
L’Etat et la Caisse des dépôts entrent dans le vif du dossier Sfil

Entre l’Etat et la Caisse des dépôts (CDC), les discussions sérieuses autour de la Sfil vont bientôt commencer. Une «management review» doit débuter la dernière semaine de février, prélude aux due diligences et aux négociations sur la valeur de la banque du financement des collectivités locales et du crédit export. Née sur les ruines de Dexia, la Sfil doit passer sous le contrôle de la CDC, aujourd’hui actionnaire à 20%, aux côtés de l’Etat (75%) et de La Banque Postale (5%). Si les grands actionnaires ont approuvé en novembre le principe de l’opération, qui suivra le même tempo que le projet de création du grand pôle public La Poste-CDC-CNP à horizon 2020, ils doivent encore s’accorder sur ses modalités, notamment son prix et la future répartition du tour de table.
Alors que la Sfil affiche 1,56 milliard d’euros de fonds propres pour une rentabilité d’environ 4%, l’institution de la rue de Lille devrait chercher à mettre beaucoup moins sur la table. Des sources proches du dossier évoquent une valorisation de 0,1 à 0,2 fois les fonds propres. «La Caisse a déjà payé cher dans le dossier Dexia. Et la Sfil n’est pas une machine à cash, ses 350 salariés n’ont pas intérêt à ce que la valorisation soit trop élevée», indique une source.
Pas de Dexia bis
Première question à trancher, le schéma de reprise. Pas question pour la Caisse de recréer un «Dexia bis» au sein du groupe. Conseillée par Lazard et Perella Weinberg, l’institution de la rue de Lille s’intéresserait surtout à la Caffil, la structure de la Sfil qui émet des obligations sécurisées, et qui lui apporterait un outil de refinancement – les covered bonds – dont elle ne dispose pas aujourd’hui.
Bien qu’un transfert direct de la Sfil à l’établissement public CDC soit la solution la plus simple, d’autres scénarios sont donc sur la table, qui verraient les activités de gestion administrative des prêts (servicing) être éclatées au sein du groupe. Bpifrance pourrait s’intéresser aux crédits export, devenus en trois ans un pilier de la Sfil avec 7,4 milliards d’euros d’opérations refinancées, tandis que La Banque Postale lorgnerait les financements aux collectivités territoriales. Le reliquat de prêts au logement social trouverait son port d’attache à la section des fonds d’épargne de la Caisse des dépôts. «Quel que soit le schéma, l’Etat veillera à ce que la mission de service public assurée par la Sfil perdure : c’est aujourd’hui une structure de place pour le financement des collectivités locales et des crédits export», indique une source proche du dossier.
La CDC, banquier de Rome et Turin ?
Une deuxième série de questions ont trait au bilan de la banque. La Caisse des dépôts a vocation à soutenir l’économie de la France, pas celle de ses voisins. Or, la Sfil portait encore en fin d’année plus de 5 milliards d’euros de prêts – sains – à des Etats ou des collectivités territoriales étrangères, telles Montréal ou Tokyo. Le gros de cet encours (4,7 milliards) est constitué d’expositions à des contreparties italiennes, comme les Villes de Rome et Turin, aujourd’hui dirigées par le sulfureux Mouvement 5 Etoiles. C’est l’héritage de Crediop, l’ex-filiale locale de Dexia. Par le passé, la Sfil a étudié l’opportunité de vendre ce portefeuille italien, dont l’extinction progressive prendrait près de trente ans. Mais les normes comptables French Gaap interdiraient toute cession, sauf cas de force majeure. Quant à la logique économique de l’opération, elle est loin d’être évidente. Au prix du marché, la liquidation de ce portefeuille non résident se traduirait par une perte de quelque 1,8 milliard d’euros pour la banque, selon les informations de L’Agefi. Un montant supérieur à ses fonds propres…
Par ailleurs, la Sfil comptait encore, fin décembre, 3,5 milliards de prêts structurés à son bilan, selon une présentation aux investisseurs. Sur ce total, on trouve 930 millions d’euros de prêts sensibles dont le taux est indexé sur des variations de change (euro/franc suisse, etc.). Une fraction, 135 millions d’euros, soit 0,35% de l’encours total du groupe, ont été «activés», c’est-à-dire qu’ils coûtent plus de 5% à l’emprunteur. Si les efforts engagés par la Sfil et l’Etat ont largement dégonflé ce stock d’emprunts toxiques, la banque fait encore face à 19 procédures engagées par des emprunteurs contre Dexia. Dernier exemple en date : le 29 janvier, l’un de ces litiges, qui concerne la commune de Carrières-sur-Seine, déboutée en appel en 2016, a fait l’objet d’une audience près la Cour de cassation. Avec, comme enjeu, l’annulation pure et simple du contrat de prêt.
«Les discussions sont préliminaires à ce stade : les termes et modalités de l’opération ne sont pas encore arrêtés, et ses impacts pour la CDC, notamment en termes de risques, devront être expertisés», indique-t-on à la Caisse des dépôts.
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