
CNP Assurances va devoir manœuvrer pour s’ouvrir à l’assurance dommages

Le futur grand pôle financier public va faire de la Caisse des Dépôts le principal actionnaire de La Poste, et La Banque Postale celui de CNP Assurances. Au-delà des changements actionnariaux, prévus début 2020, le projet vise à faire de La Banque Postale un bancassureur à part entière. Pour renforcer l’usine à produits de CNP, «nos plates-formes d’assurance LBP Prévoyance et LBP IARD [assurance dommages] ont vocation à rejoindre CNP», a déclaré en juillet Rémy Weber, le président du directoire de La Banque Postale.
«Cela a du sens de vouloir se diversifier dans un contexte de taux bas qui pénalise l’assurance vie en euros, mais le marché français est très concurrentiel, explique un analyste crédit. Le groupe fait déjà de l’assurance dommages au Brésil et à Chypre. En Europe, le contexte est favorable à ces activités, avec un ratio combiné (charges sur primes encaissées, ndlr) de 94% en moyenne au premier semestre chez les grands assureurs, du fait d’une plus faible sinistralité». En prévoyance aussi, CNP a déjà de l’expérience et en tire les fruits. «Sa petite activité de prévoyance-protection est presque aussi rentable que l’assurance vie. Au premier semestre, elle a généré 3,39 milliards d’euros de chiffre d’affaires (primes encaissées, ndlr) pour un résultat brut d’exploitation de 661 millions, contre respectivement 14,18 milliards et 542 millions en épargne-retraite», pointe Bassem Neifer, analyste chez AlphaValue.
Création d’une holding
Pour autant, transformer un spécialiste des contrats vie en un supermarché multiproduits prendra du temps. «Il y a un problème technique : CNP est une compagnie d’assurance vie, relève un bon connaisseur du dossier. Il faut un autre agrément pour l’IARD». Et créer une filiale dédiée aux dommages dans l’organisation actuelle impliquerait de remonter ses dividendes dans la compagnie d’assurance vie, donc de les partager avec les assurés de celle-ci. Pour contourner l’écueil, CNP Assurances pourrait se transformer en «holding», avec une filiale par grand métier, sur le modèle de Crédit Agricole Assurances avec Predica et Pacifica. «Il faut que le bénéfice de la diversification soit là où sont [logées] toutes les branches de risques pour [en tirer un avantage dans le régime] Solvabilité 2. Le marché préférera que ce soit la holding qui soit cotée [plutôt que la compagnie vie]», estime la source. «Les aspects réglementaires ne sont pas vraiment un obstacle, mais il peuvent être coûteux», note de son côté Bassem Neifer, analyste chez AlphaValue.
Ce chantier juridique et prudentiel ne prendra «pas moins de 18 mois», pour aboutir sans doute en «2022». L’accord existant dans l’assurance dommages entre La Banque Postale et Groupama aura justement expiré en 2021. CNP pourrait alors racheter les 65% détenus par sa nouvelle maison mère dans La Banque Postale Assurances IARD, mais aussi les 35% de Groupama. En contrepartie, l’assureur mutualiste pourrait continuer à réassurer l’activité, le temps que CNP apprivoise le sujet, indique la source proche du dossier.
Au préalable, il faudrait réorganiser la compagnie d’assurance vie. CNP devrait récupérer La Banque Postale Prévoyance, co-fondée par CNP mais qui appartient désormais à 100% à La Poste, et lui apporter ses propres activités de prévoyance. Une fois cette étape franchie, la compagnie se transformerait en holding avec une filiale vie-prévoyance et une filiale dommages.
L’assurance santé en suspens
Reste une inconnue : le sort de l’assurance santé, un métier dans lequel La Banque Postale a une JV avec Malakoff Médéric et La Mutuelle Générale. Alliée historique du groupe postal, cette dernière cherche à s’adosser et La Banque Postale est régulièrement citée parmi les prétendants. «Peut-être que globalement le groupe de bancassurance que nous allons devenir aura un rôle à jouer dans la consolidation», avait déclaré prudemment Rémy Weber en novembre dernier, dans une interview aux Echos. Une fusion avec CNP «n’a pas d’intérêt économique, tranche l’informateur. La Mutuelle Générale cherche une autre solution». Certes, le groupe mutualiste dispose d’un trésor de guerre, avec 821 millions de fonds propres à fin 2018, mais l’activité de ses 1.990 collaborateurs n’a généré que 4,9 millions d’euros de profits l’an dernier, contre 1,37 milliard chez CNP, qui employait alors 2.870 personnes. Outre ce déséquilibre, La Mutuelle Générale dispose de ses propres réseaux de distribution, quand CNP mise sur des partenaires extérieurs tels que La Banque Postale, BPCE et des banques étrangères à l’international.
