
Olga de Tapia (HSBC AM) : « Nous créons des share classes cotées au sein de nos fonds indiciels obligataires »

HSBC AM, qui gère une vingtaine de milliards d’euros de fonds indiciels cotés, va accélérer son développement sur le marché des ETF européens en cotant des parts de mutual funds de droit irlandais gérés passivement. Si ce montage est déjà pratiqué aux Etats-Unis, en particulier par Vanguard, et depuis le Luxembourg, par des acteurs comme Amundi ou BNPP AM, c’est une première dans la principale place européenne pour la gestion passive. A la différence de son homologue luxembourgeois, le régulateur irlandais impose en effet que l’ensemble du fonds soit renommé comme un ETF, ce qui freinait jusque-là les gérants. Pour HSBC AM, ce n’est qu’une innovation parmi d’autres.
L’Agefi : Le régulateur irlandais, dont dépend votre offre passive, vient de vous autoriser à créer des parts de fonds indiciels sous format ETF. Qu’est-ce que cela va changer ?
Olga de Tapia : Historiquement, notre offre passive était divisée en deux : d’un côté, la gamme actions qui était sous format ETF et de l’autre, la gamme obligataire qui était logée dans des fonds indiciels non cotés, soit six fonds pesant 17,2 milliards de dollars d’encours. Certains de nos clients, comme les gérants multi-actifs ou les banques privées, préfèrent acheter des ETF plutôt que d’investir dans des mutual funds, ce qu’ils ne pouvaient donc pas faire pour leurs expositions fixed income. Nous avons demandé et obtenu du régulateur irlandais le droit de créer une « share class » cotée au sein de certains de nos fonds indiciels. Quatre stratégies sont pour l’instant concernées – celle sur la dette gouvernementale globale, son équivalent durable, celle sur la dette corporate globale et celle sur la dette chinoise –, soit 5,9 milliards de dollars d’encours. Si ce type de montage est déjà utilisé aux Etats-Unis et au Luxembourg, HSBC AM sera le premier fournisseur à le mettre en œuvre en Irlande, qui est la principale Place européenne pour les ETF, notamment grâce à sa fiscalité avantageuse.
Les fonds indiciels concernés vont-ils devoir être modifiés ?
Pour créer cette « share class » cotée, le régulateur nous demande de changer le nom de l’ensemble du fonds pour y intégrer le terme d’ETF, ce que nous avons fait. Mais au-delà, il n’y aura pas de conséquence sur la gestion et les investisseurs ne verront pas de différence.
A quel niveau seront fixés les frais de gestion ?
Dans un mutual fund, il est possible d’adapter le prix au volume d’investissement de chaque client, en lui donnant accès à des share class plus ou moins chargées en frais, selon qu’il s’agit d’un particulier ou d’un institutionnel. Avec les ETF, les fournisseurs ne peuvent pas contrôler qui investit. C’est donc nécessairement le niveau de frais le plus élevé qui s’applique.
Ce sera donc peu attractif pour les investisseurs institutionnels…
Les institutionnels peuvent être intéressés par ces ETF pour mettre en œuvre leurs décisions tactiques, car ils bénéficieront d’une liquidité intraday qu’ils n’ont pas avec le format mutual fund. Mais il est vrai que cette transformation vise surtout à permettre à nos clients retail et wealth d’accéder à nos stratégies obligataires.
Avez-vous l’intention de généraliser cette approche au-delà de ces quatre fonds ?
Nous allons la tester, mais l’idée est effectivement de transformer l’essentiel de notre gamme, y compris notre fonds flagship global aggregate qui compte 9 milliards de dollars d’encours et qui deviendrait, de ce fait, le plus gros ETF sur ce segment. Nous allons aussi continuer de compléter notre gamme obligataire en suivant le même modèle.
Depuis janvier, nous avons lancé quatre ETF islamiques
Quelles sont vos autres priorités en matière de développement de nouveaux produits ?
