La Fed est à nouveau prise en défaut sur sa supervision bancaire

Par trois fois, ses équipes ont renoncé entre 2008 et 2010 à contrôler le CIO de JPMorgan, devenu tristement célèbre avec la «Baleine de Londres»
Alexandre Garabedian

Le compte-rendu ne fait que quatre pages, mais il est suffisamment embarrassant pour la Fed. Le bureau de l’Inspecteur général de la Réserve fédérale a publié le 21 octobre sur son site internet le résumé de son enquête interne sur la «Baleine de Londres», qui a conduit JPMorgan à perdre 6,2 milliards de dollars sur les marchés de crédit au printemps 2012.

Une catastrophe qui n’aurait sans doute pas pris de telles proportions si les superviseurs de la banque centrale américaine, et notamment ceux de la Fed de New York, avaient fait leur travail correctement. Le rapport complet, lui, n’est pas rendu public.

Par trois fois, les équipes du superviseur bancaire ont éprouvé le besoin de contrôler le Chief Investment Office, ce département de JPMorgan chargé de replacer la trésorerie de la banque et qui s’est mué en gros hedge fund interne. En 2008 et 2010, la Fed de New York avait prévu un audit du CIO après avoir «identifié des risques liés à ses activités de trading», tandis qu’en 2009, le conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale recommandait une revue complète. Mais ces missions n’ont jamais été menées, par manque de ressources – l’équipe qui supervisait JPMorgan a notamment été remaniée en 2011 – et du fait d’autres priorités.

Ce ratage met à nouveau en cause la capacité des superviseurs bancaires à contrôler des animaux aussi complexes que JPMorgan, et assez riches pour attirer à eux les meilleurs éléments. Les équipes de la Fed de New York «n’avaient pas une vision claire» sur ce qu’ils pouvaient espérer d’un contrôle continu, souligne l’inspecteur général. En langage administratif, ces propos font écho à ceux de Carmen Segarra, une ex-employée de la banque centrale new-yorkaise, qui a récemment dénoncé la mansuétude dont bénéficiait Goldman Sachs au sein de l’institution. En d’autres termes, le superviseur bancaire discuterait des problèmes, mais tarderait à agir pour y mettre fin.

A l’époque, les équipes de la Fed n’auraient pas débusqué de «Baleine» au sein du CIO. Entre 2008 et 2010, le portefeuille de crédit synthétique du département ne dépassait pas 4 milliards de dollars et semblait bien destiné à une stratégie de couverture. Ce n’est qu’à partir de mi-2011 que des positions énormes ont commencé à être prises, comme l’a montré le rapport du Sénat américain publié l’an dernier. Mais la gouvernance et la culture du risque du CIO, qui éveillaient déjà les soupçons du superviseur, auraient pu être renforcées.

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