
Les fusions-acquisitions dans l’assurance sont à un plus haut de dix ans

Les fusions-acquisitions dans l’assurance ne connaissent pas la crise. «Face aux fortes pressions économiques - inflation, hausse des coûts de l'énergie et récession imminente - les assureurs restent concentrés sur les opportunités de croissance», résume la mise à jour à la mi-année du rapport sur la croissance de l’assurance 2022 du cabinet d’avocats spécialiséClyde & Co. Sur les six premiers mois de l’année, les fusions-acquisitions finalisées dans le secteur bondissent à un rythme inédit depuis dix ans au niveau mondial, en hausse de 9,5% par rapport au second semestre 2021. Au total, 242 deals ont été totalement terminés au 30 juin 2022, contre 221 au secondsemestre 2021 et 197un an plus tôt. Il faut remonter au premier semestre 2012 pour retrouver un tel niveau avec 244 deals. L’Amérique porte la dynamique. Sur le continent, les opérations ont progressé de 22,2% par rapport au second semestre 2021 avec 132 deals. Les Etats-Unis enregistrent à eux seuls 103 transactions, dontla plus chère, à savoirla fusion estimée à 7,7 milliards de dollars (7,7 milliards d’euros) entre le fonds de capital-investissement américain Apollo Global Managementet legroupe d’épargne retraite Athene Holding. L’Asie-Pacifique, +12,5% avec 27 opérations, et le Moyen-Orient et l’Afrique, +33,3% avec 16 transactions, sont aussi en croissance. Seule l’Europe se distingue, subissant un recul de 9,5% des transactions au premier semestre (67). La France se situe au deuxième rang régional avec 11 transactions, derrière le Royaume-Uni qui en a enregistré 18. Consolidation des intermédiaires Le Vieux Continent se caractérise aussi par des cessions d’activités jugées non essentielles mais qui pèsent lourddans les bilans.«L’Europe a connu un grand nombre d’opérations en run-off, qui sont utilisées pour ‘embellir la mariée’, afin de s’assurer qu’il n’y a pas d’anciennes activités indésirables dans le bilan qui pourraient entraver une éventuelle opération de fusion et d’acquisition», explique Ivor Edwards, associé à Londres. De quoi laisser entendre que la dynamique pourrait repartir. Déjà,le volume des opérations de fusion-acquisition annoncé dans le secteur de l’assurance en Europea augmenté de 29% sur un an, passant de 85 à 110 au deuxième trimestre 2022 et 106 au premier trimestre 2022, rapporte le dernier baromètre du cabinet d’étude FTI Consulting. Son approche est différente de celle du cabinet Clyde & Co car il ne concerne pas les seuls porteurs de risque, ce qui joue grandement: «Malgré́ la spirale inflationniste et la hausse des taux d’intérêt sur le continent, les résultats mettent en évidence l’apport continu de capitaux sur le marché́ de l’assurance, alimenté par la consolidation des intermédiaire», explique le cabinet. Capital-investissement «L’activité́ de consolidation des courtiers continue d'être soutenue par l'écart important entre le multiple d’achat de la cible et le multiple de négociation de la plateforme dans les secteurs de la distribution et des prestataires de services», expliqueAndré Frazao, associé chez FTI Consulting.«Il y a encore beaucoup d’investisseurs en capital-risque qui préfèrent opter pour un bilan allégé ou rester dans des intermédiaires ou des sociétés de services au secteur de l’assurance, ce qui entraîne une consolidation importante dans cette partie du secteur de l’assurance», abonde Peter Hodgins, associé chez Clyde & Co. La France, où le nombre d’opérations reste stable à cinq annonces, n’échappe pas à cette spécificité:le spécialiste du courtage en assurance et en financement immobilier Odealim a par exemple confié une place de co-contrôle à Ardianaux côtés de TA Associatesdans une opération le valorisant 950 millions d’euros.Plus globalement, l’attrait des sociétés de private equity se confirme : les opérations des fonds de capital-investissement et de leurs sociétés en portefeuille ont ainsi augmenté de 24% sur un anau deuxième trimestre 2022. Rouge pour la réassurance La dynamique haussière des fusions-acquisitions ne devrait pas ralentir au deuxième semestre, notamment alimentée par le capital-investissement.«Les fonds regorgent de capitaux et sont désireux de les déployer dans un secteur qu’ils considèrent de plus en plus comme offrant des rendements intéressants et fiables», décrypte Clyde & Co. La hausse des taux d’intérêt ne représente pas encore un obstacle pour ces acteurs qui disposent de niveaux élevés de «poudre sèche» accumulés pendant la pandémie. Dans son rapport annuel sur l’assurance, McKinsey & Company anticipe même une accélération.«Nous prévoyons que les assureurs vie seront plus actifs que les assureurs dommages», précise le cabinet de conseil, pour qui les défis de la hausse des taux poussent à la consolidation des assureurs vie. Nourri par cet appétit et l’attrait pour les prestataires de services et les courtiers, les multiples d’évaluation resteront élevés. «Goldman Sachs aurait payé 18 fois le bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement (Ebitda) pour The Clear Group, et Howden a annoncé l’achat de TigerRisk, courtier mondial en réassurance, pour un montant de 17-18 foisl’Ebitda», rappelle FTI Consulting. Seule la réassurance devrait voir l’activité ralentir. «L’appétit des investisseurs pour les sociétés de réassurance a sensiblement diminué en raison de la persistance de leurs faibles performances et des niveaux élevés de volatilité, plusieurs transactions n’ayant pas abouti, comme l’offre de Brickell sur R&Q», prévient le cabinet.Fitch Ratings, qui voit les fusions-acquisitions rester limitées en 2023 dans la réassurance, explique queles réassureurs donneront «la priorité à la tarification, à la gestion des risques et à la croissance organique plutôt qu’aux fusions et acquisitions».
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