Les financements non dilutifs séduisent la tech

Des offres émergent, destinées pour la plupart aux secteurs ayant de la visibilité sur leurs flux de trésorerie.
Virginie Deneuville
La-Banque-Postale
La Banque Postale (ici, le siège) a reçu plus de 250 sollicitations depuis le lancement de l’offre en octobre.  -  rea

Initiatives de La Banque Postale, des fintechs Karmen et Silvr, de Memo Bank… : les offres de financement non dilutif, pour la plupart dédiées à la tech, se multiplient. « Elles ont été pensées dès 2020 mais se structurent désormais et gagnent en visibilité. Elles prennent aujourd’hui tout leur sens dans un marché où les fonds ont réduit drastiquement leurs apports en equity », assure Maryam Velasque, partner chez X-PM. Avec la crise, « les entreprises se restructurent et ont besoin de financements non dilutifs en complément des fonds propres », enchaîne Nizar Dahmane, directeur du département tech de La Banque Postale.

La chute des valorisations intervenue ces derniers mois accentue cette tendance. « Elle induit une forte dilution pour les fondateurs qui doivent trouver de nouveaux apports pour gagner en flexibilité », relève Nizar Dahmane.

Ces initiatives, qui reposent sur de la dette senior à moyen-long terme ou du crédit revolving, interviennent dans un contexte de remontée des taux. Dès lors, « ce type d’offres, dont les commissions annuelles tournent autour de 5 % à 10 % du montant financé, redeviennent attractives face à la dette bancaire classique (entre 1 % et 5 %) », estime Maryam Velasque. Selon la professionnelle, si le tarif reste plus élevé, il se justifie par le fait de pouvoir obtenir de façon quasiment instantanée, et pour certains digitalisée, une avance de trésorerie. « Ces financements se révèlent beaucoup plus coûteux qu’un financement classique. Leur niveau de commissions ne peut convenir qu’à des sociétés en croissance, assurées de réaliser leur business plan, objecte Franck Portais, managing partner d’Alantra. Il vaut parfois mieux accepter un peu de dilution, comme avec la dette privée (intégrant le plus souvent une part de bons de souscription d’actions pour aller chercher du rendement, NDLR). » Certains fonds d’investissement proposent ainsi des offres de venture loans (dette privée destinée aux start-up solides et scale-up), à l’image d’Isai qui a lancé un fonds dédié en septembre dernier.

Ces financements non dilutifs cherchent à répondre aux enjeux d’une clientèle spécifique. Car « toutes les banques établies font depuis toujours du financement corporate, mais elles privilégient les sociétés ayant a minima deux bilans à leur actif », résume Maryam Velasque. Du côté des dispositifs d’Etat, les prêts participatifs, qui présentent des critères d’éligibilité tels qu’un chiffre d’affaires minimum de 2 millions d’euros, peuvent intervenir de façon complémentaire.

Ces nouvelles offres se veulent adaptées. « Nous demandons des garanties, telles que des nantissements de titres ou des covenants de trésorerie, qu’une start-up peut fournir, ce qui n’était traditionnellement pas le cas de nombre de banques », explique Nizar Dahmane. La banque offre par ailleurs la possibilité d’un remboursement in fine, sur des maturités longues (cinq ans et plus).

Niches de marché

La sélectivité est de mise. Depuis le lancement de l’offre en octobre, « nous avons reçu plus de 250 sollicitations », relève Nizar Dahmane. L’équipe, composée de huit personnes, étudie 80 demandes de façon poussée, et deux ont d’ores et déjà été conclues. « Nous détaillons chaque dossier et attribuons, grâce à un outil propriétaire (modèle de scoring), une note en fonction du couple rendement-risque », détaille Nizar Dahmane. L’équipe structure au cas par cas une part de dette (10 %-30 % généralement) de la levée equity que la start-up a réalisée, pouvant être articulée en plusieurs tranches et étalée.

Ces offres constituent des niches de marché. Dans la plupart des cas, elles ciblent des sociétés technologiques opérant dans les logiciels SaaS (Software-as-a-Service) ou dont le modèle repose sur une offre d’abonnement, offrant dès lors une forte visibilité sur les cash-flows. D’autres acteurs, tel Memo Bank, se positionnent davantage comme une banque classique avec une offre s’apparentant à du financement de découvert, avec des commissions annuelles autour de 10 %. « L’idée est ici de réduire la dilution actionnariale de PME levant en parallèle de l’equity », indique Maryam Velasque.

Autant d’offres qui cherchent à répondre aux besoins d’une clientèle à fort potentiel et au profil de risque maîtrisé, mais mal desservie.

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