
Le code Afep-Medef révisé peine à répondre aux attentes de la Place

Après la nouvelle crise sur les rémunérations des dirigeants – avec le dossier Plassat chez Carrefour– l’Afep-Medef se devait d’être ferme dans son code de gouvernement d’entreprise révisé. Désormais, l’accord de non-concurrence signé au moment du départ du dirigeant est interdit. Et même si cette clause préexiste, l’indemnité ne sera pas versée en cas de départ à la retraite et au-delà de 65 ans.
Si la Place devrait se féliciter de cette fermeté, il a fallu que les circonstances poussent le patronat à prendre ces recommandations. En effet, lorsque l’Afep et le Medef ont annoncé fin février la révisionde leur code, qui intervient en moyenne tous les deux ans, le sujet de la clause de non-concurrence n’était pas à l’ordre du jour… A l’époque, le patronat précisait réfléchir sur la création de valeur à long terme en intégrant les dimensions sociale, sociétale et environnementale, la représentation des administrateurs salariés, la politique de non-discrimination et la composition du Haut comité de gouvernement d’entreprise (HCGE).
«Cette légère révision avait pour seul objet de s’opposer au débat sur l’objet social, et sert d’outil de négociation avec l’Etat pour éviter la loi ‘dure’, explique Loïc Dessaint, directeur général de Proxinvest. Le code n’est pas assez directif et évite ainsi aux entreprises d’être en non-conformité, et a du mal à s’attaquer aux vrais sujets. En particulier les indemnités de départ devraient être plafonnées au maximum à 20 mois, comme les indemnités prud’hommales, et non à deux ans. Le patronat n’a pas assez traité la question de la cohésion sociale.»
Le débat de Place n’a toujours pas eu lieu
Si l’Afep-Medef fait preuve de plus d’écoute, il est encore loin de répondre aux attentes de la Place. «Nous saluons la prise en compte des enjeux RSE dans la stratégie, l’intégration de critères RSE dans la rémunération des dirigeants, et aussi la publication des taux de participation individuelle des administrateurs au conseil, confie Agnès Touraine, présidente de l’Institut français des administrateurs (IFA). En revanche, nous demandons toujours un vrai débat de Place sur le contenu du code Afep-Medef, un élargissement plus important du HCGE, et la suppression des rémunérations exceptionnelles, qui permettrait d’éviter des incompréhensions majeures chaque année. Nous en appelons à la responsabilité de chacun, afin de passer d’une gouvernance normative à une gouvernance comportementale.»
L’Afep et le Medef «ont fait le strict minimum pour éviter le droit dur, en réponse au projet de loi Pacte et au scandale Carrefour, ajoute un expert de la gouvernance. Ils ont un fait un petit effort sur la composition du HCGE, mais les représentants des émetteurs restent majoritaires».
Quelles sont les avancées du code ? Dans la foulée du rapport Notat-Senard et du projet de loi Pacte, le conseil d’administration doit s’attacher «à promouvoir la création de valeur sur le long terme en considérant les enjeux sociaux et environnementaux de ses activités». Mais il ne va pas plus loin et ne recommande pas aux sociétés d’intégrer la «raison d’être» de l’entreprise dans ses statuts. D’ailleurs, l’Afep et le Medef rappellent au gouvernement et au Parlement qu’en matière de RSE, ils préfèrent la soft law... Le contraire aurait étonné ! Concrètement, le code recommande d’intégrer un ou plusieurs critères liés à la responsabilité sociale et environnementale (RSE) dans la rémunération des dirigeants, et demande au conseil de s’assurer de la mise en place d’un dispositif de prévention et de détection de la corruption et du trafic d’influence. En outre, le régime de retraite supplémentaire doit être soumis à conditions de performance. Ce qu’exige la loi Macron. D’aucuns estiment que trop souvent le code ne fait que suivre la loi…
Soucieux d’une véritable représentation dessalariés au conseil d’administration, le code recommande de faire siéger les salariés dans la société du groupe qui se réfère au code Afep-Medef, soit celle qui prend les décisions stratégiques.
