
Dans la finance aussi, les employeurs peinent à recruter

Les employeurs sont sur le gril. D’une part, la sortie de crise a généré des tensions sur le marché du travail créant ainsi « des opportunités pour les salariés déjà en poste », note la Dares dans une enquête publiée le 18 août. Et si l’on croit la dernière étude de l’éditeur RH iCIMS, intitulée « Promo Covid », parue le 25 août, les jeunes, y compris dans la finance, ne sont plus aussi pressés de décrocher un emploi fixe, préférant continuer à muscler leurs compétences avec une poursuite d’étude ou des stages. D’autre part, les aspirations des candidats ont changé. Dans un contexte d’urgence environnementale, une poignée de jeunes diplômés culottés n’hésitent même plus à dire tout haut ce que d’autres pensent tout bas du secteur pour lequel ils ont été formés. Lors de la dernière cérémonie de remise des diplômes à HEC, après celle d’AgroParisTech, le système financier en a pris pour son grade.
Sens et qualité de vie au travail
La crise sanitaire a surtout précipité un changement de point de vue des (futurs) salariés sur la relation au travail. D’où une nécessaire réflexion des entreprises sur leur attractivité. « Nous entrons dans une nouvelle ère où les recruteurs vont vraiment se faire la guerre », confirme Frédéric Pauthier, directeur des ressources humaines et affaires générales de la MGEN, acteur mutualiste de la protection sociale et de la santé comptant près de 10.000 salariés (groupe Vyv).
Frédéric Zeitoun, directeur général en charge de la politique « People & Culture » de Grant Thornton (2.000 salariés en France), le reconnaît : « Ces vingt dernières années, les cabinets d’audit et de conseil ont constitué une voie formatrice et structurante pour de jeunes diplômés qui s’en servaient comme d’un tremplin pour la suite de leur carrière. Mais depuis quatre ou cinq ans, nous percevons une certaine désaffection pour les modèles trop productivistes, ainsi que le désir d’une meilleure qualité de vie au travail. »
Une situation qui, couplée au fort taux de turnover du secteur, est devenue critique pour tous ses acteurs – dont « certains se voient contraints de refuser des missions », soutient-il. Grant Thornton a donc pris le taureau par les cornes. Et fait appel à un cabinet de conseil spécialisé pour concevoir une marque employeur correspondant aux attentes de ses collaborateurs présents et à venir. Dévoilée en avril 2021, cette nouvelle identité met en avant « l’expérience de la confiance ». « Tout en faisant écho à notre business car nous sommes, en tant qu’experts comptables, commissaires aux comptes, etc., des tiers de confiance pour nos clients, cette guideline répond au besoin d’autonomie dans la réalisation du travail, désormais flexible, et à la quête de sens exprimée tant par nos collaborateurs que par les étudiants. »
Grant Thornton a aussi travaillé sur les comportements des managers, les entretiens professionnels, l’équité des processus RH, la bienveillance et le sens des missions effectuées par l’entreprise. « Il n’est plus question, pour nos collaborateurs d’enchaîner les journées de travail, mais de comprendre comment nous créons de la valeur pour nos clients et sécurisons la vie économique », expose Frédéric Zeitoun.
L’entreprise d’audit et de conseil vient par ailleurs de lancer sa « Master Academy ». Cet ambitieux programme de développement des compétences comprend un parcours professionnel interne axé sur la pluridisciplinarité, qui permet aux collaborateurs de se frotter aux différents métiers du groupe. Et un programme de formation académique certifiant, en partenariat avec l’Essec, dont l’objectif est de favoriser leur adaptation aux nouveaux enjeux économiques, écologiques et géopolitiques. Une pièce maîtresse de la politique de rétention des talents.
Adoption mutuelle
A la MGEN aussi, on a mis les bouchées doubles. Car « recruter n’a jamais été aussi difficile, tant sur les métiers du soin que sur ceux de l’assurance », admet Frédéric Pauthier. Mise en sommeil, la problématique de l’attractivité a été reprise en main il y a deux ans, à travers une réflexion menée avec les collaborateurs, dirigeants, administrateurs et adhérents. De quoi nourrir les travaux sur la raison d’être de l’entreprise et alimenter le cahier des charges de la nouvelle campagne de communication – confiée à Havas – destinée à soutenir le plan de recrutement 2022 : plus de 1.000 embauches prévues, dont 700 dans le secteur assurantiel.