En devenant l’assureur dommages de La Banque Postale, CNP pourrait essaimer hors de France, en proposant par exemple ses produits à l’espagnol Santander, qui l’a déjà choisi comme assureur de sa branche de crédit à la consommation, mais aussi à l’italien UniCredit, dont il fabrique les contrats vie.
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Nucléaire iranien : un nouveau cadre de coopération convenu entre l'Iran et l'AIEA
Le Caire - L’Iran a annoncé mardi avoir convenu d’un nouveau cadre de coopération avec l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), après avoir suspendu sa collaboration avec le gendarme onusien du nucléaire dans le sillage de la guerre contre Israël en juin. Le directeur de l’AIEA, Rafael Grossi, a salué «une étape importante dans la bonne direction». Il a indiqué sur X s'être entendu lors d’une réunion au Caire avec le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi «sur des modalités pratiques pour reprendre les inspections en Iran» des activités nucléaires. La rencontre au Caire, à laquelle a participé le ministre égyptien des Affaires étrangères Badr Abdelatty, était la première entre MM. Araghchi et Grossi depuis la guerre de 12 jours déclenchée par une attaque israélienne sur l’Iran en juin. Le dossier du nucléaire iranien empoisonne de longue date les relations de l’Iran avec les Occidentaux. Les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, et Israël, ennemi juré de l’Iran, soupçonnent le pouvoir iranien de vouloir se doter de la bombe atomique. L’Iran dément vigoureusement avoir de telles ambitions militaires mais insiste sur son droit au nucléaire pour des besoins civils. Après la rencontre au Caire, le porte-parole de la diplomatie iranienne, Esmaïl Baghaï, a annoncé que «l’Iran et l’AIEA étaient parvenus à une entente sur la manière d’agir dans ce nouveau contexte, après les attaques illégitimes menées par les Etats-Unis et le régime sioniste contre les installations nucléaires pacifiques de notre pays», sans autre précision. «Nouvelle relation» Plus tard, MM. Araghchi et Grossi ont signé un accord intitulé «Modalités techniques pour la mise en œuvre des inspections». M. Abdelatty a dit espérer que l’accord «marquera le véritable point de départ d’une nouvelle relation entre les deux parties, caractérisée par une plus grande transparence». Il a aussi espéré qu’il «favorise une entente» d’abord avec les pays européens ayant menacé de rétablir les sanctions contre l’Iran, puis «conduise à un retour à la table des négociations entre l’Iran et les Etats-Unis». MM. Araghchi et Grossi ont ensuite rencontré le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, qui a salué «une étape positive vers la désescalade». Téhéran avait suspendu sa coopération avec l’AIEA après la guerre déclenchée le 13 juin par une attaque sans précédent d’Israël sur le sol iranien. L’Iran avait reproché à l’AIEA de ne pas avoir condamné les bombardements israéliens, puis américains, qui ont visé ses installations nucléaires durant le conflit. Téhéran estime également que l’AIEA a une part de responsabilité dans le déclenchement de l’attaque israélienne surprise, car elle a été lancée au lendemain du vote d’une résolution critique sur le programme nucléaire iranien au siège de l’agence à Vienne. Depuis juillet, une loi votée au Parlement iranien bannit en principe toute coopération avec l’AIEA. Menaces de sanctions Des inspecteurs de l’agence ont néanmoins fait un bref retour en Iran fin août pour remplacer le combustible du site de Bouchehr, la principale centrale nucléaire de production d'électricité du pays. Mais ils n’avaient pu accéder aux sites bombardés en juin et dont l'étendue exacte des dégâts n’est pas connue. La rencontre entre MM. Araghchi et Grossi est intervenue au moment où la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne (groupe E3) menacent de rétablir fin septembre des sanctions contre l’Iran, suspendues depuis 2015 par un accord international sur le nucléaire conclu alors avec Téhéran. Une clause de cet accord, enclenchée fin août, permet le rétablissement de ces sanctions si une partie estime que l’Iran ne respecte pas ses engagements. L’accord de 2015, signé par l’E3, les Etats-Unis, la Chine, la Russie et l’Iran prévoyait d’importantes restrictions au programme nucléaire de Téhéran en échange de la levée progressive des sanctions. En 2018, sous le premier mandat du président Donald Trump, les Etats-Unis avaient décidé de s’en retirer et avaient rétabli leurs propres sanctions. Téhéran s'était ensuite affranchie de certains engagements, en accélérant l’enrichissement d’uranium. L’Iran a enrichi de l’uranium au niveau élevé de 60%, selon l’AIEA, niveau proche du seuil de 90% requis pour la fabrication d’une bombe atomique. © Agence France-Presse -
