
Les administrateurs salariés ont vocation à siéger dans tous les comités du conseil

Un atout insuffisamment utilisé. L’administrateur représentant les salariés (ARS) ou les salariés actionnaires (ARSA) n’a pas encore pris toute sa place dans la gouvernance des entreprises françaises.
La loi Pacte de 2009 a renforcé le rôle des ARS, en en imposant deux pour les sociétés de plus de 1.000 salariés. Dès 2013, avec la démocratisation des administrateurs salariés, l’Institut français des administrateurs (IFA) avait publié un guide pour accompagner ces administrateurs. Il vient d’en dévoiler une nouvelle version, intitulée «Les administrateurs représentant les salariés dans la gouvernance, une réalité fructueuse». Mardi, lors d’une conférence en ligne, Denis Terrien, le président de l’IFA, a rappelé «l’impact très positif» des ARS sur la gouvernance. «Grâce à son regard unique sur la marche des affaires, l’administrateur salarié permet une plus grande diversité dans le conseil, source d’une meilleure qualité de la décision, ajoute Denis Terrien. En outre, il fluidifie les rapports dans le dialogue social.» Aussi, l’IFA recommande aux sociétés – quelles que soient leur taille et leur structure juridique – de favoriser la représentation des ARS dans leur conseil et dans leurs comités.
La spécificité de ces administrateurs nécessite des adaptations. Notamment avec une formation et une intégration le plus en amont possible. Dès qu’un salarié est candidat, l’entreprise devrait faciliter une rencontre avec le président et le secrétaire du conseil pour mettre en place un parcours de formation. Formation qui «ne devrait pas se limiter à quarante heures la première année», estime Hugues Epaillard, administrateur représentant les salariés de BNP Paribas, coprésident du club des ARS de l’IFA. Et une formation qui doit se maintenir tout au long du mandat. «Un seul mandat, c’est insuffisant pour être pleinement efficace, tellement le temps d’apprentissage est long, résume Marie-Christine Lebert administratrice représentant les salariés de Worldline Global, coprésidente du club des ARS de l’IFA. Il faut du temps pour avoir de l’influence.»
Chez EDF, les ARS peuvent consacrer jusqu’à 50% de leur temps à leur mandat d’administrateur, précise Anne-Charlotte Porret, secrétaire du conseil d’administration d’EDF, coprésidente du club des secrétaires de conseil de l’IFA. Aussi, pour tous, il est nécessaire d’aménager leurs fonctions opérationnelles et d’accompagner leur manager. La sortie de mandat se prépare également. Si, autrefois, ces sièges étaient occupés en fin de carrière, ce n’est plus le cas aujourd’hui. «Avec les RH, nous valorisons cette expérience après le mandat», explique Anne-Charlotte Porret.
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L’influence passe par la présence dans les comités
En 2021, 14% des administrateurs du SBF 120 étaient des administrateurs salariés (ou actionnaires salariés), contre 7% en 2015, selon le baromètre IFA-Ethics & Boards. Et leur participation aux comités spécialisés s’accroît chaque année. En 2021, ils étaient présents dans 20% des comités d’audit, 33% des comités de nomination, 40% des comités stratégique, RSE ou investissement, et 58% des comités de rémunération. «L’intégration des ARS en France pourrait être un exemple pour l’Europe», anticipe Denis Terrien.
Cette intégration au conseil passe aussi par la participation aux comités. Chez EDF, statutairement, chaque comité doit comprendre au moins un ARS. Le code Afep-Medef recommande seulement une présence dans le comité des rémunérations. Toutefois, l’an dernier, un rapport du Trésor préconisait des ARS dans les différents comités. En effet, l’ARS, comme tout administrateur, a sa place dans tous les comités. «Pour porter les intérêts et la voix des salariés dans la prise de décision du conseil, mieux vaut siéger au comité stratégique qu’à celui des rémunérations», souligne Marie-Christine Lebert. «Il faut tendre vers un ARS dans chaque comité, ajoute Hugues Epaillard. Il apporte la connaissance interne de l’entreprise.» Dans un comité, «les échanges sont plus fluides et plus interactifs et les ARS y sont plus à l’aise», reconnaît Anne-Charlotte Porret. Pour une question d’influence, c’est «absolument essentiel d’être dans les comités, lieux des débats et de préparation des décisions qui seront prises au conseil», résume Marie-Christine Lebert.
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Comment communiquer aux salariés ?
Au sein des entreprises demeurent parfois des idées reçues, comme le risque de rupture de la confidentialité, obligation essentielle de tout administrateur. «En pratique, quand il y a indiscrétion, cela ne vient jamais des ARS», constate Hugues Epaillard. La confidentialité vaut aussi pour tous. La direction n’a pas à dévoiler le sens du vote des ARS.
En revanche, «on ne peut pas couper les ARS des salariés qui les ont élus, poursuit Anne-Charlotte Porret. Chez EDF, on tolère les lettres d’administrateur pour rendre compte du mandat aux salariés. L’équilibre est subtil pour respecter la collégialité du conseil et la confidentialité». A l’IFA, le club des ARS travaille sur ce sujet sensible de la communication des administrateurs salariés au personnel. «Il y a de l’espace pour donner des informations, et pour enrichir la compréhension de la gouvernance et des décisions de l’entreprise», estime Marie-Christine Lebert. Une option serait de discuter avec tout le conseil de la communication aux salariés. L’Afep et le Medef devraient s’emparer de cette question, conclut Hugues Epaillard.◆
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