Très compétitif en matière de coûts de financement, le compartiment des billets de trésorerie reste pourtant relativement peu exploité par les corporates français. Début janvier, ils étaient 64 à disposer d’un programme d'émission actif pour un encours global de 24 milliards d’euros. « Il s’agit d’un marché simple d’accès en matière de documentation, géré par la Banque de France, pas cher et très liquide. Pourquoi ne pas l’ouvrir plus largement aux entreprises de taille intermédiaire ? », a lancé Hervé Labbé, directeur de la salle des marchés de France Télécom, à l’occasion d’un débat organisé dans le cadre des dernières journées d'études de l’Association Française des Trésoriers d’Entreprise (AFTE). D’après un sondage, la moitié des ETI estime ne pas bien connaître ce marché et pense qu’il est réservé aux grandes entreprises. Cette dernière perception n’est sans doute pas étrangère à la nécessité de maintenir en permanance un niveau d’encours minimal pour préserver les liens avec les investisseurs, de l’ordre de 100 à 150 millions d’euros, ou encore, pour les émetteurs non cotés, de solliciter une notation de crédit auprès d’une agence. Intervenant également aux journées d’Etudes de l’AFTE, Emmanuel Arabian, directeur financement et trésorerie de Biomérieux, indiquait pour sa part avoir mis un certain temps avant d’activer son programme en raison notamment de la nécessité de gérer la communication auprès des investisseurs. Face à ce constat, un groupe de travail supervisé par la Banque de France a été formé sous la direction de Gérard Soularue, président de la commission « économie et croissance » de la CCI de Paris IDF, pour élaborer des propositions visant à faciliter l’accès au marché des billets de trésorerie. Tenant compte des réticences de nombreuses entreprises à se faire noter par une agence, le groupe préconise de faire reconnaître auprès des régulateurs de marché la cotation Banque de France. Ce scoring de crédit a le mérite d'être indépendant, gratuit et d’exister pour chaque entreprise. Si son utilisation est reconnue dans les modèles prudentiels Bâle II, elle rencontre toutefois peu d'échos auprès des investisseurs. Une autre proposition plaide pour la suppression de la notation court terme, qui dans sa forme actuelle découle essentiellement de la notation à long terme, pour laisser place à une véritable référence de court terme reposant sur des critères d’analyse spécifiques. Cette évolution nécessite au préalable le développement d’une nouvelle offre par les agences de notation. Dans l’idéal, cette notation pourrait être sollicitée auprès de n’importe qu’elle agence agréée en Europe. Côté investisseur, le groupe préconise la création d’une nouvelle catégorie d’ OPCVM monétaire crédit. Les fonds de cette nouvelle catégorie pourraient investir une partie de leurs actifs dans des papiers qui ne bénéficient pas d’une notation suffisante pour être éligible à l’investissement par les fonds monétaires. A terme, la suppression de toute référence à la notation serait envisagée. Cette perspective s’appuie sur l'évolution de la réglementation, qui pousse les investisseurs à se doter des moyens nécessaires pour mener à bien leur propre analyse du risque crédit. Plusieurs émetteurs actifs sur le marché des billets de trésorerie s’affranchissent déjà de notation. C’est notamment le cas de Fromageries Bel, qui se finance sur ce marché à hauteur de 100 millions d’euros. « Le lancement d’un programme de billets de trésorerie a constitué la première étape de la diversification des financements du groupe. Auparavant, le groupe disposait de conditions quasi équivalentes par le biais de ses lignes bancaires mais ces conditions ont disparu avec la crise », commente Benoît Rousseau, directeur de la trésorerie et des financement du groupe. Pour des tirages de maturité comprise entre un jour et un an, le compartiment des billets de trésorerie constitue actuellement pour de nombreux émetteurs la solution de financement la plus intéressante. Toutefois, l’activation d’un programme d'émission nécessite la mise en place préalable d’une ligne de liquidité (back-up). Fournie par les banques, elle a pour rôle de couvrir l'émetteur en cas de désaffection inopinée des investisseurs.