Le président de l’AMF utilise régulièrement le recours incident

Insatisfait des décisions de la commission des sanctions, il a fait appel des dossiers Safetic et Europacorp. Une procédure équilibrée, selon des avocats.
Bruno de Roulhac

Depuis août 2011, le président de l’AMF a la possibilité de former un recours contre une décision de la commission des sanctions. Cette procédure a été utilisée une dizaine de fois, dont les deux dernières sur des sanctions de 2014.

Le premier recours incident concerne Patrick Fornas, PDG de Safetic, condamné à 90.000 euros (le Collège avait demandé 130.000 euros) pour information financière inexacte et utilisation d’information privilégiée. Le second recours vise Europacorp, condamné au titre de l’information financière à 200.000 euros (contre 300.000 euros demandés par le Collège), mais la commission n’a pas retenu tous les griefs.

Devant la cour d’appel de Paris, les représentants de l’AMF devront-ils donc alors défendre deux positions contradictoires, celle de la commission et celle du Collège? «La procédure actuelle nous semble équilibrée, estime Julien Vandenbussche, avocat chez Herbert Smith Freehills. En appel, ce sont les services du Collège qui représentent l’AMF et soutiennent donc la position du président en cas de recours incident et non celle de la commission des sanctions. Une procédure normale et équilibrée, puisque c’est la décision de la commission qui est contestée».

Cette situation «semble de prime abord schizophrénique. Cependant, elle procède de la séparation organique entre, d’une part, le Collège, dont le rôle d’autorité de poursuite s’apparente à celui du parquet et, d’autre part, la commission des sanctions qui assume quant à elle le rôle du juge, explique Frédérick Lacroix, avocat associé chez Clifford Chance. De ce fait, il n’y a pas vraiment d’obstacle conceptuel à ce que le président de l’AMF, qui préside le Collège, puisse former un recours, à titre principal comme incident, contre une décision de la commission des sanctions. En créant cette voie de recours, la loi de 2010 n’a fait que tirer les conséquences logiques de l’indépendance de la commission des sanctions à l'égard du Collège».

En attendant, le débat devrait reprendre de plus belle avec les discussions actuelles autour de la règle du non bis in idem, selon laquelle une personne ne peut être jugée deux fois pour les mêmes faits. Le Conseil constitutionnel doit se prononcer très prochainement sur ce cumul de peines. Si le système changeait, sous la pression de Bruxelles, le champ d’action de la commission des sanctions pourrait alors être réduit.

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