
La conformité aux règles de concurrence reste un défi pour les entités françaises

Quels défis pour les entreprises en matière d’éthique et de conformité ? Deux principales tendances devraient les affecter en 2023, la multiplication des nouvelles réglementations européennes (anticorruption, droits humains, antitrust, cyber, durabilité des entreprises ou CSRD) et l’augmentation significative du risque de controverses éthiques, les entreprises étant surveillées davantage par les ONG, selon le cabinet français d’éthique et de conformité Finegan. Toutefois, l’essor de l’éthique des affaires en France doit beaucoup à l’impulsion de la Loi Sapin 2, du RGPD et de la loi sur le devoir de vigilance, et constitue désormais un véritable avantage concurrentiel pour les entreprises françaises qui ont anticipé cette évolution, souligne Finegan.
« La complexité de la réglementation et sa mise en œuvre constitue l’un des premiers obstacles de la conformité, confie Jean-Baptiste Siproudhis, associé Finegan. Le défi pour les entreprises est de filtrer les textes pour les traduire en bons réflexes des collaborateurs exposés ». Comment faire ? « Notre objectif n’est pas de multiplier des procédures de conformité dans l’entreprise, qui ne fera que créer un nouveau niveau de complexité, mais de définir et embarquer la compliance directement dans ses processus opérationnels clés : achats, ventes, finance, RH, R&D », poursuit Jean-Baptiste Siproudhis.
Une des principales sources de progrès des entreprises françaises en matière de compliance reste le respect des règles de concurrence, dont le risque est souvent sous-évalué jusqu’au prononcé de sanctions particulièrement sévères. L’Autorité de la Concurrence française a été parmi les premiers régulateurs à promouvoir la compliance en février 2012 puis a par la suite désinvesti le sujet, regrette Jean-Baptiste Siproudhis, à la différence de l’Agence française anticorruption (AFA), très prolixe en doctrine de compliance anticorruption. Finegan suggère à l’AFA de poursuivre ce travail pédagogique en ciblant les populations les plus exposées au sein des entités publiques comme privées.
Les droits humains doivent être scrutés de près
Les sujets des droits humains montent également en puissance, avec le projet de directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité et le projet de règlement européen interdisant les produits issus du travail forcé, souligne Finegan, qui invite les entreprises françaises à anticiper cette évolution en renforçant leur dispositif de conformité, en y impliquant en premier lieu leurs directions des achats.
L’utilisation des sanctions internationales dans la régulation des conflits, à l’instar de celles contre la Russie, pourrait se multiplier dans les années à venir et nécessite que les entreprises anticipent et n’agissent pas dans l’urgence. D’autant que « le respect ou non de la conformité peut entraîner des distorsions de concurrence, note Finegan. Ce pourrait être un sujet de surveillance des autorités de la concurrence ».
Autre axe d’amélioration pour les sociétés, la vigilance dans le recrutement. « Très peu d’entreprises réalisent des diligences sur le profil de candidats pour des postes à risques, comme un directeur export dans un pays où la corruption est élevée, constate Jean-Baptiste Siproudhis. Les vérifications doivent intervenir dans le cadre du processus de recrutement ».
Donner les moyens nécessaires au compliance officer
Aussi, le rôle du compliance officer est particulièrement stratégique pour la mise en place des processus anti-corruption. « Le responsable de la conformité ne doit pas nécessairement être un juriste, un profil d’ingénieur convient aussi, souligne Jean-Baptiste Siproudhis. Il doit avant tout bénéficier d’une indépendance opérationnelle et de moyens – en particulier dans l’industrie et le services – et avoir accès au conseil d’administration. Le rattachement au comité exécutif ne suffit pas. L’indice de la sincérité de la direction est souvent l’enveloppe de fonds alloués à la RSE et à la conformité. Nous sommes encore loin de cette maturité en France, mais en progrès, notamment grâce à l’action de l’AFA et des investisseurs, en particulier américains et britanniques, de plus en plus exigeants sur la robustesse du système de conformité ».
Par ailleurs, l’importance du risque cyber nécessite de créer une collaboration renforcée entre la direction des Systèmes d’Information (DSI) et celle de l’Ethique et de la Conformité. Les DSI doivent s’appuyer sur la méthodologie et l’organisation de la conformité pour faire mieux infuser la prévention du risque cyber (cartographie des risques, code de conduite, formations, contrôle et évaluation des tiers, etc.), recommande Finegan.
Plus d'articles Réglementation
-
Dominique Laboureix : «Il faut rester pragmatique dans la gestion des crises bancaires»
Dans un entretien exclusif à L'Agefi, Dominique Laboureix, président du Conseil de résolution unique européen depuis fin novembre, juge que la gestion des crises SVB et Credit Suisse ne remet pas en cause le modèle européen. -
Rome utilise ses pouvoirs spéciaux pour faire barrage à Yandex
Giorgia Meloni a interdit l’acquisition de la société Tecnologia Intelligente par le néerlandais Nebius qui a des liens avec le groupe internet russe. -
Le régulateur helvète tente de se justifier dans le cas Credit Suisse
La Finma prend ses précautions pour essayer de dissuader les recours qui se préparent sur le sort réservé aux dettes subordonnées AT1.
Contenu de nos partenaires
- La Société Générale présente sa nouvelle direction autour de Slawomir Krupa
- Credit Suisse entraîne le secteur bancaire européen dans sa chute
- Les actions chutent avec les banques américaines
- L’électrochoc SVB met la finance sous tension
- Credit Suisse, trois ans de descente aux enfers
- Les gérants prennent la mesure de la persistance de l’inflation
- Silicon Valley Bank : la chute éclair de la banque des start-up
- UBS prend une place hors norme en absorbant Credit Suisse
- Slawomir Krupa sort la Société Générale du brouillard
-
Happy end
Sahel: l'otage français Olivier Dubois libéré grâce à la médiation du Niger
Selon les informations en provenance de Niamey, la France semble avoir sous-traité la libération du journaliste français à son partenaire du Niger -
Régime sec
Amazon supprime 9000 emplois supplémentaires
Le géant du commerce en ligne aura ainsi supprimé un total de 27 000 postes au cours des derniers mois, soit 9% de son effectif -
Marges de manœuvre
Après le 49.3 : le « Maître des horloges » perdu dans l’espace-temps
« Tel est bien l’enseignement de ce 49.3 : tout ce qu’Emmanuel Macron prétendait dépasser nourrit aujourd’hui l’engluement de sa propre gouvernance. »