La bourse de New York termine sur des records dans l'attente des taux de la Fed
Washington - La Bourse de New York a terminé à de nouveaux sommets mardi, abordant avec optimisme la publication de plusieurs indicateurs d’inflation aux Etats-Unis susceptibles de donner de nouveaux indices sur la trajectoire monétaire privilégiée par la Réserve fédérale (Fed). Le Dow Jones a avancé de 0,43%, à 45.711,34 points, l’indice Nasdaq a pris 0,37% à 21.879,49 points et l’indice élargi S&P 500 a gagné 0,27% à 6,512,61 points. «Le groupe des mégacapitalisations a joué un rôle moteur en contribuant à soutenir les principaux indices», souligne auprès de l’AFP Patrick O’Hare, de Briefing.com. Nvidia a ainsi gagné 1,46%, Alphabet (Google) 2,39% et Amazon a avancé de 1,02%. Globalement, les investisseurs sont «dans l’expectative des données sur l’inflation, avec l’indice des prix à la production (PPI) qui sera publié mercredi, puis jeudi avec l’indice des prix à la consommation (CPI)», relève Patrick O’Hare. «Les acteurs du marché s’attendent non seulement à ce que la Fed abaisse ses taux en septembre, mais aussi en octobre et en décembre», note l’analyste. Selon l’analyste, les données sur l’inflation donneront par conséquent «une base pour réévaluer la probabilité de ces baisses de taux». La banque centrale des Etats-Unis est investie d’un double mandat pour le pays, consistant à la fois à surveiller le marché de l’emploi et à maintenir l’inflation proche de 2% sur le long terme. Toutefois, prévient M. O’Hare, «il semble que les marchés financiers se concentrent davantage sur l’affaiblissement du marché du travail que sur les données d’inflation pour le moment». Mardi, ils ont gardé un oeil sur la forte révision à la baisse des chiffres de l’emploi américain entre avril 2024 et mars 2025, sans pour autant y réagir négativement. Selon le Bureau des statistiques du travail (BLS), les entreprises américaines ont au final créé 911.000 emplois de moins sur l’ensemble de l’année fiscale 2024-2025, soit quasiment deux fois moins que ce qui avait été rapporté initialement. «Pour ce marché, les mauvaises nouvelles économiques sont synonymes de bonnes nouvelles en matière de baisse des taux», résume Patrick O’Hare. Dans ce contexte, sur le marché obligataire, le rendement des emprunts d’Etat américains à échéance 10 ans se tendait par rapport à la clôture lundi, à 4,08% contre 4,04%. Côté entreprises, Apple (-1,48% à 234,35 dollars) a souffert de la présentation de sa nouvelle gamme d’iPhone 17. L’entreprise a présenté un modèle «Air» ultrafin, a promis des progrès sur l’autonomie et les objectifs photographiques, mais n’a pas annoncé d’avancées majeures pour rattraper son retard dans l’intelligence artificielle (IA). La firme de Cupertino (Californie) a aussi annoncé que les prix des nouveaux iPhone devraient augmenter aux Etats-Unis en raison des droits de douane imposés par le président Donald Trump, qui alourdissent les coûts de production en Chine, toujours le principal centre de fabrication de la marque à la pomme. La start-up américaine spécialisée dans l’informatique à distance («cloud computing») CoreWeave a bondi de 7,13% à 100,22 dollars après avoir annoncé le lancement d’un fonds de capital-risque dédié aux investissements dans l’IA. Le spécialiste néerlandais des infrastructures et services IA Nebius (+49,42% à 95,72 dollars) s’est envolé à l’annonce d’un partenariat avec Microsoft. Nebius dédira une partie des ressources de son nouveau data center au géant américain de l’informatique. Nasdaq © Agence France-Presse