
François Villeroy de Galhau siffle la fin des querelles autour des règles Bâle 3

La réponse du berger à la bergère. Deux semaines après que la Fédération bancaire française (FBF) a renouvelé ses critiques sur la transposition de Bâle 3 en Europe, appelant à préserver sa capacité à financer l’économie, leur tutelle a réaffirmé son soutien à la proposition législative de Bruxelles. Cette dernière «prend pleinement en compte les spécificités européennes et prévoit un délai suffisant, d’ici à 2032, pour l’adaptation aux nouvelles caractéristiques de supervision», a rappelé, mardi, François Villeroy de Galhau, le président de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), à l’occasion de la publication du rapport annuel du superviseur.
Balayant d’un revers de main les craintes des banques françaises, François Villeroy de Galhau estime que «Bâle 3 ne fait pas peser de menace sur le crédit immobilier à la française». Et de rappeler que, dès les premières discussions, en 2011, les caractéristiques de ce marché, comme le recours au cautionnement, ont été «reconnues et sanctuarisées».
Des dérogations qui doivent rester «transitoires»
La proposition de directive présentée par Bruxelles, à l’automne dernier, prévoit d’introduire progressivement un nouveau plancher en capital, ou «output floor», dont la méthode de calcul aura pour effet de limiter le recours aux modèles internes, plus économes en fonds propres. Une méthode fortement contestée par les banques européennes, et notamment les françaises, qui craignent d’être désavantagées par rapport à leurs concurrentes américaines.
Elles appellent également à ce que ce calcul ne pénalise pas le crédit immobilier à faible risque ni le financement des PME non cotées. Bruxelles a ainsi consenti à l’adoption de dispositions transitoires qui permettront d’appliquer un plus faible calibrage à ce type d’expositions. Pour François Villeroy de Galhau, toute nouvelle «querelle» au sujet de la transposition de Bâle 3 est donc vaine et inutile. Et de marteler que ces dérogations «doivent impérativement rester transitoires. Toute tentation de les pérenniser remettrait en cause notre engagement, la crédibilité internationale de la France et de l’Europe».
Les critiques «surprenantes» des banques françaises
Le président de l’ACPR s’est également armé d’ironie pour faire taire les critiques récurrentes des banques françaises sur la réglementation prudentielle, accusée de brider leur capacité à financer ménages et entreprises. Des déclarations «surprenantes», a-t-il pointé, alors même que les chiffres prouvent le contraire : les crédits aux PME ont crû de 4% l’an dernier et les crédits à l’habitat des ménages de 6%. «Cela fait dix ans que l’on entend ce discours selon lequel Bâle 3 va empêcher le bon financement de l’économie française. Depuis les premiers avertissements, en 2011, cette restriction supposée sur les crédits ne s’est pas réalisée de manière éclatante !», a relevé François Villeroy de Galhau. Au contraire, selon lui, «la France et l’Europe ont tout à gagner à un Bâle 3 stabilisé et équilibré». Les banques françaises affirment, quant à elles, que ces contraintes réglementaires les ont poussées à être plus sélectives en délaissant certains segments de l’économie, ce qui ne peut se refléter dans des moyennes statistiques.
Le président de l’ACPR a, en revanche, trouvé un terrain d’entente avec les banques françaises : le calcul de l’output floor doit tenir compte de l’existence d’un marché bancaire européen en étant appliqué sur une base consolidée aux groupes bancaires multinationaux qui ont des filiales ou succursales dans d’autres pays de l’Union européenne. Cette proposition de la Commission européenne, soutenue par la Banque centrale européenne (BCE) et le Trésor français, n’a pas les faveurs des pays «hôtes» dans lesquels les grands groupes bancaires européens – en première ligne, les banques françaises – sont implantés. Lors de la réunion de l’Ecofin en novembre dernier, les ministres des Finances de la Belgique, de la Lituanie, de la Slovaquie et du Portugal n’ont pas caché leurs réticences vis-à-vis de cette disposition, craignant que leurs banques locales ne soient pas assez capitalisées. Une résistance qualifiée par François Villeroy de Galhau de «protectionnisme nuisible».
Alors que le paquet bancaire de la Commission européenne est maintenant discuté au sein du Parlement et du Conseil des chefs d’Etat, la position des autorités françaises est claire : il faut achever Bâle 3 sans tarder.
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