Le HCGE s’ouvre progressivement
Face aux critiques sur le HCGE, l’Afep et le Medef ont décidé de l’étoffer avec deux nouveaux membres, soit neuf personnes, d’ici à la fin de l’année. L’objectif est d’améliorer sa féminisation et d’accueillir des administrateurs de grandes sociétés qui n’ont pas nécessairement eu de mandats exécutifs. En outre, le HGCE pourra nommer les mauvais élèves et rendre public le courrier envoyé à une entreprise, si cette dernière s’abstient de répondre dans un délai de deux mois. De quoi inciter les sociétés à tenir compte des remarques du gendarme du code. Le HCGE n’avait pas attendu cette autorisation et avait déjà commencé l’an dernier à recourir au «name and shame».
En matière de non-discrimination et de diversité, le conseil devra veiller à la mise en œuvre d’une politique active, permettant notamment une meilleure représentation des femmes dans les comités exécutifs et parmi les cadres dirigeants.
Sur le dialogue avec les actionnaires, sujet au cœur des travauxdu HCGE l’an dernier, le code précise qu’il peut être confié au président du conseil, ou à défaut à l’administrateur référent, avant d’en rendre compte au conseil. Mais cela ne constitue pas une recommandation.
Par ailleurs, le code intègre qu’un administrateur en conflit d’intérêts, qui déjà ne participait pas au vote, ne devra pas non plus être présent lors des débats.
Enfin, les sociétés devront publier le taux de participation individuelle des administrateurs au conseil et aux comités. De quoi les responsabiliser davantage. Un administrateur cette année a perdu son siège pour assiduité insuffisante ! Quant aux sociétés, elles devront préciser les raisons qui motivent le choix de leurs administrateurs.
Alors que cette publication semble avoir été un peu précipitée par les circonstances, la Place scrutera attentivement la synthèse des consultations par le professeur Fages - dont le travail avait été unanimement salué l’an dernier - attendue dans les prochains jours.
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Enquête du PNF en France sur le patrimoine supposé frauduleux de Najib Mikati, ancien Premier ministre libanais
Paris - Les avocats d’associations qui accusent l’ancien Premier ministre libanais Najib Mikati de s'être constitué frauduleusement un important patrimoine ont annoncé dimanche à l’AFP avoir obtenu l’ouverture d’une enquête par le parquet national financier (PNF) à Paris autour de ces biens supposés «mal acquis». Interrogé récemment par l’AFP, le PNF ne souhaitait pas communiquer sur le sujet. L’enquête, dont a fait état dimanche le quotidien libanais L’Orient-le Jour, intervient après une plainte déposée en avril 2024 par le Collectif des victimes des pratiques frauduleuses et criminelles au Liban (CVPFCL) et l’association anti-corruption Sherpa, selon Me William Bourdon. Dimanche, le service de communication de Najib Mikati a indiqué à l’AFP «ne pas avoir été notifié». Lors du dépôt de la plainte, Najib Mikati avait assuré avoir «toujours agi dans le strict respect de la loi», tout comme les membres de sa famille. «L’origine de notre patrimoine familial est entièrement transparente, légitime et conforme à la législation», avait insisté celui qui a été Premier ministre du Liban à plusieurs reprises, et jusqu'à début 2025. Les associations accusent Najib Mikati, 69 ans, et ses proches, dont son frère Taha Mikati, d’avoir acquis différents biens en France et à l’étranger par des structures multiples, dont des montages offshore. Une fortune qu’ils auraient amassée frauduleusement, au mépris notamment du fisc. Leur plainte visait les infractions de blanchiment et recel ou complicité, association de malfaiteurs, le tout commis en bande organisée, circonstance aggravante. Elle a été complétée par de nouveaux éléments en avril 