Les administrateurs sont de plus en plus remis en question

Alors que le cumul des mandats reprend dans le CAC 40, ses administrateurs sont moins bien élus. Les contestations sont plus fortes dans les grandes sociétés.
Bruno de Roulhac

Les saisons des assemblées générales se suivent mais ne se ressemblent pas. L’Hebdo des AG vient de dévoiler son analyse sur les 224 assemblées qui se sont déjà tenues pour les 312 sociétés du CAC All-Tradable, dont l’ensemble du CAC 40 et 90% du Next 80. Si les scores moyens restent élevés, les écarts s’accroissent, avec davantage de résolutions adoptées à la quasi-unanimité et d’autres avec unefaible majorité.

Fini le temps où unadministrateurétait élu avec un score soviétique sans même être présent en assemblée générale ! Les membres des conseils, en première nomination ou en renouvellement, sont de plus en plus challengés. Dans le CAC 40, les administrateurs ont été élus à 91% (-6 points) et réélus à 89% (-3 points). Notamment, chez Carrefour, où Thierry Breton et Abilio Diniz ont obtenu des scores bien inférieurs à 80%, seuil qui dans d’autres pays nécessite que les sociétés s’expliquent devant les actionnaires, rappelle L’Hebdo des AG.

Des actionnaires plus sévères sur les rémunérations

Du côté des rémunérations des dirigeants, les scores sont en baisse. Particulièrement dans le Next 80, avec un taux d’approbation du vote ex-post de 83% (-10 points) et du vote ex-ante de 84% (-7 points), contre respectivement 84% (-2 points) et 87% (stable) dans le CAC 40. Dans le reste du CAC AllTradable, les rémunérations sont adoptées à 93%. La saison a été marquée par les rejets chezCGG et chez Renault. Si les scores moyens restent élevés, davantage de rémunérations ont été votées à moins de 80%, voire sous les 60%. En particulier, Atos, EssilorLuxottica, Vivendi et Carrefour enregistrent des scores bas pour la deuxième année consécutive, relève L’Hebdo des AG. En revanche, Vinci a su redresser la barre et a obtenu un score de plus de 90% cette année.

Mais surtout les contestations – résolutions votées à moins de 80% – se focalisent sur les plus grandes sociétés, bien que le poids des actionnaires de référence soit plus faible. Les actionnaires du flottant contestent un tiers des résolutions dans le CAC 40 (et en rejettent même un quart), mais un sixième seulement des résolutions dans les autres sociétés. Pourquoi ? D’une part, les résolutions contestées concernent d’abord les administrateurs, où les critères sont plus normés dans les grandes entreprises. «La moitié des votes d’administrateurs aurait été rejetée dans le CAC 40 en prenant seulement en compte le flottant, alors que l’hostilité est moins forte sur les bonus», précise Bénédicte Hautefort, éditrice de L’Hebdo des AG. D’autre part, les investisseurs, plus internationaux, s’appuient davantage sur les recommandations des proxys pour les grandes sociétés, or les proxys «ont en général une approche plus stricte que les investisseurs eux-mêmes», selon L’Hebdo des AG. Enfin, le CAC 40 est davantage touché par le phénomène sociétal «anti-élite», avec des assemblées générales, qui font office de «puissantes caisses de résonance de l’opinion publique», analyse L’Hebdo des AG.

Le rôle des salariés devrait se renforcer

Désormais, les salariés s’imposent au cœur de la gouvernance. S’ils ne représentent encore que 3% du capital et 6% des sièges dans le CAC All-Tradable, ils devraient prendre plus de poids dans la foulée de la loi Pacte qui favorise leur montée au capital et renforce leur présence au conseil. Ils pourraient alors jouer un rôle décisif pour les résolutions qui passent aujourd’hui de justesse.

Autre mouvement à attendre à l’avenir, le recul des abstentionnistes. La France bat des records, avec 32% d’abstention dans le CAC 40, contre moins de 20% au Royaume-Uni, en Allemagne et aux Etats-Unis. La prochaine transposition de la directive droit des actionnaires et le développement du vote électronique devraient faire remonter le taux de participation, anticipe Bénédicte Hautefort.

Du côté du fonctionnement des conseils, les sociétés ont désormais très largement adopté le système de l’administrateur référent ou vice-président, présent dans plus de 80% du CAC 40, plus de la moitié du Next 80, et 45% des autres sociétés. Il est généralement l’interlocuteur dédié pour parler aux actionnaires et aux investisseurs.

Les administrateurs peu assidus sont déjà sanctionnés par les actionnaires. Les 55 administrateurs du CAC All-Tradable, dont le taux de présence était communiqué, et inférieur à 55%, n’ont été réélus en moyenne qu’à 69%. L’an prochain, le taux d’assiduité individuelle des administrateurs devra obligatoirement être indiqué. Les actionnaires le regarderont de près.

Les censeurs reviennent dans les conseils

Mauvaise nouvelle, le cumul des mandats repart à la hausse, même si le niveau actuel reste faible avec en moyenne 1,2 mandat par administrateur dans le CAC All-Tradable. Cette saison, 18% des nouveaux administrateurs élus dans le CAC 40 ont plus d’un mandat. De plus en plus, «on valorise l’expérience du conseil», explique Bénédicte Hautefort.

Surprise, qui sera diversement appréciée, les censeurs font leur grand retour dans les conseils. Ils sont désormais 10 dans le CAC 40, 29 dans le Next 80, et 69 dans les autres sociétés. Si les proxys voient souvent ces nominations comme un sas d’entrée avant de devenir administrateur, ces sièges de censeur permettent d’accueillir des personnalités – Valérie Pécresse et Anne Hidalgo sont censeurs chez ADP et le général Georgelin vient d’être élu à seulement 62% censeur chez Atos – sans que leur responsabilité pénale soit engagée.

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