
Bercy va libérer les captives d’assurance

Pas moins de cinquante sociétés françaises sont, selon Olivier Wild, l’« arme au pied » avec un projet de création de captive de (ré)assurance. Un chiffre révélé par ses adhérents au président de l’Association pour le management des risques et des assurances de l’entreprise (Amrae). L’arme au pied car les trois quarts de ces projets (cinq fois plus nombreux que les années précédentes, selon l’Amrae) n’attendraient qu’une chose pour se concrétiser : que les conditions de domiciliation en France de cette structure d’auto-assurance deviennent plus attractives pour ne pas avoir à choisir de l’implanter ailleurs. D’abord au Luxembourg ou en Irlande : une centaine de sociétés françaises disposent aujourd’hui d’une captive… dont une poignée seulement logées en France.
Un environnement de marché propice explique que tant de candidats indécis se pressent : les sociétés en subissent depuis deux ans un retournement, exacerbé par la pandémie, caractérisé par un durcissement des modalités d’assurance externe, poussant par ricochet la solution interne de la captive. Et les candidats s’interrogent sur le domicile car le ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire, a donné fin 2020 un coup de pouce aux efforts de place en appelant de ses vœux la possibilité pour les entreprises de « se constituer des provisions qui bénéficieront d’un régime fiscal particulièrement avantageux » afin de « mettre de l’argent de côté » en cas de coup dur.
De fait, si le sujet va au-delà et concerne fondamentalement la gestion des risques, la fiscalité occupe un rôle clé. Elle est inhérente aux conditions de provisionnement. Pour éviter de prêter le flanc aux accusations de niche fiscale, il convient de trouver le juste équilibre, favoriser tout en respectant la saine gestion des risques. Autoriser l’accumulation en franchise d’impôts de réserves suffisantes pour faire face au pire, mais selon des scénarios cohérents pour la société. « Il faut donner à la captive française la capacité de convenablement mutualiser les risques dans le temps, sur davantage de branches, avec des plafonds élevés de déductibilité fiscale, pourquoi pas jusqu’à la totalité du risque technique, c’est la clé de son efficacité », plaide François Beaume, vice-président de l’Amrae (photo).
Un écosystème fragile
Un horizon de 20 ou 25 ans semble approprié, quand aujourd’hui la provision pour égalisation hexagonale est limitée le plus souvent à la moitié de cette période avant reprise faute de réalisation du sinistre. Sur ces éléments d’étendue et de durée du mécanisme, la provision pour fluctuation de sinistralité luxembourgeoise fait, selon Bercy, figure de « point de comparaison intéressant, mais nous pourrions faire différemment et peut-être mieux ». De même source, l’évolution du dispositif français devrait concerner les captives de réassurance et pas d’assurance, les premières, d’ailleurs de loin les plus nombreuses, ayant « la grande vertu de faire intervenir un assureur traditionnel, renforçant la garantie du juste calibrage des provisions ».
Outre le fonctionnement du provisionnement, la réforme doit toucher la gouvernance de la captive, en lien avec le principe de proportionnalité par lequel les Etats conservent une marge de manœuvre dans l’application de Solvabilité 2. Les exigences de la directive sont moins atténuées en France que chez certains voisins. Les captives sont bien des structures à part entière, mais avec pour seuls risques ceux de son groupe. Il pourrait en découler notamment des allègements de reportings au superviseur qu’est l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
Ces ajustements pourraient emporter l’adhésion et, par cercle vertueux, renforcer un écosystème encore fragile, passant par les courtiers, actuaires ou autres commissaires aux comptes. « Le financement des risques est un élément fort de compétitivité locale, encore faut-il disposer des prestataires aguerris », pointe François Beaume. Mais « il faut agir maintenant sur le cadre réglementaire, poursuit-il, nous attendons des annonces du gouvernement d’ici à l’été pour inscription à la loi de Finances 2022, permettant aux sociétés de boucler une procédure d’agrément à temps pour tirer parti du nouvel outil qu’est la captive à l’occasion de la saison de renouvellements des contrats début 2022. » C’est bien ce calendrier serré qu’a en tête Bercy. Au-delà, nul ne veut encore espérer l’étape suivante : le rapatriement des captives existantes.
