
Les frugaux européens ripostent

Les Etats européens dits frugaux (Pays-Bas, Autriche, Danemark et Suède) ont élaboré une contre-proposition en réponse à l’initiative franco-allemande sur un fonds de relance de 500 milliards d’euros alimenté par de la dette commune et distribué sous forme de transferts budgétaires.
Dans un document de travail qui a fuité samedi, ces quatre contributeurs nets du budget européen refusent le principe même de mutualisation de la dette, lui préférant une approche exclusivement fondée sur des prêts aux Etats-membres. Les pays en difficulté budgétaire pourraient ainsi bénéficier d’emprunts à des conditions favorables pendant une période limitée à 2 ans.
«Nous ne pouvons pas accepter quelque instrument menant à une mutualisation de la dette ou une augmentation significative du budget européen», écrivent les frugaux, qui continuent de demander un budget limité à 1% du revenu national brut (RNB) européen, comme avant l’épidémie.
La contre-proposition confirme donc l’opposition frontale et idéologique de ces pays à l’initiative franco-allemande. L’inflexion allemande semble n’avoir eu aucun effet sur les habituels alliés d’Angela Merkel. Leur demande de maintien du système des rabais peut toutefois apparaître comme un appel du pied subtil. Les frugaux pourraient ainsi être prêts à s’engager dans un fonds de relance ambitieux contre le maintien de ces compensations budgétaires.
Pour la période 2014-2020, le Danemark, les Pays-Bas et la Suède bénéficient de réductions brutes de leur contribution annuelle calculée en fonction du RNB, soit respectivement 130 millions d’euros, 695 millions et 185 millions d’euros. L’Autriche a elle aussi bénéficié de rabais jusqu’en 2016.
Les frugaux mettent la pression sur la Commission européenne (CE) qui doit présenter mercredi une double proposition de fonds de relance et de budget pluriannuel 2021-2027. Jeudi, le vice-président de la CE Valdis Dombrovskis a évoqué «un fonds de plus de 1.000 milliards d’euros», lequel distribuerait à la fois prêts et transferts.
Le fonds de relance solidaire pourrait aussi être vu d’un mauvais oeil à l’Est du Continent, plus pauvre et moins touché par l’épidémie que le Sud. L’avancée vers une union budgétaire que représente l’initiative franco-allemande, et à laquelle les Etats de l’Est ont tout intérêt, pourrait toutefois les convaincre de s’engager, moyennant certaines compensations.
Les chefs d’Etats et de gouvernement des 27 se retrouveront le 8 juin pour tenter de se mettre d’accord sur le fonds de relance et le budget.
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L'ambassadeur britannique aux Etats-Unis limogé, pour ses liens avec Jeffrey Epstein
Londres - L’ambassadeur britannique aux Etats-Unis, Peter Mandelson, a été limogé jeudi en raison de ses liens avec le délinquant sexuel américain Jeffrey Epstein, un revers de plus pour le Premier ministre Keir Starmer avant la visite d’Etat de Donald Trump au Royaume-Uni. La pression montait depuis plusieurs jours sur Keir Starmer, qui avait nommé il y a moins d’un an cet architecte du «New Labour» de Tony Blair, pour tenter de consolider les liens entre son gouvernement et la nouvelle administration Trump. Des mails entre le vétéran du parti travailliste de 71 ans et le financier américain, mort en prison en 2019, révélés cette semaine, «montrent que la profondeur et l'étendue des relations de Peter Mandelson avec Jeffrey Epstein sont sensiblement différentes de celles connues au moment de sa nomination», a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. «Compte tenu de cela, et par égard pour les victimes des crimes d’Epstein, il a été révoqué comme ambassadeur avec effet immédiat», a ajouté le Foreign Office. Dans une lettre écrite par Peter Mandelson pour les 50 ans de Jeffrey Epstein en 2003, et publiée en début de semaine par des parlementaires à Washington, le Britannique affirme que le financier américain est son «meilleur ami». Interrogé mercredi après la publication de cette lettre, le Premier ministre Keir Starmer lui avait apporté son soutien, assurant que Peter Mandelson avait «exprimé à plusieurs reprises son profond regret d’avoir été associé» à Jeffrey Epstein. Mais cette position est rapidement devenue intenable. En fin de journée mercredi, des médias britanniques, dont le tabloïd The Sun, ont rapporté que M. Mandelson avait envoyé des mails de soutien à Jeffrey Epstein alors que ce dernier était poursuivi en Floride pour trafic de mineures. Juste avant que M. Epstein ne plaide coupable pour conclure un arrangement dans cette affaire en 2008, Peter Mandelson lui aurait écrit: «Je pense énormément à toi et je me sens impuissant et furieux à propos de ce qui est arrivé», l’incitant à "(se) battre pour une libération anticipée». «Je regrette vraiment très profondément d’avoir entretenu cette relation avec lui bien plus longtemps que je n’aurais dû», avait tenté de se défendre l’ambassadeur dans un entretien diffusé mercredi sur la chaîne YouTube du Sun. Il y a affirmé n’avoir «jamais été témoin d’actes répréhensibles» ou «de preuves d’activités criminelles». «Sérieuses questions» «L’affirmation de Peter Mandelson selon laquelle la première condamnation de Jeffrey Epstein était injustifiée et devait être contestée constitue une nouvelle information», a fait valoir le Foreign Office pour expliquer la décision de le limoger. Dans une lettre au personnel de l’ambassade, citée jeudi soir par la BBC, Peter Mandelson affirme que ce poste a été le «privilège» de sa vie. «Je regrette profondément les circonstances qui entourent l’annonce faite aujourd’hui», ajoute-t-il. Les relations entre Londres et Washington sont «en très bonne posture», se félicite l’ex-ambassadeur, disant en tirer une «fierté personnelle» Pour Keir Starmer, ce départ, à une semaine de la visite d’Etat du président Donald Trump au Royaume-Uni les 17 et 18 septembre, est un nouveau coup dur. Le dirigeant travailliste, au plus bas dans les sondages, a déjà dû se séparer il y a quelques jours de sa vice-Première ministre, Angela Rayner, emportée par une affaire fiscale, ce qui a déclenché un remaniement de taille du gouvernement. Trois fois ministre et commissaire européen, Peter Mandelson était le premier responsable politique nommé ambassadeur à Washington, un poste traditionnellement réservé à des diplomates chevronnés. Cet homme de réseaux et d’influence, surnommé le «Prince des ténèbres», était déjà tombé à deux reprises par le passé en raison d’accusations de comportements répréhensibles ou compromettants. La cheffe de l’opposition conservatrice Kemi Badenoch a fustigé le «manque de courage» de Keir Starmer, qui «a encore échoué à un test de son leadership». Marie HEUCLIN © Agence France-Presse