H2O AM a rendez-vous à l’AMF sur le banc des accusés

La société de gestion devrait passer ce vendredi devant la Commission des sanctions de l’AMF. Par ailleurs, un procès au civil se dessine.
Jean-Loup Thiébaut
AMF plaque
L’Autorité des marchés financiers entendra ce vendredi la société de gestion H2O AM.  -  Photo DR

H2O AM joue gros en cette fin de semaine. La société de gestion devrait se présenter ce vendredi devant la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF), lors de la séance mensuelle ouverte au public, ont précisé plusieurs sources à L‘Agefi. Cette audience devrait porter sur des manquements aux règles de marché concernant les investissements de H2O AM dans des actifs privés. L’AMF n’a, pour sa part, pas confirmé ces informations.

L’audience devrait permettre de connaître l’identité des mis en cause, l’exposé des griefs et les sanctions disciplinaires encourues. Les deux fondateurs, Bruno Crastes et Vincent Chailley, seraient également poursuivis, selon Bloomberg. Le jugement ne devrait intervenir que quelques semaines plus tard, avec la possibilité pour les deux parties d’interjeter appel. Toutefois, H2O AM a indiqué à l’agence américaine avoir déjà provisionné les risques financiers relatifs à cette procédure.

Ces actifs privés devraient concerner, sans grande surprise, les obligations illiquides de la société Tennor, qui collent à H2O AM depuis avril 2019. Plusieurs fonds de sa gamme détenaient pour 1,6 milliard d’euros de ces titres, dont la part dans plusieurs fonds Ucits dépassait le plafond légal de 10% d’actifs non cotés de la valeur liquidative des portefeuilles. Ces obligations ont été placées dans une dizaine de fonds de cantonnement fin août 2020, sous la pression de l’AMF, pour une période initiale de quatre semaines. Les porteurs de parts à date possèdent donc, depuis lors, des parts dans ces fonds de cantonnement.

Deux ans plus tard, les titres n’ont toujours pas été vendus. Mais ils ont été dévalorisés entretemps de 35%. La société de gestion, qui publie chaque mois la valeur liquidative de ces fonds de cantonnement, n’a d’ailleurs toujours pas mis à jour ces documents pour le mois d’octobre. Les investisseurs sont donc encore dans l’attente d’un défaut, ou d’un hypothétique remboursement des obligations du groupe Tennor.

H2O AM va également faire face à un procès au civil

Les ennuis judiciaires sont nombreux pour H2O AM. Dans un premier temps, la société de Bruno Crastes est aussi poursuivie par la Financial Conduct Authority pour la revente d’obligations illiquides à l’homme d’affaires allemand Lars Windhorst. Dans le rapport aux comptes 2021 de son entité britannique H2O Asset Management LLP, publié à l’été 2022, la société avait provisionné 890.000 livres (1 million d’euros) dansl’attente du résultat de l’enquête du gendarme financier britannique. «Les investigations étant en cours, il n’est pas possible d’en prédire le résultat final et donc s’il existe un impact financier potentiel pouvant être estimé de manière fiable», indiquait alors l’audit réalisé par Mazars.

Mais surtout, les regards de la Place de Paris vont bientôt se tourner vers un procès au civil en France. H2O AM va en effet se voir délivrer au début de l’année 2023 une assignation à comparaître, a révélé Maître Dominique Stucki, qui représente l’association Collectif Porteurs H2O, à NewsManagers (groupe Agefi). Ce collectif, qui regroupe désormais plus de 1.600 investisseurs professionnels et particuliers s’estimant lésés par la gestion de H2O AM, s’est décidé à porter l’affaire devant les tribunaux à la suite du soutien qu’il a reçu de la société de financement de litiges Deminor.

Le collectif va notamment s’appuyer sur les résultats d’un rapport d’Eric Pinon attendu d’ici à fin décembre. L’ancien président de l’Association française de la gestion (AFG) a été désigné par le Tribunal de Commerce de Paris en juin dernier comme technicien constatant pour certifier plusieurs dizaines de pièces relatives aux investissements de H2O AM dans les obligations du groupe Tennor. « Cette expertise doit permettre notamment de connaître les prix d’achat, de possibles ventes, la moins-value enregistrée et le manque à gagner avec l’argent qui dort depuis tout ce temps », expliquait en septembre Gérard Maurin, conseiller en gestion de patrimoine et fondateur de l’association. Nul doute que le collectif étudiera attentivement le rapport de la Commission des sanctions.

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