2025. Cette enquête «va peut-être réduire le pouvoir de nuisance de ceux qui cherchent à tout prix à saper le processus en cours pour que cesse la prédation des intérêts privés sur l’Etat et l’intérêt public des Libanais», ont déclaré à l’AFP les avocats William Bourdon et Vincent Brengharth. Najib Mikati, qui a fait fortune dans les télécoms, et son frère Taha, sont présentés par les plaignants comme faisant partie des plus grandes fortunes du Liban, propriétaires de yachts, de jets privés ou encore d’immeubles sur la Côte d’Azur. Plusieurs enfants des frères Mikati sont aussi visés comme de potentiels receleurs de l’argent supposément blanchi. Les associations plaignantes sont déjà à l’origine de l’enquête autour de l’enrichissement de l’ancien dirigeant de la banque du Liban, Riad Salamé. Une information judiciaire est en cours à Paris et Riad Salamé fait l’objet d’un mandat d’arrêt international, tandis que son frère Raja Salamé a été mis en examen. Ils contestent fermement les faits. © Agence France-Presse -
Moule de mer Noire: alors que le climat change, la filière bulgare s’adapte et cherche à tirer son épingle du jeu
Kaliakra - Ensemencement décalé, filets plus profonds. En mer Noire, le Bulgare Nayden Stanev adapte son élevage de moules en espérant tirer son épingle du jeu car ici, le réchauffement est moins intense qu’en Méditerranée et l’eau donc plus clémente pour le petit mollusque à coque noire. «Cette année, on s’en tire bien», dit à l’AFP le mytiliculteur de 56 ans à bord de son vieux bateau diesel, évoquant les 20% de coquillages qui n’ont pas survécu à la canicule marine, qui décime les élevages d’Europe. Car ce coquillage est menacé, au grand désespoir des principaux pays producteurs que sont l’Espagne et l’Italie, où la production baisse inexorablement ces dernières années. Bien sûr, avec son millier de tonnes produits par an contre plus de 54.500 rien que pour la France en 2023, la Bulgarie est encore loin de jouer dans la cour des grands. Mais elle est déjà le premier producteur en Europe de l’Est. Pleine saison Avec les eaux de la Grèce voisine qui tendent à se «tropicaliser», de nouvelles opportunités s’offrent à Nayden Stanev qui compte bien en profiter et fait tout pour adapter sa ferme marine. Car la Méditerranée est l’une des mers qui change le plus vite. Avec une température moyenne en surface de 26,79°C, elle a connu cette année son mois de juillet le plus chaud jamais enregistré, selon Mercator Océan International, opérateur du service Copernicus Marine de l’Union européenne. Si ces hausses de température ne sont pas nouvelles, le changement climatique les rend de plus en plus fréquentes, de plus en plus longues, de plus en plus extrêmes. Avec ses 25,46°C degrés sur la même période, la mer Noire laisse plus de temps aux professionnels pour s’adapter et la baie du cap Kaliakra (nord-est), protégée des courants, demeure privilégiée. En compagnie de ses six employés, Nayden Stanev est sur le pont dès l’aube pour récolter et livrer sa production alors que la saison bat son plein en cette fin du mois d’août. Gestes ancestraux Le téléphone de cet ancien commando de marine sonne sans interruption tandis qu’il prend les commandes sur un petit carnet. Ce jour-là, ce ne sont pas moins de dix tonnes de moules qu’il devra livrer. Des centaines de restaurants et les marchands locaux sont très demandeurs, mais aussi la Roumanie voisine. Après une courte traversée, l'équipage atteint les 200 hectares de champs de moules. A la surface flottent des bouées sombres auxquelles sont suspendus de longs filets sur lesquels elles croissent. Sans échanger un mot, les hommes travaillent avec des gestes ancestraux: l’un fait émerger les précieuses coquilles, l’autre les nettoie, un troisième les trie. Les sacs de 800 kilos s’empilent, des