
Franck Le Vallois (FFA) : «Taxer les assureurs, c’est taxer toute la société»

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2021 a été adopté mardi 8 décembre au Sénat. Il porte désormais des propositions visant les assureurs : une couverture des risques sanitaires exceptionnels et une nouvelle taxe. Le gouvernement ne les soutiendrait pas. En cas de désaccord persistant, le texte reviendrait en lecture définitive à l’Assemblée nationale qui aurait le dernier mot. Franck Le Vallois, nommé directeur général de la Fédération française de l’assurance (FFA) en novembre, éclaire les enjeux pour le secteur. En exclusivité.
L’Agefi : Quels sont les «travaux» que le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, vous a demandé de finaliser «d’ici le début de l’année 2021 en vue d’assurer une couverture des risques sanitaires exceptionnels» ?
Franck Le Vallois : La mise en œuvre d’un régime de couverture des catastrophes sanitaires dans le cadre d’un partenariat public-privé est différée. En attendant, il s’agit de travailler à une solution permettant aux entreprises qui le souhaitent de se constituer un matelas de sécurité susceptible de faire face aux effets d’un événement comparable à la pandémie Covid-19. Les travaux commenceront dans les prochains jours.
Pourquoi la FFA a-t-elle fait évoluer sa proposition de régime de catastrophe sanitaire ?
Comme nous l’avons dit dès le début de la crise sanitaire, le risque pandémique n’est pas assurable par les seuls assureurs et réassureurs privés. Au départ, la FFA a présenté une proposition de dispositif assurantiel pour couvrir au travers d’un «capital résilience» les entreprises contre les conséquences économiques consécutives à une fermeture collective qui leur serait imposée par les pouvoirs publics à la suite d’une pandémie.
Après de nombreux échanges avec les différentes parties prenantes, nous avons pris en compte les remarques des uns et des autres, et publié une nouvelle mouture en novembre. Ce dispositif serait une extension obligatoire à toute garantie «incendie» souscrite par l’entreprise dans le cadre de son contrat multirisques. Ce caractère obligatoire vise à avoir l’assiette la plus large afin de bien mutualiser un tel risque, comme c’est déjà le cas dans le régime des catastrophes naturelles.
Mais tant que la crise sanitaire perdure, le gouvernement a estimé délicat d’imposer un accroissement obligatoire des charges des entreprises pour financer un tel régime. Ce partenariat public-privé constituerait une réelle avancée pour les entreprises. Pour s’adapter aux besoins des plus grandes d’entre elles, au-delà d’un chiffre d’affaires de 20 millions d’euros, le dispositif proposé plafonnerait le montant de primes et celui des prestations.
Si «en ce monde rien n’est certain, à part la mort et les impôts», peut-on exclure une autre taxe sur les assureurs ?
Dans le cadre du projet de loi de finances 2021, le Sénat a adopté une mesure de taxation de l’assurance dommages à hauteur de 1,2 milliard d’euros. Les assureurs ont déjà dû contribuer aux dépenses exceptionnelles de santé liées au Covid-19 à hauteur de 1,5 milliard d’euros. Cependant les taxer, c’est taxer toute la société, et notamment parce que la profession contribue au financement de l’économie du pays. Pour éviter cette nouvelle taxation, le ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance a demandé aux assureurs de soutenir encore davantage les secteurs hôtel, café, restaurant, culture, sport, tourisme et événementiel. L’immense majorité des assureurs a d’ores et déjà répondu positivement à Bruno Le Maire. La décision revient in fine aux parlementaires.
