Ledger digitalise les règles d’investissement des cryptofonds

Consensus, salon international de la cryptomonnaie, New York, 15 mai 2018 : le français Ledger promet de bouleverser le monde de la gestion d’actifs avec sa dernière solution, Ledger Vault. Tout commence quatre ans plus tôt à Vierzon. La fintech développe un hardware wallet (portefeuille matériel) de la taille d’une clé USB destiné à protéger les comptes en cryptomonnaies. « Dans le cadre de transactions entre détenteurs d’une monnaie numérique, le sujet fondamental est d’assurer une totale sécurisation des secrets d’accès (“clés privées”) de chacune des parties qui procède au mouvement d’écriture, explique Jean-Michel Pailhon, vice-président en charge de la stratégie et du développement de Ledger. Cette sorte de carte à puce abrite l’identité numérique de chacun et la protège de toute potentialité de hack ou d’attaque malveillante. »

gouvernance spécifique

L’engouement pour les cryptomonnaies est tel que, en avril dernier, entre 3,5 et 5 milliards de dollars sont rassemblés dans pas moins de 251 fonds (voir illustration) investis dans ces actifs virtuels : bitcoin, ethereum, vertcoin, Zcash… mais aussi des cryptoactifs du type utility tokens (droits d’utilisation d’un service) et security tokens (titres de propriété). « Dans certains cas, les cryptofonds, non régulés, utilisent notre technologie, poursuit Jean-Michel Pailhon. Cependant, le gérant jonglait jusqu’à présent entre plusieurs clés selon la nature du cryptoactif, le montant alloué, etc. Cette situation n’est pas durable et reste risquée. » Ces maisons de gestion ont donc formulé le besoin de rassembler ces clés privées sur un seul support tout en intégrant une gouvernance spécifique à leur offre. Message entendu. Le 15 mai dernier, Ledger présentait donc Ledger Vault. La fintech a ajouté dans son modèle un composant central orchestrant la collection des autorisations et sécurisant les clés privées. Ce composant est HSM (module de sécurité matérielle), fourni par Gemalto, et fonctionne grâce au système d’exploitation Ledger qui permet ainsi « de digitaliser les règles d’investissement des gestionnaires », poursuit-il. De quoi retenir l’attention de fonds régulés.

Ledger Vault peut être configuré pour déployer les règles de dépenses et les règles d’accès à la clé propres aux maisons de gestion. Sont ainsi programmées et personnalisées toutes les règles d’investissement : les adresses publiques des plates-formes de transaction des cybermonnaies détenues dans le fonds, le montant ou le nombre de ces actifs autorisés à être arbitrés, le jour de la semaine ou le moment de la journée où les ordres doivent être passés, etc. Les règles d’accès à la clé déterminent l’identité de ceux autorisés à envoyer une demande de transaction. « Cette solution est paramétrable à l’infini », s’enthousiasme Jean-Michel Pailhon.

A New York, la fintech faisait même coup double en annonçant la naissance du consortium Komainu, qui rassemble Ledger, la banque japonaise Nomura et le hedge fund Global Advisors enregistré à Jersey et gérant de fonds investis en monnaies virtuelles depuis 2014. « Ce partenariat rassemble l’expertise de l’administration des actifs, de la gestion de fonds, du trading et de la sécurité des actifs numériques », énumère Jean-Michel Pailhon. Si, dans ce schéma opérationnel, les cryptoactifs restent dans la blockchain, il faut encore créer « un conservateur des clés privées, qui remplacerait leur simple enregistrement sur serveur », précise-t-il. Komainu pourrait faire office de « conservateur de clés ». Au Japon, les komainu sont des créatures gardiennes des temples shintoïstes. Une symbolique forte.