
Emploi, la finance en bonne forme

Publiée le 4 mai dernier, la dernière enquête Besoins en main-d’œuvre (BMO) de Pôle emploi recense 41.260 projets de recrutement cette année dans les activités financières et d’assurance, dont 39 % sont jugés difficiles. Le secteur, qui représente 1,5 % de l’ensemble des intentions d’embauches, a vu celles-ci se réduire de 18,9 % par rapport à 2020. Mais les cabinets de recrutement spécialisés sont plutôt sereins.
Car après un printemps 2020 marqué par une mise en veilleuse des mandats et un attentisme, voire des désistements de candidats peu désireux de tenter la mobilité sans réelles garanties, le marché de l’emploi a retrouvé de belles couleurs dès l’automne. « Dans la finance de marché, l’année 2020 avait très bien commencé. Le premier confinement a stoppé cet élan mais les recrutements n’ont pas été annulés, simplement reportés, confirme Karine Favreau, directrice associée en charge de ce pôle chez Fed Finance. Le troisième trimestre 2020 a même été meilleur que d’habitude et cette dynamique n’a pas cessé car nous sommes sur des métiers – private equity, gestion privée, asset management... – qui ont le vent en poupe. Sur les fonctions contrôle interne, risque et conformité, certaines entreprises ont même surenchéri sur des offres externes pour éviter de perdre leurs meilleurs éléments. »
Des mandats nombreux et diversifiés
« Nous avons globalement bien tenu sur les services financiers, qui se transforment et sont générateurs d’emplois, avance également Jean-François Monteil, directeur général de Morgan Philips Banking, City & Fintech. Les marchés se sont finalement bien comportés. Et si les bonus sont clairement en berne dans beaucoup d’activités, il y a des besoins, notamment dans les métiers ‘sales’ de la gestion d’actifs, en solutions d’investissement, en gestion de taux, actif-passif (ALM), ainsi que dans les métiers du risque. » Sans compter l’essor des investissements ESG (reposant sur des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance), « auxquels personne ne pourra échapper à terme ».
Chez Vauban Executive Search, dont la practice finance intervient surtout auprès des entreprises et des fonds d’investissement, Martin Louvet, senior advisor, note pour sa part une demande assez prononcée dans le financement de projets. « Il y a beaucoup de liquidités sur cette classe d’actifs et donc d’opérations, indique-t-il. Nous avons également des offres sur la fonction DAF (directeur administratif et financier, NDLR), un marché de remplacement pour l’essentiel mais où l’ancien ‘gardien des normes comptables’ cède le pas à des profils plus souples, proches des opérations, capables de parler avec tout le monde et de proposer des solutions. Les ETI et les PME ont été actives en 2020 alors que les grands groupes avaient, par prudence, gelé les recrutements dès le mois de mars. »
Chez Vendôme Associés, après un excellent exercice 2020, l’année 2021 se déploie sous les mêmes auspices, avec « des mandats nombreux et diversifiés ». Son président, Denis Marcadet (lire le Témoignage), se veut résolument optimiste, comme en témoigne le Baromètre métiers et tendances du cabinet, mis en ligne récemment. La place financière parisienne, qui affiche, outre « une certaine qualité de vie, un vivier d’emplois et de compétences très qualifiées », a bel et bien tiré son épingle du Brexit (avec Dublin et Amsterdam). « Tout est en train de s’ajuster et les intervenants de marché devraient, pour le dernier trimestre, avoir besoin d’opérateurs de marché avec les implications que cela engendre sur les fonctions supports », observe-t-il. Jean-François Monteil, pour qui « le Brexit se traduit pour l’instant par des transferts de personnel », s’attend de fait à « des recrutements nets dans le réglementaire et la conformité ».
Chez Vendôme Associés comme chez Morgan Philips, on pointe également l’excellente santé du private equity : « C’est une offre de plus en plus large qui se structure et intéresse tout le monde, des assureurs aux asset managers et banques privées », commente Jean-François Monteil.
Tapis rouge pour les profils IT
Autres points notables pour Denis Marcadet : l’industrie de la gestion d’actifs reprend de la vigueur, l’ESG y étant incontournable et la digitalisation, un état de fait, tout comme le développement de la gestion passive et l’essor du non-coté. « L’impact du Brexit est indéniable avec le déploiement de sociétés entrepreneuriales en gestion privée, alternative, quantitative... L’engouement pour les actifs réels conduit à un besoin de profils diversifiés (‘client services’, ‘data’...). Le ‘corporate banking’ n’est pas en reste, avec une activité soutenue : financements structurés, ‘leverage’, solutions de paiements. »
Dans un contexte où le digital, le travail à distance et les cybermenaces ont pris de l’ampleur, certains informaticiens se voient dérouler le tapis rouge. D’autant que la finance n’est pas la seule concernée. « Les compétences en cybersécurité – consultants, ingénieurs, ‘pentesters’... –, développement, ‘data’, intelligence artificielle et ‘machine learning’ sont très convoitées », confirme Charles Hidier, recruteur senior au sein du cabinet Hurryman.
Ces derniers mois auront par ailleurs consacré la place de la visio dans le recrutement. « Elle facilite l’organisation des entretiens et permet de maintenir une dynamique dans le processus, juge Martin Louvet. C’est une souplesse dont on aurait tort de se priver. » Enfin, si l’heure n’est pas vraiment à la surenchère salariale, sauf sur certains profils rares, les entreprises auraient, en revanche, beaucoup réfléchi à l’équilibre vie professionnelle-vie personnelle, le télétravail étant devenu « un élément déterminant pour les candidats », observe-t-on chez Fed Finance.
Pour aller plus loin, le Baromètre métiers et tendances, Vendôme Associés, dans la version digitale de L’Agefi Hebdo
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