La politique accommodante du Japon suscite le courroux de ses partenaires

La BoJ a annoncé ce matin avoir opté pour un objectif d’inflation révisé à 2% et s’est engagée sur un programme de rachats d’actifs illimité
Patrick Aussannaire

Le Japon met ses menaces à exécution. A l’issue de la réunion de son comité de politique monétaire, la Banque du Japon a annoncé avoir opté pour un objectif d’inflation révisé à 2% et s’est engagée sur des rachats d’actifs illimités tant que cet objectif ne sera pas atteint. A partir de janvier 2014, date à laquelle le programme de rachats d’actifs actuel de 101.000 milliards de yens expirera, la BoJ s’engage sur un montant de rachats mensuels de 13.000 milliards de yens, dont 2.000 milliards d’obligations à long terme et 10.000 à court terme, pour une période illimitée.

Longtemps victime de la «guerre des changes» qui a fait grimper le yen à son plus haut historique de 75,82 contre dollar fin octobre 2011, le Japon a opté pour une politique ultra-accommodante visant à relancer la croissance en faisant chuter le yen. Après avoir plongé suite à l’annonce cette nuit, le yen reprenait 0,7% face au dollar, à 89,02. Depuis septembre 2012, le yen s’est affaibli de 15% contre dollar.

Cette politique montre cependant déjà ses limites, l’assouplissement ne réussissant pas à se traduire en crédits. Les dépôts des banques à la BoJ s'élèvent 40.000 milliards de yens. «Les institutions financières ont déjà des montants énormes d’excédents de réserves qu’ils ne peuvent pas utiliser» estime Izuru Kato, chef économiste chez Totan Research. Par ailleurs, elle est loin de faire l’unanimité auprès de ses partenaires. Le président de la Bundesbank a vivement critiqué hier le gouvernement japonais qui «intervient massivement dans les affaires de la banque centrale», ce qui conduit à «la politisation du taux de change». Jens Weidmann alerte en outre que «jusqu’à présent le système monétaire international a passé la crise sans avoir recours à des dévaluations compétitives et j’espère qu’il en restera ainsi».

Le président de l’Eurogroupe Jean-Claude Juncker avait déjà estimé la semaine dernière que le niveau de l’euro est «dangereusement élevé». Jusqu’à présent, la BCE ne semble pas prête à opter pour un objectif de croissance passant par le taux de change. Si Mario Draghi a reconnu l’importance du niveau du taux de change «pour la croissance et la stabilité», il avait rejeté l’idée d’en faire un objectif de politique monétaire.

Mais l’euro est fortement pénalisé par cette inertie. Marco Valli, économiste chez UniCredit, estime qu’une appréciation de l’euro de 10% ôte 0,8 point de croissance à la zone au bout de six mois. Depuis fin juillet 2012, l’euro s’est renforcé de 10% contre dollar et de 26% contre yen. Et l’Europe n’est pas la seule à taper du poing sur la table. Les partenaires asiatiques du Japon voient également d’un mauvais œil l’envolée de leurs devises face au yen. Le won coréen a gagné 27% depuis juin 2012, le dollar australien 24%, et la roupie indienne 20%.

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