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« Au-delà du cycle immobilier, les nouvelles mégatendances changent la donne »

Sienna Real Estate
Entretien avec Samy Bchir, Directeur des investissements de Sienna Real Estate.
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La crise du Covid, puis le fort rebond des taux et les incertitudes géopolitiques et économiques ont rebattu les cartes sur les marchés immobiliers. Comment analysez-vous les nouvelles tendances qui se dessinent ?
La pandémie a entraîné des perturbations significatives sur les marchés immobiliers, mais également accéléré de nouvelles mégatendances, qui ont une influence importante sur les marchés immobiliers : l’accélération du télétravail et le développement du e-commerce, par exemple.

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Samy Bchir, Chief Investment Officer de l’expertise Real Estate, Sienna Investment Managers  - 

Ces nouvelles mégatendances, combinées aux risques associés aux secteurs traditionnels de l’immobilier commercial, comme le bureau et le commerce, ont changé la perspective des investisseurs institutionnels. Dans une optique de diversification, l’intérêt s’est notamment reporté sur la logistique, qui a bénéficié d’une très forte dynamique depuis les confinements. Son potentiel reste très fort dans les pays d’Europe du Sud en particulier, où le e-commerce connaît des taux de pénétration très faibles par rapport aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. La crise sanitaire a aussi mis en exergue le besoin d’investir dans le secteur de la santé et d’augmenter l’exposition au secteur résidentiel.

Des incertitudes et risques accrus, entraînés par des actualités récentes et conjugués à une forte augmentation des coûts de financement, ont rendu les investisseurs institutionnels plus prudents et ont généré une pression sur les rendements, mais ont également augmenté leur volonté de diversification géographique. Sienna Real Estate, qui opère dans 8 bureaux européens, a connu une forte demande sur des nouvelles géographies.

Sienna Real Estate est particulièrement présent sur le marché de l’immobilier de bureaux. Comment a évolué la demande des entreprises ?
Avec le regain d’importance accordée à la centralité, les entreprises ont tendance à privilégier les emplacements situés dans les centres-villes ou les quartiers d’affaires bien établis. Nous observons cette tendance depuis plusieurs mois, par exemple à Paris, où des groupes quittent des sous-marchés tels que Issy les Moulineaux ou La Défense pour aller dans le cœur de Paris, tout en réduisant significativement leurs surfaces.

En conséquence, ces marchés sont très tendus, car si la demande est forte, il n’y a que peu d’offres et le taux de vacance y est inférieur à 3%. A l’inverse, les quartiers éloignés du centre sont délaissés. A titre d’exemple, le taux de vacance dépasse les 20% dans les marchés périphériques à La Défense. Nous observons les mêmes mouvements dans tous les pays européens, où certains quartiers sont désertés au profit d’autres plus centraux.

Un deuxième facteur sélectif est l’ESG. En effet, la politique RSE des locataires les incite à rechercher des immeubles dotés des meilleurs labels environnementaux. Plus généralement, la prise de conscience par l’ensemble des acteurs de l’importance d’une démarche environnementale et sociale a créé une dualité, en écartant du marché des immeubles obsolètes ou pas aux normes. Sienna Real Estate a également une démarche d’investisseur responsable, aussi bien en agissant sur la dimension environnementale des immeubles (par exemple, par une amélioration de l’isolation des bâtiments et une optimisation de la consommation d’électricité) que pour la prise en compte de critères sociaux.

Ces phénomènes sont-ils observés aussi aux Etats-Unis ?
La situation est assez différente aux Etats-Unis. Les taux de vacance y sont très importants. L’occupation des bureaux a chuté de 70% depuis la période pré-Covid. A titre d’exemple, le taux de vacance à San Francisco a dépassé les 30% aujourd’hui, en comparaison à un niveau inférieur à 5% avant la pandémie.

En conséquence, les investisseurs américains sont très réticents à l’idée de réinvestir sur le marché des bureaux, y compris en Europe, car ils sont convaincus que ce phénomène va s’y imposer aussi. Cette réticence a un fort impact sur le marché européen des bureaux, compte tenu du poids élevé des investisseurs américains, notamment sur les transactions de taille importante.

Quels enseignements tirez-vous de ces évolutions pour votre propre stratégie sur le marché des bureaux ?
Nous restons convaincus du potentiel du marché des bureaux. Cette tendance du télétravail à plein temps commence également à s’inverser avec des sociétés comme Google, qui ont demandé à leurs employés de revenir au bureau pour passer à une formule de travail plus hybride. Si le modèle hybride, avec au moins un jour de télétravail, s’installe dans la durée, nous n’anticipons pas que les bureaux seront progressivement désertés, bien au contraire.

Sienna Real Estate continue de miser sur ce marché, en attachant une importance majeure à l’emplacement et en privilégiant les immeubles dotés de services susceptible de rendre une entreprise attractive aux yeux de ses collaborateurs.

Par ailleurs, nous sommes aussi dans une démarche de diversification sur des classes d’actifs qui bénéficient des tendances long terme du marché, par exemple, la logistique ou les actifs de santé.

Les marchés immobiliers sont-ils à un point d’inflexion et, en conséquence, comment vont s’orienter les valorisations et les rendements ?
Alors que les taux d’intérêts reviennent à leur moyenne historique, le rythme de la hausse des taux directeurs que nous avons connu lors des 12 derniers mois est d’une violence inouïe (9 hausses successives, soit 375 points de base). Ce changement a perturbé les marchés financiers en général et les marchés immobiliers en particulier. Dans les faits, nous assistons à un rééquilibrage des valeurs d’expertise du fait d’un coût de la dette en forte hausse et de changements d’allocation avec un appétit plus élevé pour les produits obligataires.

Le marché immobilier reste suspendu à l’évolution des taux d’intérêts. Nous voyons dans ce repricing des actifs immobiliers, une opportunité d’investir à des niveaux de prix très attractifs, notamment au Royaume-Uni, où les prix des actifs ont baissé le plus en Europe. Nous ne sommes pas dans une stratégie de bottom fishing, car il est assez difficile de prédire le point bas. Néanmoins avec une discipline d’investissement, en misant sur les classes d’actifs porteuses, des modèles de valorisation prudents, des emplacements de qualité et en accordant à l’ESG une place centrale, nous commençons à voir dans le marché actuel des opportunités très attractives.

Alcala 546, immeuble géré par Sienna Real Estate, situé à Alcalá avenue, dans un emplacement central à Madrid.
Alcala 544, immeuble géré par Sienna Real Estate, situé à Alcalá avenue, dans un emplacement central à Madrid. L’immeuble est labellisé LEED Platinum et WELL Platinum Certified.  - 

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