L’« open banking » ou comment industrialiser la collaboration

Pour offrir de nouveaux services, les banques sont prêtes à travailler avec des fintech, mais des obstacles techniques et culturels restent à surmonter.
Alexandra Oubrier

La mise en œuvre de l’open banking est lancée. Le mouvement est encore naissant mais la start-up Particeep, qui organisait récemment une matinée sur le sujet, a montré que les intérêts technologiques et commerciaux se clarifiaient. La jeune pousse a d’ailleurs remanié sa plate-forme de commercialisation de produits financiers pour mettre à la disposition des acteurs financiers 240 web services accessibles par des API (interfaces de programmation). Une granularité nécessaire pour que chacun puisse créer son propre parcours et bâtir son offre à sa façon, intégrant juste les briques souhaitées, sans utiliser la totalité de la plate-forme. «Il s’agit de rendre accessibles les données clients, le référentiel produit et la tarification pour permettre une distribution ouverte et intermédiée», a expliqué Steve Fogue, fondateur de Particeep, avant d’énumérer les bénéfices technologiques, économiques et commerciaux liés à l’innovation d’une telle architecture. Ainsi, l’usage d’API dans une stratégie de digitalisation offre de l’agilité à des systèmes d’information complexes et rigides et permettent de créer de nouvelles offres fondées sur l’exploitation des données clients et de les tester en s’interfaçant avec différents partenaires. Elles contribuent également à créer de nouvelles activités qui peuvent génèrer des revenus et à baisser les coûts opérationnels sur certaines phases jusqu’alors coûteuses, comme l’entrée en relation et le KYC ou know your customer, rendu plus simple et plus rapide.

Précurseur de l’open banking, Crédit Mutuel Arkéa s’est depuis dix ans positionné comme prestataire de services pour les autres acteurs de la banque-finance et réalise ainsi près de 25 % de son chiffre d’affaires. Ce succès repose sur un changement complet : «Il a fallu adopter une logique de prestation de services avec des engagements et des pénalités en cas de non respect, a souligné Anne-Laure Navéos, en charge des investissements stratégiques d’Arkéa. Au départ, nous avons ouvert notre core banking system à nos clients. Aujourd’hui, l’open banking consiste à offrir des services beaucoup plus verticaux, et donc à détricoter nos systèmes d’information très intégrés pour les rendre accessibles via des API, en commençant par les systèmes de front office, comme nous l’avons fait avec Fortuneo. Mais pour offrir du temps réel, il est nécessaire d’entrer plus profondément dans les sytèmes d’information, ce qui nous a conduit à reconstruire nos plates-formes par métier séparées les unes des autres.» Le modèle économique de ce positionnement n’est pas encore totalement maîtrisé mais Arkéa a investi dans de nombreuses fintech pour contribuer à ouvrir le marché français.

Convergence stratégique

Parmi les facilitateurs, l’agrégateur de comptes Linxo propose Linxo Market, une place de marché d’API qui «permet à d’autres de créer de la valeur à partir de l’accès que nous leur donnons aux comptes des clients, a expliqué Christophe Martins, directeur général de Linxo. Nous générons ainsi des revenus en apportant des clients à des tiers et en offrant de la productivité.» La valeur vient de l’accès fluide et en toute conformité à des données fiables pouvant être utilisées pour créer d’autres services. Pourtant, il n’est pas facile de collaborer avec les grands groupes bancaires pour une start-up, une question de rapport au temps et de vision stratégique pas toujours partagés. Certains y parviennent, comme Clément Cœurdeuil, fondateur de Budget Insight, un autre agrégateur : «Nous avons un intérêt évident à travailler ensemble car nos services sont accessibles beaucoup plus vite et pour beaucoup moins cher que s’ils étaient développés par une banque. C’est à nous de montrer que l’on peut générer du trafic et attirer des clients, comme nous l’avons fait avec ING et Kabbage pour proposer de l’instant lending.» L’enjeu devient alors d’industrialiser les prototypes. BPCE a ainsi expliqué avoir revu ses processus pour sélectionner les start-up avec lesquelles elle souhaite travailler afin de gagner du temps et d’aboutir plus sûrement. La banque, qui a choisi de devenir une plate-forme de services, lancera en septembre sa place de marché d’API sur laquelle elle vendra ses propres services ainsi que ceux de tiers, afin de créer une nouvelle source de revenus.

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