Ces deux dernières années, nous avons vu une croissance exponentielle de la demande pour nos stratégies islamiques, conformes à la Charia, de la part de nos clients du Moyen-Orient, de Malaisie ou d’Indonésie, mais pas uniquement. Nous avons aussi constaté un appétit de fonds de pension britanniques – obligés de proposer une telle offre par défaut à leurs bénéficiaires – ainsi que de clients privés en Suisse et, dans une moindre mesure en France et en Belgique. Nous cherchons donc à construire une gamme complète sur ce segment de l’investissement islamique. Depuis janvier, nous avons ainsi lancé quatre ETF islamiques qui représentent une cinquantaine de millions de dollars d’encours et nous allons continuer d’élargir l’offre, notamment sur le segment obligataire avec les sukuks. Il est intéressant de voir les nombreux recoupements qui existent entre la gestion compatible avec la Charia et une approche d’intégration ESG, avec notamment des exclusions communes.
Nous allons également continuer de nous renforcer sur les ETF thématiques. Nous avons récemment lancé un véhicule qui réplique l’indice Hang Seng Tech pour une exposition aux valeurs technologiques chinoises, ainsi qu’un véhicule sur le segment des semi-conducteurs. Nous explorons aussi les thématiques durables.
Telles que la biodiversité ?
Nous avons effectivement lancé un ETF biodiversité l’an dernier, mais il ne s’agit pas d’un ETF thématique. Il est construit en appliquant des filtres sur un univers de départ d’actions mondiales pour retirer les entreprises les plus mal notées sur le plan ESG et de la biodiversité. Un ETF thématique ciblerait au contraire des sociétés qui se focalisent sur la préservation de la biodiversité.
A lire aussi: "HSBC AM est le fournisseur d’ETF qui a enregistré la plus forte croissance en Europe ces deux dernières années."
Quels sont vos autres axes de différenciation ?
Nous avons assez tardivement décidé de créer des share class d’ETF offrant une couverture de change et nous sommes en train de les déployer, pour l’euro ou encore le franc suisse. A la différence des autres fournisseurs, nous avons choisi de ne facturer que le coût réel de la couverture, sans chercher à faire de profit. Cela réduit significativement les frais de gestion sur ces parts hedgées, qui sont par exemple de 18 points de base pour l’ETF sur le MSCI World en euros contre une trentaine pour les autres ETF du marché.
Que pensez-vous des ETF de gestion active ?
Nous avons dans notre gamme un ETF actions multi-factoriel qui ne réplique pas explicitement un indice, mais que nous ne considérons pas pour autant comme un ETF géré de manière active. Il suit en effet passivement une stratégie quantitative développée au sein du groupe. Nous voyons beaucoup de marques d’intérêt pour les ETF actifs aux Etats-Unis, mais nous attendons de voir comment le marché européen évolue sur ce sujet.
Nous attendons de voir comment le marché européen évolue sur les ETF actifs
Comment se répartit votre clientèle, en termes de profil ou de zone géographique ?
Au global, les institutionnels représentent environ 43 % de nos encours. Cette part varie cependant beaucoup selon les régions. En Europe, ce sont les clients wholesale, de banques privées et de family offices qui dominent à 60 % environ. En Asie, les institutionnels représentent 80 % de nos encours. Nous avons été très focalisés sur le développement de la clientèle européenne au départ. Nous avons mis l’accent sur l’Asie l’an dernier et nous regardons désormais le Mexique et le Moyen-Orient. Tous ces clients sont servis à partir de notre plateforme irlandaise Ucits. Elle présente de nombreux avantages pour les investisseurs asiatiques, avec des horaires de cotation proches des leurs, une flexibilité dans le choix de distribuer ou capitaliser les dividendes, et un traitement fiscal intéressant des dividendes américains.
Face aux mastodontes du marché européen des ETF, comment souhaitez-vous vous positionner ?
Nous avons enregistré l’une des plus fortes croissances du marché européen ces dernières années. Il y a quatre ans, nous étions en treizième position et nous sommes désormais huitième, selon le classement d’ETFGI. Nous avons investi beaucoup de ressources pour construire une plateforme robuste et aujourd’hui, nous collectons les fruits de nos efforts. Nous ne cherchons pas à avoir la gamme la plus large possible : nous nous voyons plutôt comme une « boutique » d’ETF.
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