
Le plan tourisme met les banques, la CDC et Bpifrance à contribution

Le Premier ministre Edouard Philippe a annoncé ce jeudi un plan d’investissement à hauteur de 1,3 milliard d’euros pour le secteur du tourisme porté par la Caisse des Dépôts (CDC) et Bpifrance, et une série de mesures de soutien représentant au total « un engagement de plus de 18 milliards d’euros pour les finances publiques ». « Le tourisme fait probablement face à la pire épreuve de son histoire moderne alors même que c’est un des fleurons de l'économie française », a souligné Edouard Philippe. « Son sauvetage est donc une priorité nationale », a-t-il ajouté, rappelant que le secteur représentait 2 millions d’emplois directs et indirects et contribuait à près de 8% du PIB de la France.
« PGE saison »
Outre les mesures fiscales et sociales dévoilées par le gouvernement (exonérations et crédits de cotisations sociales et patronales, chômage partiel prolongé jusqu’en septembre), le prêt garanti par l’Etat (PGE) distribué par les banques depuis fin mars sera amendé pour les entreprises du secteur du tourisme. Elles pourront emprunter, dans le cadre d’un « PGE saison », un montant équivalent à leurs trois meilleurs mois de chiffre d’affaires 2019, soit plus que le plafond de 25% du chiffre d’affaires annuel pour les autres entreprises. Par ailleurs, « les banques se sont engagées à systématiquement proposer aux PME du secteur un report des mensualités de tous leurs prêts sur 12 mois pour par simplement sur 6 mois comme aujourd’hui », a dévoilé le Premier ministre. Les établissements de crédit ayant déjà chiffé leur effort à 2 milliards d’euros pour les reports de 6 mois, selon les données de la Fédération bancaire française (FBF), la mesure pourrait atteindre au total 4 milliards d’euros, selon une source proche du dossier.
Bpifrance va par ailleurs multiplier par quatre, à 1 milliard d’euros, son enveloppe de prêts tourisme, a indiqué Edouard Philippe. L’institution publique précise à L’Agefi avoir déjà débloqué 80 millions pour ce nouveau produit depuis le début de l’année.
Le fonds de solidarité dédié aux PME et TPE en difficulté et abondé en partie par les assureurs français va par ailleurs rester ouvert jusqu’à la fin de l’année et élargir son accès aux sociétés comptant jusqu’à 20 salariés et 2 millions d’euros de chiffre d’affaires. Elles pourront recevoir jusqu’à 10.000 euros d’aide.
3,6 milliards d’euros de la CDC et Bpifrance
En matière l’investissement, la Caisse des Dépôts sera en première ligne, avec une enveloppe de 1,3 milliard d’euros dédiée aux entreprises et infrastructures touristiques, déployée par sa Banque des territoires et sa filiale à 50% Bpifrance. Cette dernière explique à L’Agefi qu’elle investira environ 500 millions d’euros en fonds propres via trois nouveaux programmes : une poche de 150 millions d’euros dédiée aux ETI du secteur du tourisme et une deuxième génération du fonds France Investissement Tourisme pour 250 millions d’euros, lancés tous deux dès aujourd’hui ; et un Fonds Aide Soutien Tourisme (FAST) de quasi-fonds propres pour les petits exploitants, doté de 80 millions d’euros par Bpifrance et les régions.
En additionnant les ambitions de la Banque des territoires et de Bpifrance en matière d’investissements et de prêts, la sphère publique chiffre à 3,6 milliards d’euros ses aides au tourisme d’ici à 2023.