Le résultat ? « Employez-nous ! » (photo d’illustration). Simple et efficace, le slogan interpelle les recrues potentielles, en permettant à la MGEN de développer le contenu de sa « promesse employeur » : donner du sens aux carrières, aider les salariés à se réaliser professionnellement et personnellement, les plonger au cœur de l’innovation, etc. « Nous voulions que cette campagne soit à l’image de ce que nous sommes », souligne Frédéric Pauthier, qui se dit fier du résultat. « Non seulement elle est incarnée par douze de nos collaborateurs (en affiches et capsules vidéo) qui parlent de ce qu’ils vivent dans l’entreprise, mais nous avons réussi à retranscrire la nouvelle réalité du marché de l’emploi : c’est aussi à l’entreprise de se faire recruter par le candidat. Pour se choisir, il faut être deux, c’est une adoption mutuelle. »
Lancée en juin dernier sur les réseaux sociaux pour capter l’attention des jeunes diplômés, la campagne doit être déclinée dans la presse à l’automne. Selon le DRH, elle a rapidement fait mouche, y compris en interne. En juillet, les vidéos de la campagne ont cumulé plus de 800.000 vues, et des échanges s’opéraient déjà sur LinkedIn avec ces nouveaux ambassadeurs de la marque employeur.
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Boulogne-sur-Mer - «Une nuit comme on n’en avait pas vécu depuis plusieurs mois": trois migrants sont morts et trois autres ont disparu lors de deux tentatives distinctes de traversée de la Manche dans la nuit de mardi à mercredi. Vers 22H00 mardi soir au large de Neufchâtel-Hardelot, «un pêcheur a signalé à la gendarmerie que des personnes étaient en détresse sur un bateau qui était proche de la côte», a indiqué le préfet du Pas-de-Calais, Laurent Touvet, lors d’un point-presse au port de Boulogne-sur-Mer. «Une personne a pu être réanimée par les gendarmes alors qu’elle était en train de se noyer», a-t-il précisé, mais «un peu plus tard, on a entendu des cris dans la mer de personnes plus éloignées (...), vraisemblablement trois disparus». Aux alentours de 5H00 du matin, le remorqueur Abeille Normandie a ramené au port de Boulogne-sur-Mer «un groupe de naufragés» secourus en mer. Parmi les naufragés figurent trois personnes décédées, «vraisemblablement écrasées au fond du bateau», a encore indiqué le préfet, tandis que trois autres personnes ont été hélitreuillées «directement vers l’hôpital de Boulogne». Selon les premiers éléments à sa disposition, «deux personnes (décédées) seraient d’origine du sud-est asiatique et une serait plutôt égyptienne, et ce sont des personnes jeunes (...) peut-être deux mineurs». Il s’agirait d’une femme et de deux hommes, a-t-il ajouté. Cela porte à au moins 23 le nombre de décès survenus lors de telles tentatives depuis le début de l’année, selon un comptage de l’AFP à partir de données officielles. Une enquête a été confiée à la police aux frontières et à la gendarmerie maritime, a déclaré la procureure de Boulogne-sur-Mer Cécile Gressier. Les personnes prises en charge «sont entendues pour identifier leur rôle, ce sont a minima des témoins, des victimes de ces réseaux qui sont entendues pour pouvoir identifier l’organisation criminelle des passeurs qui sont derrière ces opérations», a ajouté la procureure. 115 personnes sur un bateau C’est «une nuit comme on n’en avait pas vécu depuis plusieurs mois», a déploré le préfet, qui a cependant souligné que «le bilan aurait pu être beaucoup, beaucoup plus lourd": un bateau en difficulté a été secouru avec 115 personnes à bord, probablement un «record» pour une embarcation clandestine dans la région, selon Laurent Touvet. Ces traversées très périlleuses se font avec des canots pneumatiques de quelques mètres de long surnommés «small boats», souvent surchargés et à bord desquels beaucoup de passagers n’ont pas de gilets de sauvetage. Plus de 30.000 personnes sont arrivées de la sorte sur les côtes anglaises depuis début janvier selon le ministère de l’Intérieur britannique, un chiffre record à ce stade de l’année. La