Les institutionnels français en ordre dispersé sur les actions climat

Lors du G20 des fonds de pension, certains détaillent des engagements forts, alors que d’autres n’ont pas encore avancé sur le sujet.
Laurence Pochard
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Le climat occupe le devant de la scène, mais pas au même plan chez les différents investisseurs institutionnels français de la retraite. Lors du G20 des fonds de pension à Paris le 28 octobre 2021, ces investisseurs de long terme ont débattu de leurs engagements sur les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Pour l’UMR, la directrice générale Virginie le Mée - Dubas précise être en avance sur son plan ESG avec à peu près 90% du portefeuille évalué sur ces critères. «Nous avions un objectif à horizon 2025 de 25% de décarbonation, nous l’avons déjà atteint, se félicite-t-elle. Nous avons donc redéfini une cible de -50% à horizon 2025, et nous nous appuyons sur les sociétés de gestion avec lesquelles nous travaillons pour l’atteindre.» Le Fonds de réserve pour les retraites est aussi en pleine phase d’accélération. Salwa Boussoukaya-Nasr, directrice des investissements du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), estime que son organisme a fait un cheminement rapide et fort, pour arriver maintenant à un plateau mais pas au sommet. Elle pense qu’il va falloir que le FRR donne un vrai coup de collier pour aller encore plus loin. Pour cela, l’investisseur a rejoint la Net Zero Asset Owner Alliance (NZAOA, Alliance pour la neutralité carbone des détenteurs d’actifs). « C’est une force vitale très importante qui entraîne tous ses membres vers un progrès, juge-t-elle. L’alignement vers un réchauffement d’1,5 degré ne pourra se faire en se laissant porter.» Elle ajoute que l’Article 29 change le panorama, avec des informations chiffrées à fournir au régulateur sur les objectifs climatiques d’ici 2030, alors qu’avec la NZAOA c’est 2025.Poussé par la NZAOA, le FRR a pris des engagements plus importants et vise presque 55% d’émissions en moins à cette échéance. L’investisseur s’attaque notamment à la partie obligataire de son portefeuille, et demande des efforts à ses gérants: les portefeuilles constitués pour le FRR présentententre 30 et 40% d’émissions en moins que leur indice de référence. Engagement L’Etablissement de retraite additionnelle de la fonction publique (Erafp) a également une approche très structurée. Sa démarche d’investisseur socialement responsable «best in class» a été enrichie au fur et à mesure, pour devenir aujourd’hui proactive, notamment au sein de coalitions d’investisseurs. «Nous menons des actions d’engagement envers les entreprises avec l’IIGCC et Climate Action 100+, avec des actions fortes envers Engie et EDF par exemple, détaille Catherine Vialonga, directrice de la gestion technique et financière. Nous sommes aussi «support investor» pour Stellantis, Renault et TotalEnergies, car ces entreprises ont bien compris qu’il y avait quelque chose à faire sur le climat et prennent en compte ces enjeux au plus haut niveau, notamment en demandant leurs attentes à leurs principaux investisseurs.» En outre, l’Erafp s’est fixé des thématiques d’investissement à impact en lien avec les Objectifs de développement durable des Nations Unies. Parmi eux se trouve la lutte contre le changement climatique, faciliter l’accès au logement - surtout des agents publics – et le soutien à l’activité économique et à l’emploi. Pour ce dernier objectif, l’Erafp veut passer par le private equity et la dette non cotée: il a prévu 500 millions d’euros d’engagements dans ces classes d’actifs en 2022. En matière d’accompagnement des entreprises, l’Agirc Arcco favorise pour sa part une vision long terme. «On ne peut pas collecter les cotisations des entreprises de l’énergie sans les accompagner dans l’évolution de leur modèle économique, estime François-Xavier Selleret, directeur général. Cela aide à maintenir et créer les emplois de demain, et donc les cotisations de demain». Le soutien au tissu économique se trouve aussi dans les intentions de la Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP). Dotée d’une charte ESG depuis 2017, elle se focalise notamment sur les aspects sociaux de ses investissements, avec un fonds de 20 millions d’euros annuels pour aider les jeunes pharmaciens à s’installer. «Nous investissons dans des fonds de private equity au plus près de l’économie dans les territoires, explique son président Philippe Berthelot, nous avons près de 800 millions d’euros d’engagements dans les classes d’actifs non cotées, ce qui n’est pas neutre pour l’aspect social.» En revanche, le discours tranche du côté d’une autre caisse de retraite des professions libérales. La Caisse autonome de retraite des médecins de France (Carmf) n’a pour sa part pas encore pris les questions d’environnement à bras le corps. Son directeur général Henri Chaffiotte s’interroge: «Sur les aspects climat, est-ce aux institutionnels de changer le monde? Moi j’estime que la responsabilité première va aux gouvernements. Les sociétés de gestion font de plus en plus d’ESG, bientôt il y en aura partout, mais il n’y a toujours pas de norme, et pas beaucoup de contraintes des gouvernements sur l’ESG des investisseurs. Cela améliore l’image, mais ne fait rien pour diminuer l’action des entreprises polluantes. Si les investisseurs institutionnels cessent de les financer, le privé prendra le relais ». Et de conclureque cette transition climatique ne pourra être que longue.

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