
SPDR relance le débat sur la guerre des prix dans le marché des ETF

Jusqu’où peuvent descendre les prix des ETF ? Depuis des années, cette question revient régulièrement sur le devant de la scène à chaque fois qu’un fournisseur décide de couper ses tarifs. En divisant par trois début novembre le TER (Total Expense Ratio) de son ETF européen sur le S&P 500 pour le faire tomber à 3 petits points de base (bp), State Street Global Advisors, via sa marque SPDR, a une fois de plus relancé le débat de la guerre des prix sur le marché des fonds indiciels cotés, ses principaux concurrents ne descendant pas en dessous de 5 ou 7 bp. Le rabais n’est d’ailleurs pas passé inaperçu : depuis début novembre, la collecte du SPDR S&P 500 UCITS ETF (ISIN : IE00B6YX5C33) a dépassé 267 millions d’euros selon les données de Trackinsight arrêtées au 21 novembre, soit près des trois-quarts de ses flux nets annuels.
Le sous-jacent ciblé par cette baisse tarifaire n’a pas été choisi au hasard : le S&P 500 est un indice emblématique pour le gérant américain, qui l’avait choisi, il y a trente ans, pour lancer le tout premier ETF du marché. Si le «SPY» compte aujourd’hui quelque 400 milliards de dollars d’encours aux Etats-Unis, son équivalent européen plafonne en revanche à 6,5 milliards d’euros, toutes «share classes» confondues. Il y a pourtant une vraie demande du marché. «Depuis 2018, les flux des investisseurs européens se sont dirigés à 60 % vers les ETF actions américaines, qui ont dépassé en encours les ETF actions européennes : ce sont ainsi 15 milliards de dollars qui affluent chaque année vers ce segment, calcule Ludovic Djebali, directeur SPDR ETF France de State Street Global Advisors. Nous avons donc voulu répondre à une préoccupation majeure des clients en les aidant à accéder à cette exposition avec les frais les plus bas sans faire de compromis sur la qualité de réplication.»
Démarche défensive
SPDR reste toutefois très discret sur la manière dont il a réussi à abaisser ses tarifs. «Nous avons aligné nos différents départements en interne de la manière la plus efficiente possible et nous bénéficions du support des acteurs de l’écosystème pour parvenir à ce niveau de frais», se contente d’expliquer Ludovic Djebali, sans commenter la question de la profitabilité des produits concernés. «A 3 bp, la marge restante pour le fournisseur de l’ETF est quasi-nulle voire négative, glisse un observateur. Il faut voir cette décision comme une action marketing de SPDR sur son produit phare qui vise à attirer certains investisseurs très sensibles au prix du fait des volumes gérés mais aussi à capter l’attention d’asset managers qui n’auraient pas encore référencé les produits de SPDR. L’ETF sur le S&P 500 fait office de produit d’appel pour le reste de la gamme.»
L’absence de réaction du reste du marché tend à montrer que la démarche commerciale est avant tout défensive. Contacté, BlackRock – dont l’ETF iShares Core S&P 500 UCITS ETF frôle les 60 milliards d’euros sous gestion – se borne à rappeler que la qualité de réplication est tout aussi importante que le prix de l’ETF. Amundi, de son côté, explique miser sur la variété de sa gamme pour répondre aux besoins spécifiques de ces clients, en matière de sensibilité à l’ESG, d’éligibilité au PEA, d’attachement à la marque S&P ou de technique de réplication, le tout avec des tarifications différenciées. Aucun ne semble sur le point d’enclencher une guerre des prix.
Une explication peut se trouver dans la sensibilité très relative des investisseurs européens, essentiellement professionnels, à la seule dimension des TER. «Les frais de gestion facturés par l’émetteur du fonds (TER) ne représentent qu’une partie des coûts totaux supportés par les investisseurs, rappelle Julien Scatena, head of marketplace au sein du fournisseur de données Trackinsight. Le fait d’avoir un TER bas est bénéfique pour la performance globale du fonds mais rien ne garantit que l’ETF le moins cher sera le plus performant. Il vaut mieux s’attarder sur la performance relative de l’ETF par rapport à son indice de référence, la «tracking difference» qui, elle, intègre l’ensemble des coûts supportés par l’émetteur qui seront refacturés à l’investisseur.» C’est le cas des frais de trading notamment, parfois compensés par les revenus du prêt-emprunt de titres. Or sur un an, SPDR est plutôt en bas de tableau sur le critère de la «tracking difference» : la décision d’abaisser les frais à 3 bp, de même que celle – prise en septembre – d’autoriser le prêt-emprunt de titres sur ses ETF, devraient contribuer à améliorer les performances. En outre, si le prix facial reste une variable parmi bien d’autres pour les investisseurs professionnels, la clientèle des particuliers y reste, quant à elle, très sensible. «Axer sa stratégie de communication sur les prix est un moyen de toucher un public plus large», confirme Julien Scatena. Or la distribution «retail» des ETF s’accélère actuellement en Europe.
D’une manière plus large, ce nouveau focus mis sur les frais par un des acteurs majeurs du marché montre que la gestion passive, malgré sa forte collecte, ne peut pas se reposer sur ses lauriers. «On voit se développer aux Etats-Unis des ETF «AI powered» qui répliquent des indices conçus par des robots : plutôt que d’utiliser le S&P 500, on réplique un indice de grandes capitalisations américaines potentiellement plus performant car optimisé par l’IA et moins cher car sans licence d’indice à payer», observe Jean-François Bay, directeur général de Quantalys, citant l’exemple du fournisseur coréen Qraft. Pour l’instant, la concurrence est essentiellement potentielle, les ETF de ce dernier affichant des TER élevés de 75 bp. Mais les ingrédients pour une reprise de la guerre des prix semblent bien réunis.
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