seule journée de samedi a vu 17 embarcations et plus de 1.000 migrants réussir la traversée, toujours selon les autorités britanniques. Mardi, une femme migrante a été déclarée décédée sur le rivage britannique à l’issue d’une tentative de traversée, selon la police du Kent (sud-est de l’Angleterre). Depuis son élection en juillet 2024, le gouvernement du travailliste Keir Starmer a multiplié les initiatives pour tenter de limiter les arrivées au Royaume-Uni, mais il peine à endiguer ce phénomène. Sa nouvelle ministre de l’Intérieur Shabana Mahmood, nommée vendredi, a promis que des expulsions de migrants vers la France, prévues dans le cadre d’un accord bilatéral entré en vigueur en août et censé avoir un effet dissuasif sur les traversées clandestines, débuteraient «de manière imminente». Londres a assuré début août avoir commencé à placer en détention des migrants arrivés par «small boats» dans le cadre de cet accord aux contours encore flous, régulièrement dénoncé par les associations. Jérôme NOËL avec le bureau de Lille © Agence France-Presse -
Olivier Faure demande à Sébastien Lecornu de « renoncer au 49.3 » pour démontrer un changement de méthode
Paris - Le patron du Parti socialiste Olivier Faure a demandé mercredi au nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu de renoncer à utiliser l’article 49.3 de la Constitution, permettant l’adoption d’un texte sans vote de l’Assemblée, pour démontrer «que la méthode change» par rapport aux précédents gouvernements. Sur franceinfo, M. Faure a affirmé qu’il n’y avait «aucun scénario où le Parti socialiste participe à l'équipe gouvernementale», et a affirmé qu’il ne refusait pas de discuter avec le nouveau chef de gouvernement, mais qu’il refusait de lui donner «un chèque en blanc» sans savoir ce qu’il fera notamment en matière budgétaire. «Je ne veux pas une plateforme commune qui nous amènerait à gouverner ensemble. Nous ne gouvernerons pas ensemble», a-t-il répété. S’il a «le sentiment que nous sommes baladés» et si la réponse du gouvernement «est une réponse qui est la même que celle qui est formulée depuis huit ans, alors je censurerai et donc nous irons vraisemblablement vers une dissolution», a-t-il prévenu. Le premier secrétaire a estimé que c'était au Premier ministre «de dire ce qu’il prend dans ce que nous avons proposé». Le Parti socialiste a présenté fin août à Blois un budget alternatif, proposant notamment de revenir sur la réforme des retraites et de mettre en place une taxe Zucman sur les plus hauts patrimoines. «Je refuse toute forme de budget qui irait chercher à prélever des économies sur les malades, sur les chômeurs, sur les travailleurs, sur les jeunes, sur les retraités, comme c'était le cas précédemment», a insisté M. Faure, estimant que la taxe Zucman sur les hauts patrimoines faisait partie «des réponses possibles» que pouvait donner M. Lecornu. Olivier Faure, qui réclamait un Premier ministre de gauche pour remplacer François Bayrou, renversé lundi lors d’un vote de confiance, a estimé que la nomination de Sébastien Lecornu n'était «pas une surprise, même s’il y a de l’incompréhension». «Au fond, Sébastien Lecornu à Matignon, c’est Emmanuel Macron à Matignon, c’est les mêmes», a-t-il asséné, rappelant qu’ils ont «tout entrepris ensemble depuis huit ans». © Agence France-Presse -
« Bloquons tout » : des premières actions mais des forces de l'ordre très présentes
Paris - Des premières actions ont essaimé mercredi, à l’appel de «Bloquons tout», une mobilisation citoyenne née sur les réseaux sociaux, mais elles semblent contenues, en raison notamment de la forte mobilisation des forces de l’ordre. Réforme des retraites, budget, choix du Premier ministre... «Il n’y a rien qui va», lâche Chloé, étudiante en master de 25 ans qui n’a pas souhaité donner son nom, devant un point de blocage à l’entrée du campus Paul-Sabatier de l’Université de Toulouse. «Les classes populaires sont celles qui prennent le plus et des gens qui se tuent au travail doivent encore plus rogner sur