cormorans guettent les restes avant que le bateau ne revienne à quai en début d’après-midi, attendu par plusieurs camions frigorifiques. Quelques habitants patientent aussi, munis de seaux pour le dîner en famille. Malgré la bonne récolte, les experts invitent à la prudence. Ici non plus «la mer n’a pas le temps de refroidir, quand le réchauffement est prolongé», déplore Radoslava Bekova, de l’institut d’océanologie à l’académie bulgare des sciences. «Fragilisée, la moule est vulnérable aux maladies» et l’année dernière, les pertes avaient été très lourdes, rappelle-t-elle. Chute de la production La production de moules dans l’UE est en baisse depuis 2018 tandis que la production mondiale a continué de croître, selon les données de l’Observatoire européen des marchés des produits de la pêche et de l’aquaculture (EUMOFA). En 2023, le volume récolté dans l’UE était inférieur d’environ 21% à celui de 2018. «Le passage durable des eaux à 26°C et plus — seuil de mortalité massive des moules — pendant les pics de demande perturbe la chaîne d’approvisionnement», constate John A. Theodorou, professeur associé au département des pêches et de l’aquaculture de l’Université de Patras, en Grèce. «Le changement climatique frappe déjà à la porte des producteurs européens». Dans ce tableau noir, les conchyliculteurs bulgares ont des raisons d’espérer. L'écart de températures «ouvre des débouchés à la moule de la mer Noire, moins exposée aux pressions environnementales», estime M. Theodorou. Quelque 356.500 tonnes de moules ont été récoltées dans l’UE en 2023, pour une valeur d’environ 463 millions d’euros, d’après les données d’EUMOFA. L’Espagne arrivait en tête avec 155.700 tonnes, suivie de l’Italie (57.279) et de la Grèce (18.000). La Bulgarie représentait, elle, près de 1.100 tonnes. Rossen BOSSEV © Agence France-Presse -
Agriculture: la FNSEA souhaite une journée de mobilisation le 25 septembre
Paris - Le syndicat agricole FNSEA appelle à «une grande journée d’action» autour des questions des échanges internationaux pour les produits agricoles le vendredi 25 septembre à travers toute la France, annonce son président Arnaud Rousseau dans un entretien au Journal du dimanche. Cette mobilisation aura lieu contre «le Mercosur, les taxes imposées par Donald Trump et le flot des importations internationales qui ne respectent pas les normes qui sont les nôtres», explique le dirigeant. «A l’image des œufs ukrainiens: tous ces produits qui entrent sur notre territoire et que nous ne voulons pas voir dans nos assiettes, car ils sont dangereux pour la santé et pour l’environnement!», poursuit-il. «Les actions sont à l’appréciation des fédérations départementales mais ça peut prendre la forme de visite de grandes surfaces pour aller chercher tous les produits non conformes», a précisé à l’AFP un porte-parole du premier syndicat agricole français, qui mènera ces actions avec les Jeunes agriculteurs (JA). La FNSEA et les JA avaient déjà dit leur hostilité à l’accord de libre-échange entre des pays latino-américains du Mercosur et l’Union européenne. Cet accord UE-Mercosur doit notamment permettre à l’UE d’exporter davantage de voitures, de machines, de vins et de spiritueux en Argentine, au Brésil, en Uruguay et au Paraguay. En retour, il faciliterait l’entrée de viande, sucre, riz, miel ou soja sud-américains, au risque de fragiliser certaines filières agricoles européennes. La FNSEA avait indiqué ne pas vouloir participer au mouvement «Bloquons tout» du 10 septembre pour éviter une «récupération politique» mais avait déjà prévu une mobilisation «cet automne» sur ses propres revendications. «Nous attendons une date de rendez-vous avec (le nouveau Premier ministre) M. Lecornu dans les prochains jours», a précisé le porte-parole à l’AFP. © Agence France-Presse