Une situation exacerbée par la concomitance d’un choc d’offre et de demande. Et même s’ils saluent la rapidité et l’ampleur des interventions des banques centrales et des gouvernements, tous sont convaincus que cette aide, nécessaire, permettra simplement d’amortir le choc.
«Nous prévoyons dans notre scénario central une baisse de 2.000 milliards de dollars des PIB aux Etats-Unis et dans l’Union européenne d’ici à la fin de l’année par rapport à ce que nous anticipions avant la crise du coronavirus», explique la banque allemande qui table désormais sur des contractions de PIB de 7% en zone euro, de 4% aux Etats-Unis et de 1,4% en Chine. Les économistes de Fitch Ratings anticipent pour leur part une contraction de près de 2% du PIB au niveau mondial comme en 2009. «La rapidité à laquelle évolue la pandémie a rendu nécessaire une nouvelle révision forte de nos prévisions de croissance mondiale», expliquent ses économistes. Près d’un million de personnes ont été contaminées dans le monde et près de 50.000 en sont mortes. Nomura est sans doute l’un des plus pessimiste avec une contraction mondiale anticipée de 4%.
Le choc économique devrait se situer au deuxième trimestre, après celui de la Chine au premier. La banque japonaise attend une chute de 10% du PIB sur la période (en rythme trimestriel) en Europe et aux Etats-Unis. Mais ces prévisions restent encore très aléatoires. «Les risques restent élevés en raison de l’incertitude sur l’évolution de l’épidémie et la durée du confinement ainsi que de la forte volatilité sur les marchés», jugent les économistes de Nomura dont la fourchette de prévision pour la croissance mondiale, en fonction des divers scénarios, va de -2,2% à -6,9%. La question est celle de la longueur du confinement mais aussi de la stratégie de sortie de cette période (arrêt immédiat ou progressif du confinement, risque de deuxième vague de contamination…). Les économistes de Fitch estiment à 2 points de PIB le coût économique supplémentaire pour l’Europe et les Etats-Unis d’une prolongation du confinement à huit semaines avec une sortie très lente de ces mesures.
Quelle reprise ?
Une autre question se pose : celle de la vigueur du rebond une fois l’épidémie contrôlée. Les économistes semblent avoir abandonné l’idée d’une reprise forte et rapide et anticipent un retour graduel à la normale. «Une reprise au second semestre est possible à mesure que les restrictions sont levées mais les facteurs amplifiant la dislocation, comme les pertes d’emplois, la baisse des investissements de production, le choc sur les prix des matières premières et l’effondrement des marchés financiers risquent de contraindre cette reprise», affirme Fitch qui ne s’attend pas à ce que l’Europe et les Etats-Unis retrouvent leur niveau de PIB pré-coronavirus avant fin 2021. «Un rebond est possible en fin d’année sauf si la hausse du chômage a un impact récessif sur la demande», estime UBS. D’autant que contrairement à d’autres crises passées, le secteur des services, un important contributeur à l’emploi, est nettement plus touché que l’industrie. Les indices PMI, publiés ce matin, devraient confirmer un effondrement de ce secteur. Les économistes attendent une forte hausse du chômage. Deutsche Bank anticipe 15 millions de chômeurs supplémentaires aux Etats-Unis et 7,5 millions en Europe.
«Notre scénario central est celui d’une reprise en U plutôt qu’en V car les restrictions d’activité devraient être levées progressivement et à des rythmes différents selon les secteurs et les régions, souligne Joachim Fels, économiste chez Pimco. En outre remettre en route la chaîne d’approvisionnement et la chaîne logistique et de transport prendra un certain temps. En conséquence, après le plongeon actuel de l’activité (la première barre du U), nous anticipons un atterrissage de quelques mois après que le virus sera sous contrôle (le L dans le U) avant que la production et la demande ne reviennent à des niveaux normaux (la deuxième barre du U) grâce aux soutiens monétaire et budgétaire ».
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