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RDC: à Ntoyo, dans le Nord-Kivu, les survivants des massacres commis par les ADF enterrent leurs morts
Ntoyo - Lundi soir, les habitants de Ntoyo, un village de l’est de la République démocratique du Congo (RDC), s’apprêtaient à assister à des funérailles quand une colonne d’hommes armés a surgi de la forêt. «Parmi eux, il y avait de très jeunes soldats», raconte à l’AFP Jean-Claude Mumbere, 16 ans, rescapé d’un des deux massacres commis par les rebelles ADF (Forces démocratiques alliées) dans la nuit de lundi à mardi, l’un à Ntoyo et l’autre dans un village distant d’une centaine de kilomètres. Le bilan de ces attaques, au moins 89 tués selon des sources locales et sécuritaires, a peu de précédent dans une région pourtant en proie à une instabilité chronique, victime depuis trente ans de multiples groupes armés et conflits. Les ADF, groupe armé né en Ouganda et qui a prêté allégeance à l’Etat islamique, est connu pour une extrême de violence à l'égard des civils. «Ils étaient nombreux et parlaient une langue que je ne comprenais pas. De loin, ils portaient des tenues qui ressemblaient à celles des militaires», se souvient le jeune homme, venu assister mercredi aux funérailles de sa soeur, l’une des victimes de ce nouveau massacre perpétré dans la province du Nord-Kivu. Plus de 170 civils ont été tués par les ADF depuis juillet dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu, selon un décompte de l’AFP. Plus au sud, malgré les pourparlers de paix de ces derniers mois, des affrontements se poursuivent entre l’armée congolaise (FARDC) et affiliés, et le groupe armé antigouvernemental M23, soutenu par le Rwanda et son armée, qui s’est emparé des grandes villes de Goma et de Bukavu. A Ntoyo, Didas Kakule, 56 ans, a été réveillé en sursaut par les premiers coups de feu. Il dit avoir fui avec femmes et enfant à travers les bananeraies pour se réfugier dans la forêt voisine, avec d’autres habitants. Tapis dans l’obscurité, les survivants n’ont pu que contempler leurs maisons consumées par les flammes. «Les coups de feu ont retenti longtemps. Ma maison a été incendiée, ainsi que le véhicule qui était garé chez moi. Chez nous, heureusement, personne n’a été tué», dit Didas Kakule. Jean-Claude Mumbere, lui, a été touché par une balle pendant sa fuite. «Ce n’est qu’après m'être caché dans la forêt que j’ai réalisé que je saignais», affirme-t-il. «Inaction» Mercredi, Ntoyo, 2.500 habitants, n'était plus qu’un village fantôme, et la plupart des survivants partis se réfugier dans l’agglomération minière voisine de Manguredjipa. Une dizaine de corps étaient encore étendus sous des draps ou des bâches, battus par une forte pluie. Des volontaires ont creusé des tombes, assistés par des jeunes des environs, et planté 25 croix de bois dans la terre humide. Une partie des dépouilles avait déjà été emportée par les familles, les cercueils ficelés à la hâte sur des motos. Parmi les quelques proches de victimes venus aux funérailles, Anita Kavugho, en larmes devant la tombe de son oncle. Il est mort "à cause de l’inaction des autorités qui ne réagissent pas aux alertes», peste la jeune femmme, une fleur à la main. Des pickups de l’armée congolaise stationnent non loin, devant un véhicule calciné. Le déploiement de l’armée ougandaise (UPDF) aux côtés de l’armée congolaise dans le nord-est de la RDC depuis 2021 n’a pas permis de mettre fin aux multiples exactions des ADF, groupe formé à l’origine d’anciens rebelles ougandais. Quatre militaires congolais étaient présents à Ntoyo au moment de l’attaque. Les renforts stationnés à environ 7 km à Manguredjipa sont arrivés trop tard. «C’est leur faillite, on signale aux militaires que les assaillants sont tout près, et ils n’arrivent pas à intervenir», lâche Didas Kakule, amer. Cette énième tuerie risque d’aggraver la «fissure» entre l’armée et la population, estime Samuel Kakule, président de la société civile de Bapere. Les ADF «se dispersent en petits groupes pour attaquer nos arrières», répond le lieutenant Marc Elongo, porte-parole de l’armée congolaise dans la région, présent à Ntoyo mercredi. Quelques jours auparavant, les forces ougandaises et congolaises s'étaient emparées d’un bastion ADF dans le secteur et avaient libéré plusieurs otages du groupe, selon l’armée. Mais comme souvent, les ADF se sont dispersés dans la forêt, et ont frappé ailleurs. Une stratégie pour attirer les militaires loin de ses bases, selon des sources sécuritaires. © Agence France-Presse