
Casino prend sa revanche sur les vendeurs à découvert

Jean-Charles Naouri savoure sa revanche contre les vendeurs à découvert, tenus responsables par le PDG et premier actionnaire de Casino de la chute de ses sociétés de contrôle. Depuis un mois, la pression à la baisse sur les actions du groupe de distribution, dont le cours était tombé à un plus bas de 27 euros fin mai au moment de la mise en sauvegarde de Rallye et de ses trois sociétés de tête (Foncière Euris, Finatis et Euris), est enrayée.
Le nombre de titres prêtés pas les actionnaires de Casino aux vendeurs à découvert n’a jamais été aussi faible depuis un an. Il est tombé à 13,6 millions d’actions en fin de semaine dernière, contre 22,26 millions en juin, selon les données d’IHS Markit compilées pour L’Agefi. Cela représente 12,7% du capital, contre un peu plus de 18% début septembre et un pic de 20,47% en juin. «Casino n’est plus la valeur française la plus vendue à découvert», apprécie un proche de Jean-Charles Naouri. Ce fardeau est désormais porté par Eurofins (16,35%). Casino ne fait aucun commentaire.
Après avoir atteint leur but en empochant leurs gains grâce à l’exercice des CDS sur Rallye, certains hedge funds ont pu réduire volontairement leurs positions à découvert sur l’action Casino. Mais une grande partie de ces fonds spéculatifs ont surtout été pris à revers fin août et début septembre par deux annonces successives qui ont modifié le profil du distributeur : la mise en œuvre d’un nouveau plan de cession d’actifs de 2 milliards d’euros supplémentaires et l’entrée surprise au capital de l’homme d’affaires tchèque Daniel Kretinsky.
«Le plan de cession d’actifs, qui promet de désendetter le groupe, a affaibli l’argument des fonds qui attaquaient le crédit du groupe», explique un gérant de hedge fund, plutôt pro-Naouri. Quelques jours plus tard, l’arrivée au capital de Daniel Kretinsky a coincé de nombreux fonds en asséchant la quantité d’actions Casino en mesure d’être prêtée. «Initialement, environ un quart du capital du groupe, soit 25 millions de titres, était disponible dans ce que l’on appelle le lending pool. L’entrée de Daniel Kretinsky, allié de Jean-Charles Naouri, a fait disparaître 2,5 millions d’actions du lending pool, provoquant un mouvement de panique chez certains vendeurs à découvert», explique une autre source de marché.
L’assèchement de la liquidité pour les vendeurs à découvert s’est rapidement transmis sur les loyers réclamés par les actionnaires pour rémunérer le prêt de leurs actions. Selon cette source, les coûts d’emprunt sont passés de 20% environ à près de 50% par an, rendant totalement exorbitante toute nouvelle stratégie de vente à découvert, d’autant que les actions sont majoritairement empruntées avec de très courtes maturités. Certains fonds, notamment les plus petits, ont été contraints de se couvrir, donc de racheter leurs positions, parfois à perte, victime d’un short squeeze tant redouté.
Principes de loyauté
«Certains fonds ont beaucoup souffert», reconnaît un gérant de hedge fund. Bien qu’une équipe de traders crédit de Citadel a quitté le hedge fund début septembre, il semblerait que ce départ n’ait pas été provoqué par ce short squeeze, ont indiqué à L’Agefi plusieurs sources. Selon les dernières déclarations à l’AMF, la position short de Citadel sur Casino s’élevait encore à 0,96% fin septembre contre 1,41% un mois auparavant, laissant à Melqart AM la place de plus gros shorter (0,99% au 5 octobre).
Pour certains hedge funds, ce short squeeze aurait été habilement créé par Jean-Charles Naouri, sur un marché peu transparent et non régulé. Ce qui est certain, c’est que le dirigeant de Casino ne manquait jamais une occasion de rappeler à ses grands actionnaires des principes de loyauté. «Il pouvait y avoir une forme de double jeu chez certains», admet une source proche du groupe : d’un côté je soutiens Casino et son dirigeant, de l’autre je prête mes titres contre un généreux rendement. De grands actionnaires de Casino et de Rallye ont gagné d’importantes sommes avec cette stratégie. Les grandes banques d’investissement, pour la plupart créancières de Casino, ont également gagné beaucoup d’argent en faisant l’intermédiaire entre les actionnaires et les vendeurs à découvert.
Casino avait même sensibilisé ses petits actionnaires au sujet. Dans une lettre aux actionnaires envoyée début 2019, Jean-Charles Naouri prévenait que «dans certains cas de gestion déléguée, les établissements bancaires peuvent être amenés à prêter les actions détenues par les actionnaires, ces derniers n’en ayant pas connaissance, à des fonds qui spéculent à la baisse sur le titre». Il leur conseillait alors de «se rapprocher de leur établissement bancaire pour obtenir plus de renseignements sur ces pratiques». En clair, de leur demander de cesser cette pratique. Depuis quelques semaines, le message est passé.
