Les valeurs moyennes veulent rattraper leur retard

La sous-performance des small et midcaps est historique, notamment en Europe. Une opportunité pour certains malgré l’approche d’une récession.
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La décote des valeurs moyennes est de 9% par rapport aux grandes capitalisations  -  © Bloomberg

Les marchés actions ont effacé le coup de grisou provoqué par la crise bancaire régionale aux Etats-Unis puis le sauvetage de Credit Suisse. Mais avec une importante discrimination entre grandes et petites capitalisations. En Europe, ces dernières sont quasiment étales (indice MSCI EMU Small Cap), quand les grandes capitalisations de la région surperforment de près de quatre points depuis mi-mars. «Nous assistons à un marché haussier à deux vitesses, relève Emmanuel Cau, stratégiste chez Barclays. Au-delà de la solidité globale des marchés boursiers, nous constatons une certaine prudence et une polarisation accrue. Depuis le stress bancaire de mars, le spectre des valeurs soutenant la hausse s’est rétréci et est devenu plus défensif. Les petites capitalisations ont nettement sous-performé les grandes capitalisations dans les principales régions.»

Cette sous-performance s’est en fait accrue depuis plus d’un an, les investisseurs ayant boudé la classe d’actifs. «La sous-performance massive des valeurs moyennes en zone euro par rapport aux grandes capitalisations est historique», observe Caroline Gauthier, coresponsable de la gestion actions et gérante des fonds small caps chez Edmond de Rothschild AM (Edram). Depuis avril 2022, soit peu après le début de la guerre en Ukraine, leur performance est inférieure de 18 points par rapport aux grandes entreprises. Entre juillet 2007 et décembre 2008, celle-ci avait atteint 14 points, au plus fort de la crise financière. «Les valeurs moyennes sont aussi en décalage en termes de valorisation relative, avec une décote de 8%», ajoute la gérante. En moyenne, elles affichent une prime de 24% sur vingt ans. «Les investisseurs acceptent de les payer davantage que le marché pour leurs perspectives de croissance», poursuit-elle.

Décote élevée

Au sein de la zone euro, ces valeurs se payent 11,4 fois les bénéfices à douze mois, bien en dessous de la moyenne historique de 15,3 fois. «Les petites capitalisations semblent très bon marché, avec des ‘price earning ratio’ et des ‘price to book’ [capitalisation des bénéfices et des actifs] proches du bas de la fourchette historique, en termes à la fois absolu et relatif», poursuit Emmanuel Cau. Et cela aiguise l’appétit des investisseurs. Stanislas de Bailliencourt, directeur des investissements chez Sycomore AM, estime que les valeurs moyennes sont intéressantes pour jouer ce rattrapage. «Leur valorisation n’a jamais été aussi basse depuis 2011-2012», souligne le gérant, pour qui il y a aujourd’hui dans le marché une alternative à un prix raisonnable (TARA : «there are real alternatives»).

L’aversion au risque, avec la guerre en Ukraine, l’inflation et la hausse des taux, a lourdement pesé sur les valeurs moyennes. Elles sont aussi délaissées dans ces marchés incertains en raison de leur faible valorisation. «Les petites capitalisations ont un bêta élevé, mais leur performance semble déjà trop déprimée par rapport à la résilience relative de l’économie et des bénéfices et assez alignée sur le durcissement des conditions financières», note Emmanuel Cau. Comme les grandes capitalisations, elles ont bénéficié du pricing power leur permettant d’amortir la hausse des coûts et l’inflation et de maintenir leurs marges. En outre, elles ne sont pas plus endettées.

Mais, à elle seule, la faible valorisation justifie-t-elle de se positionner sur ces valeurs ? La gérante d’Edram reconnaît toutefois que les valeurs moyennes ne surperforment que lorsque les signes de reprise sont tangibles. Le risque de récession d’ici à la fin de l’année ou début 2024, dont on ne connaît ni l’ampleur ni la durée, peut encore freiner l’appétit des investisseurs. «Aux niveaux de valorisation actuels, nous pensons que ces valeurs intègrent déjà un scénario macroéconomique particulièrement noir, relève Caroline Gauthier. Or nous ne croyons pas que la récession sera aussi forte qu’en 2008-2009.» Mais l’environnement de taux et l’inflation sont aussi très différents.◆

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