
La finance européenne face à un enjeu d’indépendance de sa régulation
L’Association des marchés financiers en Europe (AFME) a annoncé mardi la nomination d’Adam Farkas comme CEO en remplacement de Simon Lewis, alors que ce mouvement du directeur exécutif de l’Autorité bancaire européenne (EBA) commençait à faire couler beaucoup d’encre depuis la révélation de pourparlers fin août. Avant même cette démission qui prendra effet le 31 janvier 2020, l’organisation Finance Watch avait demandé à l’EBA de regarder ce sujet de près, estimant qu’un tel mouvement n’était pas possible au regard de l’intérêt public et de la réglementation, sans demander des conditions strictes et une période de latence («cooling-off period») de douze mois imposée par l’article 16 du statut des hauts fonctionnaires de l’Union européenne (UE), plus une période obligatoire de deux ans au cours de laquelle l’intéressé doit informer son ancien service de toute nouvelle activité pour autorisation. Transparency International recommande plutôt deux ans de latence, comme dans divers pays européens (trois en France).
L’EBA a précisé que son conseil des superviseurs avait décidé, après évaluation, qu’Adam Farkas «ne participerait plus au travail de surveillance et de politique, se concentrant exclusivement sur les questions opérationnelles jusqu’au 31 octobre», ses autres fonctions étant réaffectées le reste du préavis. Sur les conditions de son futur emploi, «il ne pourra (…) avoir de contacts professionnels avec le personnel de l’EBA pendant 24 mois, (…) ni contribuer aux activités de sa nouvelle organisation sur des sujets directement liés au travail qu’il a effectué au cours des trois dernières années de service pendant 18 mois».
Pour Benoît Lallemand, secrétaire général de Finance Watch, «ce transfert direct du superviseur au principal et très puissant lobby bancaire ne respecte pas les délais d’usage ni les guidelines au regard de la menace pour l’intérêt public : les cycles de la réglementation bancaire sont très longs, et M. Farkas connaît parfaitement les stratégies, les contacts et les éléments-clés que l’EBA met en place pour assurer un minimum de contrepoids au lobby bancaire sur les différents sujets». Finance Watch estime que, faute d’interdiction, un délai de deux à cinq ans aurait été proportionné au niveau de la menace, que l’interdiction d’interagir avec le staff de l’EBA est une règle de base au-delà de ce cas précis, et que celle de ne pas contribuer aux activités de l’AFME sur les sujets traités durant les trois dernières années en ayant des informations non publiques stratégiques en tant que dirigeant, est «impossible à vérifier».
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