Cryptomonnaies : un actif à nul autre pareil

L’ascension est fulgurante. En quelques années, les cryptomonnaies – bitcoin en tête – sont passées du statut d’obscurs objets numériques réservés aux férus de technologie à celui d’actifs financiers pesant plusieurs centaines de milliards de dollars.

Selon Morningstar, la valorisation des 100 premières monnaies digitales approchait même les 1.700 milliards de dollars à fin janvier 2022. A lui seul, le bitcoin dépassait 700 milliards de dollars de capitalisation ce mardi 12 avril, soit plus que les 500 milliards de Meta (ex-Facebook) et pas si loin des 800 milliards d’Alphabet (Google).

Comme le résume Madeline Hume, analyste chez Morningstar, dans une récente étude : «Les cryptomonnaies sont devenues trop grosses pour être ignorées».

300 fois plus gros

Reste à savoir comment appréhender ces nouveaux actifs nés il y a moins de 15 ans et qui ne reposent sur aucun sous-jacent tangible.

Un premier constat s’impose. L’incroyable expansion du marché, dont la taille a été multipliée par plus de 300 en sept ans selon les chiffres de CoinGecko, tient autant à l’envolée des prix des deux cryptomonnaies historiques, le bitcoin et l’ether, qu’à l’émergence de nouveaux acteurs (appelés «Altcoins»). Le poids du bitcoin dans l’écosystème est ainsi tombé de 90% fin 2016 à moins de 43% début 2022 alors même que son cours a progressé en moyenne de 103% par an sur la période, rapporte Morningstar.

Cette fulgurante ascension n’a pas pour autant été un long fleuve tranquille. Réputées hautement volatiles, les cryptomonnaies sont en effet sujettes à de violentes variations de court terme. Après avoir touché un record historique à 69.000 dollars en novembre 2021, le bitcoin a par exemple plongé de 50% en moins de trois mois. Fin 2017, le cours de l’ether avait été multiplié par quatre en quelques semaines, avant de perdre la totalité de ses gains au cours des trois mois suivants.

Cinq fois plus volatiles

Au global, Madeline Hume de Morningstar estime que, depuis 2015, les cryptomonnaies affichent un niveau de volatilité «sans aucune mesure avec n’importe quel autre actif». Elles seraient «plus de cinq fois plus volatiles que l’indice MSCI ACWI (qui mesure la performance des actions mondiales, ndlr)». Et encore, «ces chiffres intègrent les variations des stablecoins», des cryptomonnaies par nature moins instables car elles sont indexées sur le prix d’actifs traditionnels (dollar, euro, or…).

Ce haut niveau de volatilité ne signifie pas pour autant que les cryptomonnaies se contenteraient d’amplifier les mouvements des marchés financiers. Bien au contraire. Selon l’analyste de Morningstar, les cryptos affichent un faible niveau de corrélation avec toutes les autres classes d’actifs. Le marché dont elles sont le plus proches est celui des actions des pays développées (mesurées par l’indice MSCI EAFE) avec une corrélation de seulement 0,28 en moyenne depuis 2015.

Le coefficient tombe à 0,20 pour les obligations à haut rendement (high yield) américaines, à 0,10 pour les matières premières et à 0,09 pour les obligations américaines. Une légère corrélation négative de -0,1 n’est observée qu’avec les bons du Trésor américain à trois mois.

A titre de comparaison, d’autres actifs affichent des niveaux de corrélation entre eux bien plus élevés : de 0,64 à 0,80 entre le high yield et les actions et de l’ordre de 0,5 entre les matières premières et les marchés boursiers.

La relative autonomie des cryptomonnaies vis-à-vis des autres actifs explique sans doute une partie de l’intérêt croissant des grands investisseurs pour ce marché qu’ils voient comme un nouveau canal de diversification.