
L’actionnariat salarié, accord gagnant-gagnant

Vents contraires pour les actionnaires salariés de banques. La sortie de cote de Natixis à 4 euros par titre a pu susciter des interrogations sur l’intérêt de ce dispositif dans le secteur financier. D’autant que les conditions financières de l’offre de rachat lancée par BPCE fin juin sont synonymes d’une légère perte pour les souscripteurs de l’augmentation de capital réservée de 2018. L’interdiction de versement de dividende édictée par la Banque centrale européenne (BCE) pour l’exercice 2020 a aussi marqué les investisseurs historiques qui sont très attachés à ce complément de rémunération, rapporte un président d’association d’actionnaires salariés.
Il n’y a pourtant pas de sujet, à en croire les banques. « L’actionnariat salarié de notre entreprise s’inscrit pleinement dans une politique de participation des collaborateurs à la performance financière du groupe. Nous sommes favorables à un accroissement progressif de la part des salariés dans le capital de Crédit Agricole SA au travers d’offres réservées régulières », explique Philippe Kacou, directeur rémunération et avantages sociaux de Crédit Agricole SA.
Un intérêt patrimonial
Les niveaux de détention de capital stagnent toutefois. Crédit Agricole SA, le véhicule coté de la banque verte, qui a la particularité d’être détenue majoritairement par ses caisses régionales (55,3 %), compte 100.000 actionnaires salariés individuels qui possèdent 5,8 % du capital. C’est un peu plus que chez BNP Paribas (4,4 %) et Natixis (2,84 %), mais moins qu’à la Société Générale, chez qui les actionnaires salariés détiennent 6,87 % du capital pour 11,18 % des droits de vote. S’ils ne sont plus les premiers actionnaires du groupe – BlackRock détient 8,20 % du capital –, ils ont marqué l’histoire. En 1999, face à l’offre publique d’achat lancée par la BNP, la mobilisation du personnel avait largement contribué à préserver l’indépendance de la banque rouge et noire. Une culture donc, symbolisée par 27 ans d’augmentations de capital annuelles réservées aux salariés et retraités du groupe, avant que le rythme ne devienne triennal à partir de 2014.
La loi Pacte, qui oblige les groupes à avoir un administrateur représentant les actionnaires salariés dès que leur détention du capital dépasse 3 %, témoigne néanmoins de la volonté de donner de l’importance au sujet. Proposées en général avec une décote de 20 % par rapport à la moyenne des 20 dernières séances de Bourse, les actions sont ensuite bloquées pendant cinq ans.
Parfois déçus par les performances du titre, les actionnaires salariés restent attachés à l’existence d’un dividende. Mais la souscription est bénéfique à tous, veut croire Patrick Pagny, président de l’Association des salariés et anciens salariés actionnaires du groupe Société Générale (Assact SG) : « Les salariés actionnaires ont une autre vision. L’administrateur élu pour les représenter défend l’intérêt patrimonial alors que les partenaires sociaux se concentrent sur les questions sociales. Or les études montrent que la performance du titre est plus élevée avec l’actionnariat salarié. » Les banques le reconnaissent aisément : il s’agit d’un moyen très efficace d’implication des équipes dans le moyen et long terme. Une salarié reconnaît par exemple s’intéresser à la stratégie de son groupe depuis sa souscription, chose qu’elle délaissait auparavant.
Une philosophie chez Axa
Pour l’assurance aussi, l’histoire joue. « L’actionnariat salarié chez Axa tire ses racines de la vision qu’avait Claude Bébéar de l’entreprise et qui a été poursuivie par ses successeurs », explique Sophie Bourlanges, directrice de la communication auprès des actionnaires individuels et salariés chez Axa. Ces derniers détiennent presque 4,31 % du capital et 5,84 % des droits de vote de l’assureur. Chaque année depuis 1993, une augmentation de capital leur est réservée, à l’exception de 2008 et 2009 en raison du contexte de crise financière. Celle de 2021, baptisée Shareplan 2021, sera bientôt ouverte. En 2020, 17.000 collaborateurs y avaient souscrit, soit environ 15 % de l’effectif salarié concerné. A 13,76 euros l’action (soit une décote d’environ 20 %), la souscription avait atteint 88 millions d’euros correspondant à l’émission de plus de 6 millions d’actions nouvelles.
« C’est très sain de proposer aux salariés d’être partie prenante de l’aventure actionnariale. C’est un outil de fidélisation et un moyen de partager la valeur ajoutée de manière complémentaire. Plus globalement, cela permet d’avoir un alignement d’intérêts et une meilleure compréhension des enjeux de l’entreprise », justifie Sophie Bourlanges. Avec encore plus de recul, le modèle même de l’assurance partage des principes avec l’actionnariat salarié : « Axa évolue dans une industrie de long terme, l’actionnariat salarié est cohérent avec notre démarche. Il s’agit d’un gage de stabilité pour l’entreprise et c’est une manière de compléter la relation avec les collaborateurs en les associant à la performance de l’entreprise. »
Surtout, l’actionnariat salarié s’inscrit dans un modèle de société qui s’impose : celui de la stakeholder value, ou des parties prenantes. Loin de s’en éloigner, le système financier français accompagne cette évolution, la volonté de Bercy étant de voir l’actionnariat salarié atteindre 10 % du capital des grands groupes cotés français.
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Immigration clandestine : raid policier dans une usine Hyundai-LG aux Etats-Unis, près de 500 arrestations
Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse