Le pouvoir accru de l’Etat dans les OPA incite au dialogue préalable

L’investisseur étranger en France doit être en mesure d’anticiper les sujets de blocage liés au rachat d’une entreprise dans un secteur stratégique.
Yves-Marc Le Réour

Entré en vigueur voici plus d’un an, le «décret Montebourg» a encore élargi le nombre de secteurs stratégiques soumis à autorisation préalable pour des opérations de M&A émanant d’investisseurs étrangers. «Plus de la moitié des entreprises du CAC 40 et les deux tiers de celles du SBF 120 sont désormais susceptibles d’entrer dans le périmètre d’application de ce dispositif», relevait hier Isabelle MacElhone, associée du cabinet Reed Smith, lors d’une réunion organisée sur le sujet.

Rappelant que de nombreux pays, y compris en Europe, ont mis en place une législation similaire, elle estime que «l’extension du champ d’intervention de l’Etat n’a pas remis en cause le principe général de liberté des investissements étrangers, qui doit seulement intégrer le processus réglementaire». L’obligation de déclaration qui incombe à un acquéreur étranger, si son projet de rapprochement touche l’un des 16 secteurs stratégiques définis, s’accompagne en effet d’un pouvoir de négociation renforcé du ministre de l’Economie. Le décret du 14 mai 2014 stipule notamment que le ministre peut subordonner l’octroi de son autorisation à la cession de l’activité essentielle exercée par la cible française à une entreprise indépendante de l’investisseur étranger.

L’acquéreur potentiel a donc intérêt à abandonner une logique «de guichet», qui consiste à procéder à un simple dépôt de demande, pour nouer en amont de l’opération envisagée un dialogue informel avec l’administration, dialogue qui sera poursuivi en permanence durant la phase d’instruction qui dure deux mois. En anticipant les sujets potentiels de blocage, l’investisseur aura une plus grande visibilité sur la faisabilité de la transaction, sachant que la décision finale des pouvoirs publics français doit dans tous les cas être motivée, contrairement à la pratique de l’administration américaine.

Pour des transactions d’envergure (Alstom/GE, Alcatel/Nokia), le dispositif, qui vise initialement à protéger les intérêts français en matière d’ordre public, de sécurité ou de défense nationale, pourra aussi servir à poursuivre des objectifs relevant d’autres politiques publiques, comme le maintien de l’emploi ou la préservation des centres de R&D sur le territoire national. Pour renforcer les chances d’un accord, l’investisseur étranger aura parfois intérêt à favoriser l’entrée directe ou indirecte de l’Etat au capital de la cible comme investisseur minoritaire.

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