leur bien-être pour pouvoir faire passer le budget alors qu’il y aurait eu d’autres alternatives», explique-t-elle. Un peu partout sur le territoire, des actions ont été lancées mais sans toucher des cibles stratégiques mais elles se sont heurtées le plus souvent à l’action préventive des forces de l’ordre, comme par exemple à Marseille, où, prépositionnées à l’avance, elles ont empêché 200 personnes d’accéder à l’autoroute venant de Toulon. Dès 5h30 ce matin, une trentaine de personnes ont ainsi bloqué un rond-point d’accès à une zone commerciale, sur la commune de Petite Forêt près de Valenciennes dans le Nord. «Plus de révolutionnaires sur Facebook» "Évidemment, l’opération était un peu secrète pour ne pas être pris de vitesse par les forces de l’ordre. L’idée, c'était de surprendre aussi», explique Cédric Brun, tourneur-fraiseur et secrétaire général CGT chez PSA Valenciennes, âgé de 46 ans. Mais le rassemblement n’a pas eu le succès espéré: «On pensait être plus nombreux», regrette-t-il. «Ce qui est malheureux, c’est qu’il y a plus de révolutionnaires sur Facebook que dans la réalité». Le ministre de l’Intérieur démissionnaire Bruno Retailleau avait annoncé la couleur tôt depuis Rungis, rappelant que «80.000 gendarmes et policiers» étaient sur le pont en France, dont 6.000 à Paris, avec la consigne «de ne pas tolérer de violence, de dégradation, de blocage, d’occupation des infrastructures essentielles de notre nation». A 09H30, la gendarmerie nationale décomptait 154 actions dans sa zone, pour environ 4.000 manifestants. La préfecture de police de Paris a fait état de 95 interpellations dans l’agglomération parisienne, selon le dernier bilan disponible. Huit arrestations ont été menées en province. Une cellule interministérielle de crise (CIC) se tient depuis 09H00 au ministère de l’Intérieur. Une première action spectaculaire s’est déroulée à Caen, où des manifestants ont mis le feu à des objets sur le viaduc de Calix près de Caen, a constaté une photographe de l’AFP. Pour le reste, les forces de l’ordre ont le plus souvent procédé à de rapides déblocages, comme à Bordeaux sur l’un des dépôts du réseau de tramways. Lycées bloqués Plusieurs lycées ont ponctuellement été touchés par des blocages, notamment à Paris, à Montpellier à et Rennes. Des mobilisations étudiantes ont été recensées à Paris, Rennes, Grenoble, Montpellier, Lyon, Mulhouse et Nice, selon l’Union étudiante. «Bloquer notre lycée, c’est bloquer l’Education nationale, ça représente l'éducation comme la veut Macron», témoigne Lucia, 17 ans et en première au lycée Claude Monet dans le 13e. Côté transports, la gendarmerie décomptait 18 actions de blocages d’axes mais les perturbations dans les transports en commun de la capitale, sont «conformes aux prévisions», ont indiqué à l’AFP la RATP et la SNCF. Ce mouvement horizontal, né sur les réseaux sociaux et sans chef de file identifié, rappelle celui des Gilets jaunes, il y a sept ans, mais rassemble des personnes plus jeunes et plus politisées, selon une enquête de la fondation Jean Jaurès. Il conteste les mesures d'économie annoncées mi-juillet par François Bayrou et rejette les classes dirigeantes, en particulier Emmanuel Macron. Il est partiellement soutenu par les syndicats. La CGT et Solidaires ont appelé à le rejoindre quand la CFDT et FO, notamment, ont préféré se concentrer sur la journée intersyndicale du 18, ce qui n’empêche pas certaines sections de se mobiliser notamment à La Rochelle où des agents territoriaux bloquent le dépôt de la propreté urbaine ou à Anglet (Pyrénées-Atlantiques) où la CGT tient un piquet de grève devant Dassault. La convergence des colères se fait aussi, partiellement, avec celle du monde agricole. La Confédération paysanne, 3e syndicat agricole français, a annoncé sa participation. «Je suis très en colère de la politique qui a été menée», confie le porte-parole de la Confédération paysanne en Côte-d’Or, Thomas Maurice, qui manifestera mercredi après-midi à Dijon. Béatrice JOANNIS © Agence France-Presse