
Les trésoriers voient plus grand

Pour maîtriser l’enjeu majeur du cash, les entreprises veulent connaître d’un seul coup d’œil tous ses circuits et ses utilisations. « La tendance est à la centralisation des décisions et à l’élargissement du rôle du trésorier », observe Jacques Levet, head of transaction banking EMEA chez BNP Paribas CIB.
Pour lui fournir cette vision unifiée des soldes de comptes et des flux, les banques continuent d’investir dans l’harmonisation de leur offre. Chez Deutsche Bank, le pôle global transaction banking (GTB), qui recouvre le trade, le cash management et les transactions, est aligné dans tout le groupe. « Ce modèle est reproduit dans tous les pays où la banque transactionnelle est présente, il fonctionne à partir d’un système informatique unique dans le monde et se décline jusqu’aux fonctions de back-office, juridique et de conformité, expose Cyril Blas, responsable GTB de Deutsche Bank France. Les clients veulent pouvoir aborder la banque comme une même organisation d’un pays à l’autre. » Autre exemple, ING a annoncé en octobre 2016 un plan d’investissement de 800 millions d’euros dans des projets d’harmonisation de ses plates-formes. L’idée est de rendre le plus simple possible l’accès aux services de la banque. HSBC Net multimétiers propose ainsi, de longue date, une authentification unique pour accéder à son portail de cash management et de trade. « L’usage vient d’en être renforcé avec un accès possible au portail depuis un plus grand nombre de pays, explique François-Xavier Nivoit, chef de produits cash management chez HSBC France. Les entreprises ont compris le bénéfice de ce portail pour leurs opérations quotidiennes de base. »
Solution omnicanal
Mais plus qu’un service harmonisé, les banques veulent proposer une vision élargie de la trésorerie, indépendamment de la banque utilisée. « Les grands groupes restent avant tout intéressés par le suivi précis de leurs soldes de comptes. Notre portail Sogécashweb leur offre une vision multibancaire. Il reste beaucoup de formats locaux et la banque doit pouvoir gérer cette variété de façon fluide », indique Pascal Augé, directeur global transaction and payment services à la Société Générale.
Les banques se retrouvent en concurrence sur ce terrain avec les éditeurs de logiciels, et HSBC et la Bred ont même investi dans Kyriba, éditeur de logiciels de trésorerie en mode Saas (software as a service), pour rester à la pointe de l’offre. Certains établissements ont recours à un prestataire pour agréger sur une plate-forme, telle une place de marché, les services dont le trésorier a besoin (voir le schéma). La fameuse « expérience utilisateur » y est privilégiée. « Les banques sont en train de basculer vers un système omnicanal, le trésorier voulant un accès uniformisé à tous les métiers de la banque, un mot de passe unique pour aller vers toutes les applications, relève Hubert Lecomte, responsable développement chez Coconet. Nous proposons aux grandes banques, américaines et européennes, des solutions – en général en marque blanche – pour adapter leurs systèmes, souvent anciens, interconnecter les applications. »
Dans les entreprises moyennes aussi, la demande de solutions prêtes à l’emploi se fait jour. Le groupe CM11-CIC est en train d’élargir son offre en ce sens. « Pour accompagner les entreprises, nous avons décidé de travailler sur des solutions qui leur sont dédiées, notamment les PME et les professionnels, en leur offrant un accès à un panel d’applications, fait savoir Cédric Guarnotta, directeur commercial et cash management au Crédit Mutuel – (Groupe CM11-CIC) Global Payment Solutions. Nous proposons déjà une solution de ‘cash pooling’ multibancaire et travaillons à lui apporter de nouvelles fonctionnalités (gestion de trésorerie, des pouvoirs bancaires...). »
L’innovation et l’enrichissement des offres sont en train de s’accélérer avec la mise en œuvre de la DSP2, la directive sur les services de paiement, applicable l’an prochain et qui va ouvrir l’accès aux comptes et aux informations des banques. « La DSP2 ouvre la possibilité aux entreprises d’obtenir plus rapidement et pour moins cher les informations bancaires, en se rapprochant du temps réel », précise Cédric Guarnotta.
Les banques disposent avec ce texte de nouvelles possibilités de cash management. « Elles doivent utiliser la DSP2 à leur avantage. Nous leur proposons notamment d’offrir aux entreprises de taille moyenne ou petite une vision agrégée de leurs soldes de comptes et nous y ajoutons des possibilités de virements de compte à compte, comme dans un ‘cash pooling’ manuel, explique Hubert Lecomte. Ces opérations peuvent être faites en temps réel. »
Instantané
De même, le paiement instantané ne concerne pas directement les entreprises, le paiement des intérêts se faisant en jours. Toutefois, « l’instantanéité est le sens de l’histoire, nous l’offrons déjà pour des virements dans certains pays comme l’Inde et une offre va arriver en Europe », souligne François-Xavier Nivoit, chef de produits en cash management chez HSBC. Là encore, l’intérêt tient à l’information fournie aux entreprises, les corporates attendant désormais une vision en temps réel.
L’initiative de Swift avec le paiement GPI, qui permet la traçabilité des paiements transfrontières en temps quasi réel, va dans ce sens. Les corporates devraient être intégrés au service en fin d’année ou début 2018 s’ils sont équipés de SwiftNet. « La transparence sur les prix fait partie des nouvelles attentes des clients et Swift GPI va permettre aux corporates de voir quelles banques facturent quels coûts en même temps que l’état d’avancement d’un virement international », indique Pascal Augé.
Grâce aux technologies du big data, les banques sont déjà en mesure d’aider les entreprises à gagner en efficacité sur le besoin en fonds de roulement, au-delà de la trésorerie. Elles disposent des données sur les flux de leurs clients et construisent à partir de là des moyennes servant de références. « Nous avons développé certains outils d’aide à l’analyse comme ‘Value finder’, qui étudie le cycle d’exploitation d’une entreprise à partir de données qu’elle nous fournit via internet. L’objectif est qu’elle puisse se mesurer par rapport à d’autres acteurs sur son marché. Cet outil didactique simple est récent et rencontre déjà un fort succès », précise Vincent Liétard. BNP Paribas travaille également, en collaboration avec des clients, à l’analyse des flux. En plus d’optimiser le fonds de roulement, le recours à l’intelligence artificielle pour étudier les transactions sert à sécuriser les mouvements de fonds. « Nos exigences sur la cybersécurité sont très élevées, nos procédures très strictes pour circonscrire la question de la fraude, confie Patricia Arvanitakis, responsable du cash management chez Deutsche Bank France. Nos actions à cet égard ne sont jamais évoquées publiquement pour ne pas fournir d’idées aux fraudeurs. » L’analyse des flux et des comportements de paiement fait assurément partie de la panoplie des outils de sécurité…
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