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Un an après, l’Europe n’a pas enclenché l’électrochoc prôné par Mario Draghi face au risque de « décrochage »
Bruxelles - «Notre modèle de croissance s'érode, nos vulnérabilités s’accroissent, le financement des investissements requis n’est pas clairement tracé». Un an après la remise d’un rapport choc qui mettait en garde contre le «décrochage» économique du Vieux continent face aux Etats-Unis et à la Chine, Mario Draghi, ancien président de la Banque centrale européenne, a exhorté mardi l’Europe à sortir de sa «lenteur» et mener des réformes pour redresser sa compétitivité. Invité par la Commission européenne à dresser un premier bilan, douze après la remise de ses préconisations, l'économiste italien et ancien président de la Banque centrale européenne n’a pas mâché ses mots. Tout en saluant la détermination à agir de la Commission, qui avait endossé son diagnostic et a lancé depuis de multiples initiatives inspirées de ses recommandations, le professeur Draghi a jugé que «les entreprises et les citoyens (...) sont déçus par la lenteur de l’Europe, et son incapacité à aller aussi vite» que les Etats-Unis ou la Chine. «L’inaction menace non seulement notre compétitivité, mais également notre souveraineté», a-t-il prévenu, regrettant que «les gouvernements n’aient pas conscience de la gravité de la situation». Progrès «mitigés» Selon les calculs du centre de réflexion bruxellois EPIC, seulement 11% des 383 recommandations faites par M. Draghi dans son rapport sur «l’avenir de la compétitivité européenne» ont été mises en oeuvre totalement, et environ 20% de manière partielle. Les économistes de Deutsche Bank Marion Muehlberger et Ursula Walther jugent également dans une note que «les progrès dans l’ensemble sont mitigés», avec des «réformes substantielles» mises en oeuvre ou engagées, mais sans qu’il y ait de quoi bouleverser la donne à ce stade. Parmi les principales avancées, la relance de l’industrie de défense. L’urgence de réarmer l’Europe face à la menace russe a poussé les 27 à se lancer dans un effort de réindustrialisation collectif, avec une agilité remarquée. La semaine dernière, la Commission a ainsi annoncé avoir alloué 150 milliards d’euros de prêts à 19 pays, dans le cadre d’un ensemble de mesures visant à mobiliser jusqu'à 800 milliards d’euros. L’Europe s’est également dotée d’une plateforme commune pour sécuriser ses approvisionnements en matières premières «critiques», et a multiplié les initiatives dans le domaine de l’intelligence artificielle. Autant de réalisations mises en avant par la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, qui, en recevant Mario Draghi, a reconnu la nécessité d’aller plus vite pour redresser la barre. «Sentiment d’urgence» Elle a assuré que la commission «maintiendra sans relâche le cap jusqu‘à ce que tout soit accompli», et à enjoint les autres institutions européennes à se joindre au mouvement, en particulier le Parlement, qui n’a toujours pas adopté une série de lois de simplification réglementaire dites «Omnibus». «Nous avons besoin d’une action urgente pour faire face à des besoins urgents, car nos entreprises et nos travailleurs ne peuvent plus attendre», a-t-elle exhorté. Selon Deutsche Bank, ces mesures de simplifications pourraient faire économiser de l’ordre de 9 milliards d’euros par an aux entreprises européennes. La cheffe de l’exécutif européen appelle aussi à mettre en oeuvre «avec un sentiment d’urgence» le parachèvement du marché unique, un vaste projet consistant à lever d’ici 2028 de multiples barrières internes qui continuent de freiner l’activité économique dans de nombreux secteurs. D’après le Fonds monétaire international, ces entraves représentent l'équivalent de 45% de droits de douane sur les biens, et de 110% sur les services. Pour Simone Tagliapietra, expert à l’institut Bruegel, «le message de M. Draghi est très clair: soit l’Europe change de modèle économique, soit elle est condamnée à périr». Et cela s’adresse en priorité aux Etats membres, là où réside selon lui le principal obstacle aux réformes. Frédéric POUCHOT © Agence France-Presse -
Budget 2026 : LFI refuse l’invitation de Sébastien Lecornu à Matignon
Paris - La France insoumise a refusé l’invitation du nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu, qui reçoit mercredi à Matignon les responsables de gauche dans le cadre de ses consultations en vue de préparer le budget 2026, a indiqué mardi la cheffe des députés LFI Mathilde Panot. Mme Panot a indiqué avoir reçu un coup de téléphone lundi soir de Matignon pour inviter LFI mercredi matin, et précisé que son groupe ne s’y rendrait pas, comme cela avait déjà été le cas lorsque François Bayrou avait voulu les consulter. «Les Insoumis n’ont absolument rien à négocier avec les macronistes (...) qui n’ont aucune légitimité pour continuer une politique dont personne ne veut», a déclaré la présidente des députés Insoumis en conférence de presse. Elle a fustigé un coup de fil «tardif, vers 21H00», déplorant un «sens du timing (...) extrêmement méprisant». Depuis sa nomination le 9 septembre, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d’abord les partis de son «socle commun» (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales. Mardi après-midi, il reçoit des représentants de la galaxie centriste: le groupe parlementaire Liot (Libertés, indépendants et outre-mer et territoires) à 16H00, le Parti radical à 17H15, le Parti radical de gauche (PRG) à 18H15 et le parti Utiles (proche de Liot) à 19H30. Mercredi, les responsables du Parti socialiste, des Écologistes et du Parti communiste seront reçus dans la matinée. Le RN de Marine Le Pen et Jordan Bardella sera également reçu le même jour, de même que Place publique, la formation social-démocrate de Raphaël Glucksmann, a fait savoir Matignon sans préciser les horaires de ces entretiens. Viendra enfin jeudi le tour d’Eric Ciotti et son Union des droites pour la République (UDR). © Agence France-Presse