
La rémunération des dépôts en zone euro entre dans une nouvelle ère

En annonçant, jeudi, une hausse historique de ses taux de trois quarts de point, la Banque centrale européenne (BCE) n’a pas seulement rejoint le «club des 75 points de base», celui des institutions monétaires relevant à marche forcée leurs taux directeurs. Elle a aussi fait repasser son taux de rémunération des dépôts en territoire positif (0,75%) et mis fin aux régimes d’exception instaurés à l’ère des taux négatifs.
Deux mesures techniques mais importantes ont ainsi été dévoilées. La première est l’arrêt du système à plusieurs étages (two-tier system, ou tiering) qui encadrait les dépôts du système bancaire auprès des banques centrales. Celui-ci avait été adopté en octobre 2019, pour éviter que le taux de dépôt négatif (-0,5% à l’époque) appliqué aux réserves des banques ne représente une ponction trop forte sur les revenus des établissements de crédit. Depuis cette date, les réserves excédentaires – au-delà de l’exigence minimale, et dans la limite d’un multiplicateur de six fois cette dernière – étaient rémunérées à 0%. Le système avait permis aux banques de la zone euro d’économiser plusieurs milliards d’euros.
Avec le retour en territoire positif du taux de dépôt, le tiering n’était plus nécessaire. La BCE l’a suspendu en fixant le multiplicateur à zéro et n’a pas jugé utile d’introduire un système symétrique, ou reverse tiering, qui plafonnerait la rémunération des réserves. «Cela veut dire que les banques vont profiter à plein d’un taux de dépôt plus élevé et des faibles taux de TLTRO», les injections de liquidités à long terme de la BCE, réagit Frédérik Ducrozet, responsable de la recherche macro chez Pictet Wealth Management. D’où la réaction boursière positive de jeudi, l’indice sectoriel Euro Stoxx Banks ayant gagné 3,2% dans un marché en légère hausse.
La BCE a aussi levé le plafond de 0% qui s’appliquait à la rémunération des dépôts des Etats auprès des banques centrales de l’Eurosystème. Il s’agit, par exemple, du compte unique du Trésor auprès de la Banque de France, qui centralise toutes les dépenses et recettes de l’Etat. Ces sommes seront rémunérées au plus bas des deux taux entre la facilité de dépôt et le taux interbancaire au jour le jour €ster, jusqu’au 30 avril 2023. Selon une source proche, «l’idée est que ces dépôts restent en banque centrale plutôt que de se déverser sur le marché monétaire», qui deviendrait bien plus avantageux si le plafond à 0% était maintenu.
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