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Climat : l'augmentation des canicules est liée aux émissions des producteurs d'énergies fossiles, selon des scientifiques
Paris - Le changement climatique a rendu les vagues de chaleur de ces deux dernières décennies plus probables et plus intenses, et les producteurs d'énergies fossiles et de ciment ont «significativement» contribué à cette tendance, conclut une étude publiée mercredi dans Nature. Ses auteurs, une équipe internationale, ont innové en se penchant sur une série de 213 canicules dans le monde durant la période 2000-2023. Ils ont aussi voulu s’intéresser plus particulièrement au rôle des grandes entreprises de production d'énergies fossiles et de ciment, émettrices de gaz à effet de serre. Les études d’attribution consistent généralement à mesurer le degré d’influence du changement climatique sur un événement météorologique extrême particulier. La singularité de cette étude est de passer en revue plusieurs épisodes. «Plus intenses et probables» «Cet article montre que le changement climatique a rendu plus de 200 vagues de chaleur plus intenses et plus probables, et que cette influence augmente», explique à l’AFP Yann Quilcaille, de l’ETH Zurich, auteur principal de l'étude. «Ensuite, nous montrons que les émissions associées aux plus gros producteurs d’énergies fossiles et de ciment contribuent significativement aux vagues de chaleur», souligne-t-il. Le changement climatique d’origine humaine a non seulement rendu les canicules plus probables mais, pour un quart d’entre elles (55 sur 213), cette probabilité a été augmentée d’au moins 10.000 fois. Autrement dit, elles auraient été quasiment impossibles sans le réchauffement du climat. L’influence de ce changement du climat se renforce fortement avec le temps: il a rendu les canicules 20 fois plus probables entre 2000 et 2009, et 200 fois plus probables entre 2010 et 2019. Les scientifiques ont ensuite voulu comprendre le rôle des 180 plus grosses entreprises productrices d'énergies fossiles et de ciment dans cette tendance. Pour leurs calculs, ils ont pris en compte toute la chaîne de valeur des entreprises et l’utilisation par les clients des produits qu’elles commercialisent. Ils ont par exemple attribué à chaque groupe pétrolier les émissions associées à l’essence qu’il a vendue, lorsqu’elle a ensuite été utilisée dans les voitures. Litiges en plein essor Résultat: les émissions liées à ces grandes entreprises ont contribué pour moitié à l’augmentation de l’intensité des canicules par rapport à l'ère pré-industrielle et ont aussi augmenté leur probabilité. Le rôle des 14 plus grosses «majors» (dont Saudi Aramco, Gazprom, Chevron ou BP) apparaît comme très important, pesant autant que les 166 autres entreprises étudiées, dont le rôle n’est pas négligeable pour autant. «Chaque producteur peut être suffisant à lui seul pour rendre possible des vagues de chaleur qui auraient été quasiment impossibles sans changement climatique», souligne Yann Quilcaille. Pascal Yiou, du Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE), qui n’a pas participé à l'étude, y voit «un résumé de l'état de l’art actuel sur l’attribution des vagues de chaleur», relativisant auprès de l’AFP sa dimension innovante. Karsten Haustein, de l’université de Leipzig, juge pour sa part, dans un commentaire publié par Nature, qu’il s’agit d’un «bond en avant» qui peut être utile pour la justice et la diplomatie climatiques. Les auteurs concluent que l'étude pourrait «renforcer» le rôle de la science de l’attribution devant les tribunaux, alors que le nombre de litiges augmente. Dans un dossier emblématique, un paysan péruvien avait par exemple poursuivi l'énergéticien allemand RWE, l’accusant d'être indirectement responsable de la fonte d’un glacier proche de sa maison. La justice allemande a reconnu fin mai le principe d’une responsabilité mondiale des énergéticiens dans les dommages liés au changement climatique. Ces poursuites «visant des entreprises sont en plein essor, avec des procès contre RWE, Exxon, Shell, Chevron, Holcim, etc. Ces procès se basent souvent sur des résultats scientifiques dépassés, sans les derniers progrès, mais c’est en train de changer», juge Yann Quilcaille. «Le but de notre (étude) est scientifique» mais «nous sommes conscients de son potentiel» pour éclairer ces dossiers, indique le chercheur. © Agence France-Presse -
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