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RDC: à Ntoyo, dans le Nord-Kivu, les survivants des massacres commis par les ADF enterrent leurs morts
Ntoyo - Lundi soir, les habitants de Ntoyo, un village de l’est de la République démocratique du Congo (RDC), s’apprêtaient à assister à des funérailles quand une colonne d’hommes armés a surgi de la forêt. «Parmi eux, il y avait de très jeunes soldats», raconte à l’AFP Jean-Claude Mumbere, 16 ans, rescapé d’un des deux massacres commis par les rebelles ADF (Forces démocratiques alliées) dans la nuit de lundi à mardi, l’un à Ntoyo et l’autre dans un village distant d’une centaine de kilomètres. Le bilan de ces attaques, au moins 89 tués selon des sources locales et sécuritaires, a peu de précédent dans une région pourtant en proie à une instabilité chronique, victime depuis trente ans de multiples groupes armés et conflits. Les ADF, groupe armé né en Ouganda et qui a prêté allégeance à l’Etat islamique, est connu pour une extrême de violence à l'égard des civils. «Ils étaient nombreux et parlaient une langue que je ne comprenais pas. De loin, ils portaient des tenues qui ressemblaient à celles des militaires», se souvient le jeune homme, venu assister mercredi aux funérailles de sa soeur, l’une des victimes de ce nouveau massacre perpétré dans la province du Nord-Kivu. Plus de 170 civils ont été tués par les ADF depuis juillet dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu, selon un décompte de l’AFP. Plus au sud, malgré les pourparlers de paix de ces derniers mois, des affrontements se poursuivent entre l’armée congolaise (FARDC) et affiliés, et le groupe armé antigouvernemental M23, soutenu par le Rwanda et son armée, qui s’est emparé des grandes villes de Goma et de Bukavu. A Ntoyo, Didas Kakule, 56 ans, a été réveillé en sursaut par les premiers coups de feu. Il dit avoir fui avec femmes et enfant à travers les bananeraies pour se réfugier dans la forêt voisine, avec d’autres habitants. Tapis dans l’obscurité, les survivants n’ont pu que contempler leurs maisons consumées par les flammes. «Les coups de feu ont retenti longtemps. Ma maison a été incendiée, ainsi que le véhicule qui était garé chez moi. Chez nous, heureusement, personne n’a été tué», dit Didas Kakule. Jean-Claude Mumbere, lui, a été touché par une balle pendant sa fuite. «Ce n’est qu’après m'être caché dans la forêt que j’ai réalisé que je saignais», affirme-t-il. «Inaction» Mercredi, Ntoyo, 2.500 habitants, n'était plus qu’un village fantôme, et la plupart des survivants partis se réfugier dans l’agglomération minière voisine de Manguredjipa. Une dizaine de corps étaient encore étendus sous des draps ou des bâches, battus par une forte pluie. Des volontaires ont creusé des tombes, assistés par des jeunes des environs, et planté 25 croix de bois dans la terre humide. Une partie des dépouilles avait déjà été emportée par les familles, les cercueils ficelés à la hâte sur des motos. Parmi les quelques proches de victimes venus aux funérailles, Anita Kavugho, en larmes devant la tombe de son oncle. Il est mort "à cause de l’inaction des autorités qui ne réagissent pas aux alertes», peste la jeune femmme, une fleur à la main. Des pickups de l’armée congolaise stationnent non loin, devant un véhicule calciné. Le déploiement de l’armée ougandaise (UPDF) aux côtés de l’armée congolaise dans le nord-est de la RDC depuis 2021 n’a pas permis de mettre fin aux multiples exactions des ADF, groupe formé à l’origine d’anciens rebelles ougandais. Quatre militaires congolais étaient présents à Ntoyo au moment de l’attaque. Les renforts stationnés à environ 7 km à Manguredjipa sont arrivés trop tard. «C’est leur faillite, on signale aux militaires que les assaillants sont tout près, et ils n’arrivent pas à intervenir», lâche Didas Kakule, amer. Cette énième tuerie risque d’aggraver la «fissure» entre l’armée et la population, estime Samuel Kakule, président de la société civile de Bapere. Les ADF «se dispersent en petits groupes pour attaquer nos arrières», répond le lieutenant Marc Elongo, porte-parole de l’armée congolaise dans la région, présent à Ntoyo mercredi. Quelques jours auparavant, les forces ougandaises et congolaises s'étaient emparées d’un bastion ADF dans le secteur et avaient libéré plusieurs otages du groupe, selon l’armée. Mais comme souvent, les ADF se sont dispersés dans la forêt, et ont frappé ailleurs. Une stratégie pour attirer les militaires loin de ses bases, selon des sources sécuritaires. © Agence France-Presse -
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